Un drôle de paroissien

Par Platinoch @Platinoch

Un grand merci à ESC Editions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Un drôle de paroissien » de Jean-Pierre Mocky.

« Si vous continuez dans cette voie, vous vivrez bientôt de la charité publique »

Malgré une situation financière dramatique, Georges Lachesnaye refuse de se soustraire à l’oisiveté, érigée en véritable tradition familiale. A l’église, la providence attire son attention sur le tronc, ressource inespérée qu’il se met en tête d’utiliser pour subvenir à ses besoins. Robin des bois des lieux de culte, Georges, pilleur de troncs au grand cœur, se livre alors à un subtil jeu de cache-cache avec la police…

« Qu’est-ce que ça peut bien faire qu’on ne travaille pas ? Nous représentons une goutte de paresse dans un océan de labeur »

Fils d’immigrés polonais traqués pendant la guerre, Jean-Pierre Mocky développe une maturité précoce (il se marie pour la première fois à l’âge de 13 ans !) et enchaine les apparitions au cinéma dès les années 40 (« Les visiteurs du soir » de Carné, « Vive la liberté » de Musso), alors qu’il n’est encore qu’un enfant. Continuant son bonhomme de chemin, il accède au début des années 50 à des rôles plus conséquent chez Delannoy ou Cocteau avant de s’imposer comme l’un des jeunes premiers du film « Les vaincus » d’Antonioni. Mais très vite, il se montre plus intéressé par le métier de réalisateur, qu’il apprendra aux côtés des plus grands : stagiaire sur « La strada » de Fellini, il sera assistant-réalisateur de Mankiewicz sur « La comtesse aux pieds nus » puis de Visconti sur « Senso ». Avec « Les dragueurs » en 1959, Jean-Pierre Mocky entamera alors une longue (série en cours !) et prolifique (plus d’une soixantaine de films) carrière de cinéaste, marquée par un impressionnant sens de l’efficacité (tournage resserré avec des moyens souvent très limités). Cultivant un humour satirique et une veine volontiers anar’, il signe quelques succès populaires (« Un drôle de paroissien », « La bourse ou la vie », « L’ibis rouge », « Y’a-t-il un français dans la salle ? », « A mort l’arbitre », « Les saisons du plaisir »...) avant de voir son cinéma glisser dans une certaine confidentialité à partir de la fin des années 80.

« C’est une affaire entre vous et votre conscience »

Après une première série de films dans l’air du temps et relativement anodins (« Un couple », « Les dragueurs »...), Mocky entreprend de réaliser une série de comédies sociales et satiriques sur la société française des Trente glorieuses, dont le premier volet sera « Un drôle de paroissien » en 1963. Adapté du roman « Deo gratias » de Michel Servin, le film imagine ainsi une veille famille bourgeoise désargentée imaginant un ingénieux stratagème de pillage des troncs des églises parisiennes pour se refaire une santé financière. Le tout aux yeux et à la barbe d’une brigade de police composée de bras cassés. Mocky signe là une farce particulièrement savoureuse à base d’humour potache (les déguisements, la pêche aux deniers à base de caramels mous !) et de jeux de mots (« ça pince Monseigneur ! »). En creux, il se moque gentiment de cette vieille France bourgeoise et catholique dont les travers (avidité, individualisme, égoïsme, détournement de fonds...) sont à l’opposé des préceptes de l’Église. Tout juste regrettera-t-on la morale finale qui empêche le film d’être véritablement irrévérencieux, comme le seront plus tard « La grande lessive » ou « L’étalon ». « Un drôle de paroissien » n’en est pas moins une comédie populaire très drôle, portée par un formidable casting (Bourvil, Poiret, Blanche, Tissier...). Sans doute l’un des films de Mocky les plus accessibles.

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Le DVD : Le film est présenté dans un nouveau Master Haute-définition, en version originale française (2.0).

Côté bonus, le film est accompagné d’une interview de Jean-Pierre Mocky qui revient sur la genèse et le tournage du film.

Edité par ESC Editions, « Un drôle de paroissien » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 22 mai 2018.

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