[CRITIQUE] : Le Jeu

[CRITIQUE] : Le Jeu
Réalisateur : Fred Cavayé
Acteurs : Bérénice Béjo, Vincent Elbaz, Suzanne Clément, Stéphane De Groodt, Doria Tillier, Roschdy Zem, Grégory Gadebois,...
Distributeur : Mars Films
Budget : -
Genre : Comédie Dramatique.
Nationalité : Français
Durée : 1h30min

Synopsis :

Le temps d’un diner, des couples d’amis décident de jouer à un « jeu » : chacun doit poser son téléphone portable au milieu de la table et chaque SMS, appel téléphonique, mail, message Facebook, etc. devra être partagé avec les autres. Il ne faudra pas attendre bien longtemps pour que ce « jeu » se transforme en cauchemar.


Critique :

Véritable petit massacre entre amis façon huis clos tendu et comique dans la droite lignée du Prénom,#LeJeuLeFilm est un délice de comédie dramatique subtile et intelligente, qui divertit autant qu'il questionne son auditoire par la force d'un timing comique et émotionnel au poil pic.twitter.com/uip47EPgos— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) 11 octobre 2018

Après le mitigé Radin avec le (très) fatiguant Dany Boon, on pensait que l'excellent Fred Cavayé reviendrait à ses premiers amours, le thriller musclé (il est le papa, entre autres, de Pour Elle et Mea Culpa).

Mauvaise pioche puisque le bonhomme persiste dans la comédie, noire cette fois, avec un projet franchement bandant sur le papier : Le Jeu, libre adaptation de la comédie italienne Perfetti Sconosciuti, qui avait rencontré un joli succès populaire en 2016.
Porté par un casting de malade : Bérénice Béjo, Vincent Elbaz, Suzanne Clément, Stéphane De Groodt, Doria Tillier, Roschdy Zem et Grégory Gadebois; la péloche pouvait décemment, à l'instar de l'étonnant L'Amour Flou de Romane Bohringer et Philippe Rebbot, relever le niveau d'une cuvée 2018 loin d'être forcément défendable, et encore moins ces jours-ci en salles (coucou Alad'2).
Ou, en étant plus pessimiste, elle pouvait très bien se fondre dans la masse et tomber dans les méandres de la production franchouillarde.
[CRITIQUE] : Le Jeu

Bonne pioche, en reprenant un pitch sensiblement proche de celui du raté - pour être poli - Babyphone d'Olivier Casas (un diner tourne au cauchemar quand chacun doit laisser son téléphone sur la table en évidence, et lire à voix haute chaque message lors de sa réception), Le Jeu incarne une comédie aussi intelligente qu'elle est vive et jubilatoire, un véritable petit massacre entre amis façon huis clos comico-dramatique dans la droite lignée du Prénom - voire même du Carnage de Polanski.

Partant sur un postulat aussi pessimiste et réaliste qu'il est accrocheur - tout le monde à des petits secrets dont le smartphone est le totem loin d'être infaillible -, avant de graduellement monté en puissnce, Cavayé fait vriller les certitudes et les faux-semblants de tous ses personnages aisés au sein d'un jeu ludique ou l'intimité se fait groupe, pour le meilleur et surtout le pire.
Vrai film sur l'amitié (notamment dans l'image que l'on peut s'en faire, souvent loin de la réalité) au suspense étonnant (on en attendait pas moins du cinéaste), le métrage interroge surtout, par le rire et l'émotion (sincère), son auditoire sur la nature auto-destructrice de l'être humain, cette notion de pulsion contradictoire et incompréhensible chez certains (beaucoup ?) arrivés à un carrefour de leur vie, préférant embrasser à plein poumon le petit " piment " qui leur manque supposément et de fuir les petits soucis d'un quotidien plus ou moins insatisfaisant - mais parfait en apparence - plutôt que de les régler.
[CRITIQUE] : Le Jeu

Brassant une multitude de cas de figure (l'adultère, le mensonge, la trahison, notre dépendance abusive à la technologie moderne,...), porté par une mise en scène théâtrale aussi juste et à propos que la partition impliquée de son brillant casting (le couple Bérénice Bejo/Stéphane De Groodt et Suzanne Clement en tête) et leur timing comique au poil, Le Jeu est un délice de dramédie subtile, drôle, tendu et (presque) thérapeutique, un moment de cinéma enchanteur qui s'invite au diner pour mieux mettre les pieds dans le plat et mettre les convives dans l'embarras.

Beaucoup pourront critiquer - sans trop avoir tort - son classicisme et le manque de crédibilité de sa soirée apocalyptico-crepusculaire, mais il n'y a pourtant rien de plus agréable que de se laisser porter par ce jeu infiniment risqué et grinçant mais, surtout, follement jouissif (oui, le jeu en vaut la chandelle... pardon).


Jonathan Chevrier


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