Embrasse-moi idiot

Un grand merci à Rimini Production pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Embrasse-moi idiot » de Billy Wilder.

Kiss_me_stupid

« Je ne suis pas tranquille. J’ai peur. J"ai épousé la plus belle fille de la région et un jour elle me quittera, c’est sûr ! »

Dino, un chanteur de charme sur le retour, tombe en panne de voiture dans une petite ville du Nevada. Le professeur de piano Orville Spooner l'accueille et aimerait lui faire entendre ses chansons. Il décide d'éloigner sa femme pour la faire remplacer en engageant Polly, serveuse dans un bar et entraîneuse à ses heures. Dino peut donc séduire la présumée épouse, sans nuire au bonheur conjugal d'Orville. Mais rien ne se passe comme prévu...

« Faites semblant d’être ma femme, il n’y a que comme ça que ça marche ! »

Embrasse_moi_idiot_Ray_Walston

Immense scénariste, Billy Wilder se fait connaitre au cours des années 30 en travaillant aux cotés de l'immense Ernst Lubitsch sur deux comédies restées dans les mémoires cinématographiques :  « La huitième femme de Barbe-bleue » et «  Ninotchka ». Après quelques collaborations avec entre autres Howard Hawks, il passe à la réalisation dès les années 40 où il se fait remarquer pour ses films noirs (« Assurance sur la mort », « Boulevard du crépuscule ») et ses drames intimistes (« Le poison », « Le gouffre aux chimères »). Mais à partir des années 50, il change quelque peu son fusil d’épaule et se consacre essentiellement à des films plus légers, qu’il s’agisse de comédies romantique (« Sabrina », « Ariane ») ou de comédies satiriques (« La scandaleuse de Berlin »). Mais c’est encore dans la comédie de mœurs que l’écriture incisive et ciselée de Wilder s’épanouit le mieux et que le cinéaste signe ses plus grands succès (« Certains l’aiment chaud », « La garçonnière »).

« Une femme sans son homme, c’est un peu comme une caravane sans sa remorque ! »

Embrasse_moi_idiot_Felicia_Farr

En 1964, après avoir essuyé quelques revers au box-office (la comédie satirique « Un, deux, trois » notamment), Wilder revient avec « Embrasse-moi idiot » à ses thèmes de prédilection, à savoir le couple, le désir et la fidélité. Ceux-là même qui lui valurent ses plus belles réussites (« La garçonnière », « Irma la douce »,...). Il imagine cette fois un étonnant vaudeville construit autour du personnage d’un médiocre pianiste provincial complotant pour faire venir chez lui un chanteur de charme dans le but de lui refiler ses chansons. Mais comme notre pianiste est atteint de jalousie maladive et que le célèbre chanteur a une réputation de tombeur, il s’arrange pour répudier sa femme et la remplacer le temps d’une soirée par une entraineuse. Avec son pitch génialement décalé, Wilder signe là une délicieuse comédie alliant comique de situation et dialogues qui claquent, qui semble s’inscrire dans la lignée de « Sept ans de réflexion ». Avec beaucoup de talent, il s’amuse à notamment contourner les codes de la censure en jouant sur l’art de la suggestion et du double-sens (la ville qui s’appelle « Climax » soit littéralement « Orgasme » en français ; les allusions au nombril, ou encore le fait que le héros soit attiré par n’importe quelle femme du moment que celle-ci incarne sa femme). Avec en prime, chose rare dans le cinéma américain de l’époque, un double adultère assumé et visiblement apprécié. En filigrane, comme dans « La garçonnière », le cinéaste se livre à une (nouvelle) critique acerbe de la société américaine portant notamment sur l’ambition et l’avidité, qui poussent les hommes à toutes les compromissions morales. Le cinéaste s'interroge également sur la complexité du désir et l'hypocrisie de la société quant à la question de la sexualité en inversant avec délice sur les archétypes de la mère de famille et de la putain. Porté par un formidable quatuor d’acteurs (Ray Walston et Kim Novak remplaceront au pied levé Peter Sellers et Marilyn Monroe pour qui les rôles avaient été initialement écrits), Wilder signe là une nouvelle fois une remarquable et mémorable comédie.

Embrasse_moi_idiot_Dean_Martin

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Le DVD : Le film est présenté dans un nouveau Master Haute-Définition, en version originale américaine (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

Coté bonus, le film est accompagné de deux heures de suppléments inédits qui font l’objet d’un second disque qui comprend notamment une conversation entre les journalistes Mathieu Macheret (Le Monde) et Frédéric Mercier (Transfuge), le Documentaire : « Billy Wilder, la perfection hollywoodienne » et le module « I.A.L. Diamond - Billy Wilder : écrire à quatre mains ».

Edité par Rimini Editions, « Embrasse-moi idiot » est disponible en DVD depuis le 18 septembre 2018.

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