Le voleur de bicyclette

Le voleur de bicycletteQuand "The Kid" devient "Il Bambino"
Une des références du néo réalisme bien entendu ; mais c’est avant tout un état des lieux de la situation sociale de l’Italie au sortir de la Seconde Guerre Mondiale. Et là le film est sans concession et reflète la dureté de la vie, le désespoir de la population et l’absence d’avenir ; la noirceur est partout. Vittorio De Sica ne trouva pas mieux, symbole du néo réalisme transalpin, de sortir dans la rue avec ses caméras et de s’entourer de comédiens amateurs castés eux-mêmes dans la rue. Ces choix artistiques permettent de donner toute sa sève à ce drame social et moral. L’histoire est pourtant hyper simple : un homme au chômage depuis deux ans trouve un emploi inespéré de colleur d’affiches mais il lui faut une bicyclette pour avoir le poste. Se saignant aux quatre veines avec sa femme, il récupère son vélo mis aux clous (Mont de piété exploité aussi par De Sica dans le sublime « Umberto D »). Mais il se le fait voler. Il arpente ensuite Rome une journée entière pour le retrouver avec son gosse collé aux basques tel un scotch. Ce duo père fils se soutenant l’un l’autre en rappelle un autre ; « The Kid » de Chaplin n’est pas très loin. Jamais misérabiliste, juste la musique est un peu tire larme. Puis le final montre tout l’absurdité de ce monde et de cette période cruelle où l’enfant devient en fait celui qui va porter la famille et son père. Le cercle familial est alors le lieu majeur de la sécurité. Et la morale finale de De Sica est dramatique et tellement toujours d’actualité : « les pauvres, pour subsister, doivent se voler entre eux ». Enfin, ce film marche car ce n’est pas la grosse production qu’elle aurait pu devenir si De Sica avait succombé aux avances de O’Selznick. Ses deux comédiens amateurs sont sublimes : le père froid au visage sec et émacié mais tellement humain dans sa volonté de pouvoir donner un avenir aux siens ; et son môme à la bouille attendrissante, un peu effacé mais tellement trop mûr pour son âge devant les difficultés de la vie. Magnifique film à montrer et décrypter aux enfants de moins de 14 ans. Je m’y colle dans quelques temps.

Sorti en 1949
Ma note: 17/20