La dame de Shanghai

Un grand merci à Carlotta pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « La dame de Shanghai » d’Orson Welles.

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« Elle était belle et seule et j’avais tout le temps de m’attirer des ennuis »

Michael O’Hara fait la connaissance de la ravissante Elsa Bannister, qu’il sauve peu après d’une agression. Mariée à Arthur Bannister, un riche avocat âgé peu scrupuleux, boiteux et de retour de Shanghaï, Elsa fait embaucher Michael sur le yacht de son mari. O’Hara tombe sous le charme d’Elsa sous le regard indifférent de son mari quand, à l’occasion d’une escale , George Grisby, l’avocat associé de Bannister, lui fait une singulière proposition : le tuer sans risque contre une grosse somme d’argent avec l’argument qu’on ne peut pas être poursuivi en Californie tant que le corps n’est pas retrouvé par la police. À court d’argent, Michael O’Hara hésite, puis…

« A Shanghai, la chance ne suffit pas... »

La_dame_de_Shanghai_Orson_Welles

Homme de théâtre et de radio (on se souvient de la panique causée par son interprétation radiophonique de « La guerre des mondes »), Orson Welles s'essaye au cinéma dés la fin des années 30 avec ce qui restera comme son film le plus emblématique à savoir l'extravagant « Citizen Kane ». Un coup de maitre génialement novateur qui déroutera cependant la critique et sera boudé par le public. Son deuxième essai, « La splendeur des Amberson », sera lui largement charcuté par les studios et connaitra à son tour un échec public. Ce n'est finalement que grâce à son troisième essai, « Le criminel », pourtant un film de commande, que Welles connaitra enfin le succès. En 1946, alors qu'il peine à monter une onéreuse version du « Tour du monde en 80 jours » sur scène, il prend l'attache de Harry Cohn et lui propose de réaliser pour lui un film en échange de la somme nécessaire pour boucler sa pièce.

« Tu tuer revient à me tuer moi-même »

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Ce sera « La dame de Shanghai », d’après le roman « If I die before I wake » de Sherwood King. Un titre plein de mystère qui semble annoncer un film d'aventures exotiques. Pourtant, Welles signe là un modèle de film noir, genre alors en vogue à Hollywood. On y suit ainsi les tribulations d'un marin énigmatique, ancien combattant des brigades internationales espagnoles surnommé le Black irish, embarqué malgré lui dans une folle machination meurtrière. Une histoire des plus classiques et très codifiée (on y retrouve tous les archétypes du film noir, de l'antihéros à la femme fatale), dont l'originalité réside à l'évidence dans l'atmosphère vaporeuse, cotonneuse, créée ici par le cinéaste à grands coups d'effets visuels perturbants (l'avocat cynique à qui le handicap confère une allure monstrueuse, l'associé machiavélique au sourire menaçant, la visite romantique de l'aquarium où n'apparaissent en arrière plan que des créatures monstrueuses, le final dans la fête foraine désaffectée aux décors menaçants). Autant d'éléments visuels à la symbolique évidente qui servent ici à créer une ambiance oppressante, donnant au film l'aspect d'un cauchemar éveillé. Et puis il y a ce final resté célèbre dans le palais des miroirs, qui constitue le véritable morceau de bravoure et de panache du film. Au milieu de ce film noir comme la nuit, Welles promène sa grande carcasse d'une façon très désincarnée face à un Everett Sloan au physique inquiétant et à une Rita Hayworth (encore madame Welles à la ville avant que le couple ne divorce peu avant la sortie du film) incandescente en poupée blonde faussement naïve. Un classique absolu et formellement génial. Mythique. 

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Le blu-ray : Le film est présenté en version restaurée 4K, en version originale américaine (1.0) ainsi qu’en version française (1.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

Côté bonus, le film est accompagné d’une conversation autour du film avec Peter Bogdanovitch (20 min.), d’une analyse de Simon Callow, le biographe de Orson Welles (21 min.), d’un entretien avec le réalisateur Henry Jaglom (24 min.) et d’une bande-annonce.

Edité par Carlotta, « La dame de Shanghai » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 14 novembre 2018. Le film est également disponible en coffret ultra collector (n°11) comprenant le blu-ray + le DVD + le livre de 160 pages (incluant 50 photos d’archives) « Miroirs d’un film : La dame de Shanghai d’Orson Welles » .

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