LES VEUVES (Critique)

LES VEUVES (Critique)LES VEUVES (Critique)

SYNOPSIS: Chicago, de nos jours. Quatre femmes qui ne se connaissent pas. Leurs maris viennent de mourir lors d'un braquage qui a mal tourné, les laissant avec une lourde dette à rembourser. Elles n'ont rien en commun mais décident d'unir leurs forces pour terminer ce que leurs époux avaient commencé. Et prendre leur propre destin en main...

Le genre du film de braquage est, sans doute, l'un de ceux capables de produire les plus grandes déceptions, tant ils peuvent générer parmi les films les plus paresseux et commerciaux qui soit lorsqu'ils sont entre les mains de réalisateurs et de producteurs qui n'y voient qu'une sorte de martingale susceptible d'attirer les spectateurs dans les salles sur la promesse d'un des cocktails les plus populaires chez le grand public: action + humour + casting empilant les acteurs " bankables " du moment. L'un des exemples les plus récents qui viennent à l'esprit, est bien sûr le calamiteux Ocean's 8, film prétexte à la réunion d'un casting d'actrices, en roue libre, venues se relancer ( Sandra Bullock, Helena Bonam Carter) ou s'encanailler ( Cate Blanchet, Sarah Paulson, Anne Hattaway) dans ce qui devait être un poids lourd du box office. Le souvenir de ce naufrage est d'autant plus vif qu'il est ravivé par une lecture rapide du pitch des Steve McQueen ( Veuves et de son casting de braqueuses féminines. On a beau aimer, presque sans aucune réserve, les films de Hunger, Shame, 12 Years a Slave), il était difficile de ne pas avoir une pointe d'appréhension et de ne pas s'interroger sur la cohérence de ce choix, d'autant plus que McQueen était déjà mauvais signe. Les Veuves, pressenti à Cannes et Venise en est finalement resté à la porte, ce qui au vu de l'aura de

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Pour son premier essai dans le film de genre, Steve McQueen ambitionne de se mettre dans les pas des grandes références du film de braquage, lesquelles sont presque avant tout des films de personnages et des radiographies de leur époque (Du Rififi Chez Les Hommes, Le Cercle Rouge, Le Gang Anderson, Un Après-Midi de Chien, Le Récidiviste, Heat...). Sa note d'intention est clairement posée dans un prologue très réussi mettant en parallèle le dernier coup fatal de Harry Rawlings ( Liam Neeson) et ses acolytes avec des moments d'intimité avec leur épouse. Le montage alterné entre ces scènes de vie conjugale et la fuite des époux, dont le point d'orgue est un formidable plan séquence filmé depuis l'intérieur de leur camionnette, lance le film sur des bases enthousiasmantes et pose la note d'intention de Steve McQueen . Avec Les Veuves, il entend entremêler l'intime et le spectaculaire, plonger les mains dans l'action pure et dure, dans ce que l'on attend d'un film de braquage tout en restant connecté à ce qui faisait jusque là la grande force de son cinéma: faire ressentir de manière viscérale ce qui habite ses personnages. On en restera malheureusement au stade des intentions, y compris dans son ambition d'ancrer le film dans son époque, dans les problématiques politiques et sociales de la ville de Chicago qui offre un véritable condensé de ce qui se passe en Amérique (corruption des élites, violences policières, tensions raciales...). La note d'intention se consume en un vœu pieux et avec elle, le film de s'effondrer sur lui-même et de ne pas en finir de dévaler le sommet qu'il avait atteint dans son prologue. S'il n'y a pas loin du Capitole à la Roche Tarpéienne, Les Veuves nous démontrent qu'il n'y a pas loin du très prometteur film de braquage des premières minutes au très embarrassant, interminable et inconsistant film dans lequel Steve McQueen semble porté disparu, tout comme semble perdu l'ensemble de son très prestigieux casting.

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Si les intentions sont claires et louables, on sait qu'elles n'ont jamais suffi à faire un bon film et tout juste à faire naitre de belles promesses qui peuvent très vite être déçues. Faire de la ville un personnage du récit, entremêler intime, drame et politique pour, en filigrane de son récit, dresser un état de la société et de son époque, voilà une approche qu'on ne peut que saluer, qui rappelle les grandes heures du cinéma américain des années 70, notamment le cinéma de Sidney Lumet. Encore aurait-il fallu un vrai scénario, des choix narratifs plus clairs et une implication plus grande. Le drame de ces trois (quatre mais l'une est totalement laissée de côté par le scénario) femmes devenues veuves, se retrouvant à devoir survivre dans un monde dont elles ont été jusque là préservées par leurs maris, est survolé. Dans un récit qui entend traiter de résilience et suivre le parcours de femmes surpassant leur deuil pour s'unir autour d'un objectif commun qui leur permettra de construire leur vie future, la faiblesse de l'écriture de ces personnages féminins est aussi rédhibitoire qu'incompréhensible. Veronica ( Viola Davis), Linda ( Michelle Rodriguez) et Alice ( Elizabeth Debicki) sont caractérisées à gros traits et leurs interprètes limitées dans leur jeu ou forcées à surjouer lorsqu'arrive une scène qui creuse un peu plus leur psyché. Michelle Rodriguez joue de ses deux expressions habituelles, Elizabeth Debicki ne parvient jamais à combler le manque d'écriture de son personnage et à nous émouvoir, quant à Viola Davis, le constat est encore plus accablant. Ce qui était probablement pensé comme SA scène la plus forte, intervenant au début du récit, pour nous faire entrer en connexion avec son personnage est tellement raté que tous les voyants étaient déjà au rouge au bout de quelques minutes, donnant le " la " d'une direction d'acteurs incompréhensible pour un metteur en scène que l'on a jusque là connu tellement brillant en ce domaine. Affublée d'un bichon utilisé comme un accessoire, une béquille scénaristique pour bien la caractériser (à un point qui dépasse le stade du ridicule) comme une femme qui n'a rien à faire dans ce milieu de braqueurs, son personnage de femme (com)battante prend l'eau de toute part malgré quelques scènes où le talent de Davis trouve un espace pour s'exprimer mais qui sont bien vite " annulées " par les suivantes.

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Plus qu'accabler Viola Davis ou les autres acteurs de ce naufrage, il faut surtout s'interroger sur l'intérêt réel que McQueen porte à son récit et ses personnages pour les laisser ainsi en jachère et se satisfaire de scènes de dialogues qui sonnent tellement faux qu'elles en deviennent comiques. De ce point de vue, Colin Farrell est bien servi et patine totalement dans le rôle d'un politicien ambitieux et sans scrupules, mais la palme peut sans doute être décernée à Robert Duvall, en particulier dans une scène durant laquelle il aura fallu se pincer pour ne pas se dire que l'on se trouvait devant une parodie de drame familial/politique. Les Veuves est construit sur des fondations chancelantes et ne s'est pas donné les moyens de ses ambitions de renouer avec le grand thriller teinté de politique. Faute de s'attacher à ses personnages, d'être pris par le suspense de l'intrigue principale qui devient vaine après un twist qui lui enlève tout intérêt au lieu d'ajouter un enjeu, Les Veuves ne peut pas être sauvé par les quelques idées de mise en scène d'un Steve McQueen que l'on n'avait jamais vu aussi peu inspiré et pour tout dire, aussi peu investi.

LES VEUVES (Critique)

Titre Original: WIDOWS

Réalisé par: Steve McQueen

Casting : Viola Davis, Michelle Rodriguez, Elizabeth Debicki, Liam Neeson...

Genre: Thriller, Drame

Date de sortie: 28 novembre 2018

Distribué par: Twentieth Century Fox France

LES VEUVES (Critique)ASSEZ MAUVAIS