La Mostra de Venise a 75 ans (et est en pleine forme!)

Par Boustoune

75ème Mostra internazionale d’arte cinematografica – La Biennale (Venise, Italie)
– du 29 août au 8 septembre 2018 –

D’aucuns la disaient un peu vieillotte, fatiguée, moins en forme que ses contemporains Cannes et Berlin, dépassée par les quadras de Toronto ou les ados de Tribeca. Et pourtant…
A l’âge respectable de soixante-quinze ans, ce qui en fait la doyenne des festivals de cinéma internationaux, la Mostra de Venise semble afficher une forme éclatante, à en juger sa programmation alléchante, intégrant bon nombre d’auteurs qui étaient attendus à Cannes en mai dernier, mais finalement absents de la Croisette pour cause de montage non-terminé, stratégie pour les Oscars, bannissement des oeuvres Netflix et autres subtilités politiques et intrigues de palais.
Les noms des auteurs en course pour le Lion d’Or font rêver les cinéphiles de tous les horizons : Outre Damien Chazelle, qui, deux ans après La La Land, fera de nouveau l’ouverture du festival avec First man, qui relate l’histoire de la mission spatiale Apollo XI, les heureux cinéphiles vénitiens pourront découvrir The Favourite de Yorgos Lanthimos, ROMA d’Alfonso Cuaron, The Ballad of Buster Scruggs des frères Coen, Peterloo de Mike Leigh, Sunset de Laszlo Nemes, At eternity gate de Julian Schnabel, Vox Lux de Brady Corbet, Werk ohne autor de Florian Henckel von Donnersmarck, Nuestro Tiempo de Carlos Reygadas ou 22 july de Paul Greengrass.

Le cinéma italien mettra à l’honneur Luca Guadagnino, auteur d’un remake de Suspiria,  et Mario Martone, pour sa Capri-Revolution. On peut ajouter Roberto Minervini, même si ses films récents ont plutôt été produits aux Etats-Unis. C’est encore le cas de What you gonna do when the world is on fire?, qui s’intéresse aux violences racistes dans l’Amérique contemporaine.
Doubles vies d’Olivier Assayas, Frères ennemis de David Oelhoffen et The Sisters brothers de Jacques Audiard défendront le cinéma hexagonal (même si le film d’Audiard est un film… Hollywoodien)
Pour les surprises, on guettera The Mountain de Rick Alverson, Accusada de Gonzalo Tobal ou The Nightingale de Jennifer Kent

Hors compétition, le niveau semble également assez élevé, avec les nouveaux films de Gaston Duprat (Mi obra maestra), Severio Costanzo (L’Amica geniale), Roberto Ando (Una storia senza nome), Pablo Trapero (La Quietud), Emir Kusturica (El Pepe, una vida suprema), Frederick Wiseman (Morovia, Indiana), Errol Morris (American Dharma), Valeria Bruni-Tedeschi (Les Estivants), Pierre Schoeller (Un peuple et son roi), Sergei Loznitsa (Process), Tsai Ming-Liang (Your Face), Amos Gitai (A letter to a friend in Gazza ou Zhang Yimou (Ying)
Le grand public compte sur le duo Bradley Cooper/Lady Gaga pour électriser le tapis rouge lors de la première de A star is born, en espérant que le film sera à la hauteur. Les amateurs de Cinéma avec un grand C seront sûrement plus tentés par The Other side of the wind le film inachevé d’Orson Welles, restauré et proposé hors compétition.

Les sections parallèles sont tout aussi prometteuses.
Orizzonti propose, entre autres, Sulla mia pelle d’Alessio Cremonini, qui revient sur une bavure policière ayant défrayé la chronique en Italie, Amanda de Mikhael Hers, La noche de 12 anos d’Alvaro Brechner ou The Armadillo’s prophecy d’après la bande-dessinée italienne éponyme.

Equivalentes de la Quinzaine des Réalisateurs cannoise, les Giornati degli autori inviteront notamment Rithy Panh (Les tombeaux sans nom), Joachim Lafosse (Continuer), Peter Medak (The Ghost of Peter Sellers) et proposeront le nouveau film de Claire Burger, caméra d’Or à Cannes en 2014 pour Party Girl

Comme toujours, la Semana della critica proposera de découvrir des oeuvres de jeunes auteurs singuliers, de tous horizons, à commencer par Tumbbad, un film d’horreur indien.

Un hommage sera rendu à la cinéaste Angela Ricci Lucchi, décédée en février dernier, à travers la projection du film de son compagnon, Yervant Gianikian (Il diaro di Angela).
David Cronenberg se verra remettre un Lion d’Or pour l’ensemble de sa carrière, tout comme la grande actrice Vanessa Redgrave. Zhang Yimou recevra, lui, le prix Jaeger-Lecoultre Glory to the filmmaker.

Enfin, les cinéphiles pourront picorer des petits plaisirs cinématographiques du côté des courts-métrages, notamment les Women’s tales, dont le film de Dakota Fanning, des projections spéciales “Sconfini”, et des séances Venezia Classici, qui proposent de grands films restaurés.
N’oublions pas non plus la sélection de films en réalité virtuelle, qui bénéficie d’une compétition bien à elle, sur un îlot à quelques centaines de mètres de la Sala Grande, et propose des oeuvres techniquement stupéfiantes.

Pas mal, non? En tout cas plus festif que ce que le Festival de Cannes a proposé l’an passé pour ses 70 ans…
Evidemment, il faudra que ces belles promesses sur le papier se concrétisent sur grand écran pour que la fête soit réussie. Mais on peut déjà saluer le travail des sélectionneurs, qui ont réussi à récupérer des films sur lesquels lorgnaient les autres festivals.
Et si la déception est au rendez-vous, la douceur du climat, les petits plaisirs procurés par la gastronomie italienne et les pauses Spritz, en terrasse ou sur la plage permettront aux festivaliers de se réconcilier avec la dolce vita transalpine.
Comptez sur nous pour être au rendez-vous (des projections comme du reste!) et vous faire partager nos avis sur les films présentés lors de ces deux semaines de festival.
A très vite pour nos chroniques vénitiennes 2018!

Renseignements : http://www.labiennale.org/en