RETOUR VERS LE FUTUR (Critique)

Par Cliffhanger @cliffhangertwit

SYNOPSIS: 1985. Le jeune Marty McFly mène une existence anonyme auprès de sa petite amie Jennifer, seulement troublée par sa famille en crise et un proviseur qui serait ravi de l'expulser du lycée. Ami de l'excentrique professeur Emmett Brown, il l'accompagne un soir tester sa nouvelle expérience : le voyage dans le temps via une DeLorean modifiée. La démonstration tourne mal : des trafiquants d'armes débarquent et assassinent le scientifique. Marty se réfugie dans la voiture et se retrouve transporté en 1955. Là, il empêche malgré lui la rencontre de ses parents, et doit tout faire pour les remettre ensemble, sous peine de ne pouvoir exister...

Le grand nom du film grand public des années 80 est bien évidemment Steven Spielberg. C'est vrai, on a tendance à ne retenir que lui. Avec ses Jurassic Park, Indiana Jones et autre E.T., il semble être, dans la tête de cette jeune génération (celle qui a grandi avec lui) le marqueur temporel d'un cinéma bien établi. Ultra codifié, on a tout le temps le droit avec ces longs-métrages à des aventures qui nous plongent dans nos fantasmes les plus fous et nos rêves enfantins, réveillant ce jeune alter-ego qui dormait en nous. Cependant, on omet beaucoup trop un autre cinéaste, de la même génération que Spielberg, mais qui a autant apporté sa pierre à l'édifice que Spielberg. On lui doit quelques merveilles de nostalgie telles que Forrest Gump ou Qui veut la Peau de Roger Rabbit et bien évidemment Retour vers le Futur. Son nom, on ne le connaît que trop peu alors qu'il a forgé bon nombre d'enfances : Robert Zemeckis.

Dire que Retour vers le Futur est un monument de la pop-culture est une évidence. Alors que le long-métrage (premier de la trilogie) a dépassé les 30 ans, il nous a semblé cohérent de revenir sur ce qui fait de ce film l'un des plus importants des années 80. Est-ce simplement une histoire de nostalgie ? Un souvenir lié à l'enfance, à une génération bien particulière ? La réponse est simple : non. Certes le contexte dans lequel le long-métrage est sorti était propice à ce style de cinéma (le cinéma pop-corn estampillé du tampon " Approuvé par Steven Spielberg" ), mais Retour vers le Futur a surtout cette dimension intemporelle (Ne voyez pas dans cette phrase un jeu de mots en rapport avec la thématique du voyage dans le temps). Zemeckis a construit une œuvre qui se transmet de génération en génération, et qui semble toujours complètement d'actualité. Que ce soit par le prisme de ces personnages qui semblent appartenir plus à des stéréotypes qu'à une génération (même si le Rock'n Roll réduit un peu Marty McFly à son époque) ou par la thématique de la famille, thématique intemporelle par excellence, le long-métrage de Zemeckis dégage un sentiment de puissance sur le temps. Il est impossible de réduire le film à son contexte, car c'est l'opposé de ce qu'il cherche à faire. A l'instar de son histoire, Retour vers le Futur a pour vocation de s'affranchir des contraintes temporelles.

Le nombre d'éloges sur ce film dépasse déjà l'entendement car il a réussi à s'implanter dans l'esprit du public comme un classique instantané. Il suffit de demander à n'importe qui si elle connaît Marty McFly, ou de chantonner le thème musical du film. Avec ce long-métrage, Robert Zemeckis montre sa maîtrise de tous les éléments qui font le cinéma mainstream popularisé par Spielberg : un teenager typique américain en personnage principal, fan de Rock dans une Amérique coincée allégorisée par le lycée, le sidekick génialement barré rejeté par la société, l'histoire d'amour qui semble perdue d'avance mais qui ne décourage en rien notre protagoniste, et bien sûr, son lot de répliques toutes plus cultes les unes que les autres. Car si nous nous plaisons à mépriser trop souvent la Version Française et nos comédiens nationaux qui se prêtent à l'exercice du doublage par une sorte de purisme hypocrite, on oublie trop souvent que certains doublages marquent leur film au point qu'ils occultent la version originale. Du " Nom de Zeus " de Doc Brown au " Tu veux ma photo, banane ? " de Biff Tannen en passant par le célèbre " 2,21 Gigowatts ?! " , l'un des plus célèbres néologismes du cinéma (le mot " gigowatt " n'existe pas), la version française du long-métrage, menée par Luq Hamet et Pierre Hatet dans les rôles de Marty et Doc, s'impose comme une des meilleures jamais entendues au cinéma tant elle s'est implantée avec la mythologie Retour vers le Futur.

Décortiquer une mythologie n'est pas chose aisée. Mille et une choses ont pu faire de ce film un monument. Le cinéma est ponctué d'incertitudes et de hasard, au point qu'on ne sait pas ce qui peut déclencher un engouement. La preuve : personne ne croyait au succès de Retour vers le Futur avant sa sortie. Mais si le film s'est implanté dans l'histoire du cinéma, il y a une raison toute simple : il est purement et simplement excellent. Et avec toutes les critiques, les glorifications du film, on en oublie de le voir comme un simple objet filmique. Retour vers le Futur se révèle être, par ce prisme non biaisé par son statut de monument, un excellent film de SF pop-corn, un feel-good movie d'aventure par excellence. Il marque les esprits parce qu'il a réussi à toucher les cordes sensibles des spectateurs en créant un univers à partir de fantasmes scientifiques : tout le monde rêve de voyager dans le temps, de voir une autre époque. Tout le monde s'est déjà demandé comment étaient nos parents à notre âge, comment ils se sont rencontrés. Peut-être Retour vers le Futur a-t-il permis à de jeunes enfants de démystifier leurs figures parentales : ils étaient exactement comme nous. A l'instar de Marty, on découvre que nos parents étaient des gens normaux, nous permettant de prendre du recul sur notre propre vie, notre propre vision du monde. C'est ainsi qu'un film s'ancre dans l'histoire du cinéma : une histoire simple (mais pas simpliste) qui cache des sens de lecture à foison en fonction de qui le regarde, et une ambiance pop intemporelle qui joue parfois sur la fibre nostalgique sans rentrer dans une caricature trop forcée. Car évidemment que Retour vers le Futur est une caricature, mais n'est-ce pas là l'objectif du cinéma ? Peindre une version exagérée de la société pour y mettre en évidence les défauts, n'est-ce pas là le but du 7ème Art ?

Ce film recèle de tellement de secrets et de sens de lecture qu'il ne sera jamais tari. Il semble donc peu probable qu'il sombre dans l'oubli. Les performances habiles et sincères de Michael J. Fox et de Christopher Lloyd, accompagnés de Lea Thompson, Crispin Glover et Thomas F. Wilson suffisent à soutenir la crédibilité de l'univers crée par Robert Zemeckis et les équipes Décoration et Costumes. Chaque image du film possède des repères visuels et temporels auquel on peut s'accrocher. Retour vers le Futur, de façon formelle, est constitué de tout ce que le cinéma peut proposer, que ce soit en terme de procédés techniques, scénaristiques, d'humour ou de répliques cultes à foison. Derrière ses apparences de teen-movie d'aventure profondément américain, Back to the Future brille par son excellente utilisation formelle des outils que le cinéma offre, tout en s'ouvrant à quiconque veut bien y jeter son cœur et son esprit pendant 116 minutes. Et l'expérience, au-delà de nous faire grandir, synthétise nos fantasmes les plus profonds en créant un film d'aventure drôle, haletant et palpitant, baignant dans l'ambiance pop si caractéristique des années 80, qui continue encore aujourd'hui de rendre nostalgique Hollywood.

Titre Original: BACK TO THE FUTURE

Réalisé par: Robert Zemeckis

Casting : Michael J. Fox, Christopher Lloyd, Lea Thompson...

Genre: Science fiction, aventure

Date de sortie: 30 Octobre 1985

Distribué par: CIC

CHEF-D'ŒUVRE