Mort de Bernardo Bertolucci

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Seulement trois jours après Nicolas Roeg nous apprenons la mort d'un monument du 7ème Art avec la disparition de Bernardo Bertolucci ce 26 novembre à l'âge de 77 ans.

Né en 1941 à Parme en Italie, le jeune Bernardo est le fils du poète Attilio Bertolucci. Rien d'étonnant donc que le fils débute d'abord par l'écriture dès ses 15 ans. Il reçoit également à ses 15 ans une caméra 16mm avec laquelle il commence à tourner des courts métrages. Il part ensuite suivre des études de littérature à Rome. C'est là bas qu'il fait la rencontre en 1961 d'un ami de son père, Pier Paolo Pasolini (ensemble ci-dessous) qui lui propose d'être son assistant sur le film "Accatone" (1961).

Suite à ce succès, le jeune Berbardo Bertolucci co-signe un scénario d'après une histoire de Pasolini, un scénario que le producteur Antonio Cervi lui propose de réaliser. Ainsi Bernardo Bertolucci réalise son premier long métrage avec "Les Recrues" (1962), une enquête sur le meurtre d'une prostituée.

Il enchaine avec "Prima Della Rivoluzione" (1964) inspiré de "La Chartreuse de parme" de Stendhal primé du Prix de la Jeune Critique au Festival de Cannes. Après le film "Partner" (1968) il est embauché pour co-signer le scénario d'un chef d'oeuvre, "Il Etait une Fois dans l'Ouest" (1969) de Sergio Leone. Ce western mythologique et culte reste un des seuls scénarios qu'il n'a pas lui-même porté à l'écran.

Ensuite il participe à un long métrage collectif, signant un des segments aux côtés de Per Paolo Pasolini, Jean-Luc Godard, Carlo Lizzani et Marco Bellochio pour "La Contestation" (1969). Ce film est symptomatique de ses engagements, adhérent au Parti Communiste ses convictions sont portés sur grand écran notamment avec ses films suivants comme "La Stratégie de l'Araignée" (1970) et "Le Conformiste" (1970 - ci-dessous).

Spécialiste de l'ambiguité politique comme sexuelle il va aller sans doute trop loin pour son prochain film. Un film qui fait sensation ne serait-ce que par son affiche. Il tourne "Un Dernier Tango à Paris" (1972 - ci-dessous) où un homme d'âge mûr incarné par le monstre sacré Marlon Brando a une liaison passionnelle avec une toute jeune Maria Schneider. Le film fait scandale, surtout en Italie, d'abord à cause d'une scène de sodomie au beurre mais surtout, plus tard, sur la façon dont s'est déroulé le tournage de cette séquence.

En effet, il semble que cette séquence ait été préparé par Bertolucci et Brando à l'insu de l'actrice, et si cette scène est simulé la puissance émotionnelle est décuplée de par ce viol, les larmes de l'actrice n'étant, elles, pas simulées. Des années plus tard, l'actrice avouera ne jamais avoir pardonné au réalisateur (et l'acteur ?!), elle aura plusieurs années ensuite des soucis de dépression et de drogues... Lors de la mort de l'actrice Maria Schneider, le cinéaste avouera se sentir coupable et de regretter ne pas s'être excusé bien qu'ensuite, en 2013, il affirme aussi ne pas avoir regretté en tant que réalisateur car il désirait obtenir "la rage et l'humiliation en tant que fille et non en tant qu'actrice"... Néanmoins, le film (sur le tournage ci-dessous) est alors son plus grand succès commercial.

Un succès qui lui permet de voir plus grand afin de réaliser ensuite un fresque historique d'ampleur avec "1900" (1976 - ci-dessous) avec en tête d'affiche Gérard Depardieu, Robert De Niro entouré d'un casting prestigieux.

Bernardo Bertolucci veut que son cinéma reflète ses idéaux politiques et si sa vision est souvent épique et romanesque il n'en demeure pas moins d'un réalisme sans concession sur la politique de son pays... Il participe à un documentaire en trois parties, "Les Ecrivains italiens et l'Italie des écrivains : ombres et questions" (1973-1974) qui précise les relations entre littérature et cinéma. Il revient ensuite avec un film plus intimiste, co-signé avec son frère Giuseppe après une première collaboration sur "1900", avec "La Luna" (1979) sur un drame familial sur fond d'inceste suivi de "La Tragédie d'un Homme Ridicule" (1981) qui vaut à l'acteur Ugo Tognazzi le prix d'interprétation au Festival de Cannes.

Bertolucci revient avec une grande fresque, "Le Dernier Empereur" (1987 - ci-dessus). Un film ambitieux et flamboyant sur le destin hors norme de Puyi dernier empereur de Chine de ses 3 ans à sa mort en 1967. Fait rare, le film a été tourné en partie dans la Cité Interdite de Pékin. Le film est salué par la critique te est un grand succès mondial avec en prime pas moins de 9 Oscars dont Meilleur Film et Meilleur réalisateur.

Le film semble avoir ouvert le réalisateur à l'exploration spirituelle et orientale en signant ensuite "Un Thé au Sahara" (1990) et "Little Buddha" (1993 - ci-dessous).

Entre temps il est Président du Jury au festival de Cannes 1990 qui décerne la Palme d'Or au magnifique "Sailor et Lula" (1990) de David Lynch. Par ailleurs il aura été par deux fois Président de la Mostra de Venise, en 1983 et 2013.

Le cinéaste revient ensuite aux sources en tournant un nouveau drame italien en Toscane, "Beautés Volées" (1995 - ci-dessus) où Liv Tyler, jeune américaine d'origine italienne revient tente trouver qui est son vrai père après le décès de sa mère. Puis il revient aux sources de ses idéaux politiques avec "Shanduraï" (1999) mais surtout avec "The Dreamers" (2003 - ci-dessous) un drame se déroulant pendant mai 1968 à Paris et qui révéla le talent et la beauté de Eva Green.

Entre temps il aura participer à un nouveau film collectif, "Ten Minutes Older" (2002) sur lequel il côtoie une nouvelle fois Jean-Luc Godard. Après avoir reçu une Palme d'honneur au festival de Cannes 2011 il réalise son dernier film personnel est "Moi et Toi" (2013) où un ado et sa demi-soeur vont découvrir des secrets de famille.

Bernardo Bertolucci a été mariée trois fois mais est resté sans enfant. Sur la question religieuse, dans une interview de 2006, un journaliste a demandé "Bertolucci est un croyant ?", ce à quoi le cinéaste a répondu en riant : "Non, je suis athée, dieu merci comme disait Bunuel".

Bernardo Bertolucci, malgré les scandales, demeure un des grands maitres du cinéma italien et à bel et bien sa place au Panthéon des grands du 7ème Art avec un part non négligeable de grands films dans sa filmographie.

Bernardo Bertolucci est mort ce lundi 26 novembre 2018 à l'âge de 77 ans des suites d'un cancer.