![[COOKIE TIME] : #5.Thelma Et Louise, un film féministe ? [COOKIE TIME] : #5.Thelma Et Louise, un film féministe ?](https://media.paperblog.fr/i/869/8699828/cookie-time-5thelma-louise-film-feministe-L-uysVtn.jpeg)
C'est le Cookie Time. Un moment de détente pour parler cinéma. Alors installez vous dans votre canapé, prenez un thé et un cookie. Et c'est parti !
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J'ai longtemps considéré les personnages de Thelma et Louise comme étant en contrôle de leur destin. Pourtant quand on y regarde de plus près, il n'en ai rien. Elles subissent tout ce qui leur arrive. On peut aller même encore plus loin, quand elles décident de s'amuser, le retour du bâton revient violemment. Le personnage de Thelma révèle une dimension punitive du plaisir de la femme : elle veut s'amuser et danser ? Cela se solde par une tentative de viol. Elle veut se laisser aller avec beau jeune auto-stoppeur ? Elle se fait voler son argent. Alors évidemment, Thelma n'est pas fautive de ce qui lui arrive, mais le film n'appuie jamais là-dessus. On peut voir aussi le final comme élément punitif : tout ce processus d'émancipation pour au final se solder par la mort des personnages. Leur action reste passive même si elles agissent, car elles ne font que réagir à ce qui les entourent. Rien que l'idée de partir en weekend est poussé par l'agissement des hommes. Louise se languit de son ex, Thelma veut prendre de la distance par rapport à son mari toxique. La sensation de violence des personnages vient principalement du fait que Thelma et Louiseont le statut de hors la loi. Les hommes du film détiennent le pouvoir, ils sont en quelque sorte la loi. L'inspecteur et les policiers (tous des hommes), Darryl qui est le mari... Et c'est à cause d'un homme, Harlan que les deux femmes outrepassent cette loi. Cette transgression est la base même du problème de vengeance. Les rôles évoluent vers une masculinisation de Thelma et Louise. L'émancipation du patriarcat passe par des schémas masculin : transgresser les genres et devenir l'homme (style cow boy, boissons, etc...). Au lieu de condamner les comportements très stéréotypés des hommes, elles se l'approprient. Pourtant, on pourrait penser que le film dénonce les comportement masculin. Mais le fait que les personnages féminins basculent vers ce même genre de comportement donne l'impression de renforcer les clichés du patriarcat. Leur statut de hors la loi pose un énorme problème pour la fin : s'émanciper violemment de la domination masculine dans notre société mène à la mort. Elles sont en quelques sorte punies pour leur comportement, malgré tout ce qui a de beau dans ce final.
D'après les écrits de Teresa de Laurentis, Thelma et Louise appartient au women's film. Le film a un aspect libérateur. Même si les deux femmes sont hors la loi, le spectateur est de leur côté tout le long. On peut facilement s'identifier car elles sont entourées par le sexisme et que certaines scènes sont malheureusement très réalistes. L'histoire se focalise sur elles et le point de vue est féminin. Par contre, quand on analyse certaines scènes, on peut vite s'apercevoir que la mise en scène ne suit pas forcément ce point de vue narratif et adopte un regard très masculin sur ce qui se passe (en même temps, ceci est cohérent car réalisé par un homme). La première scène qui vient à l'esprit est celle du viol. Des gros plans des seins et des femmes pendant cette scène s'apparentent presque à du mâle gaze, ce qui rend la scène encore plus malsaine et désagréable à regarder. Nous avons encore ce problème de point du vue à la fin, quand Thelma et Louise vont se jeter dans le vide, on voit les personnages de loin, du point de vue d'un policier qui les vise. Ce changement de point du vue est ambiguë et à tendance à légitimer leur mort : on voit un policier sur le point de tirer sur des hors la loi et qui donc cautionne le geste. La caméra (et donc le point de vue) est à l'opposé des deux femmes. Mon avis sur des micro changement qui ont quand même leur importance vient du fait qu'on ne peut décemment pas être du côté de personne qui tue (même si c'est de la légitime défense). Les spectatrices peuvent s'identifier à des femmes badass, mais restent des bandits dont on ne peut cautionner le geste. Le film véhicule l'idée qu'une femme à la force de s'émanciper et de se battre après avoir vécu un traumatisme. Ce n'était pas le premier film à faire cela, ni le dernier. Longtemps, les héroïnes ont du vivre l'enfer pour trouver une certaine force. Cet arc narratif commence enfin à bouger à notre époque et il était temps. J'ai toujours trouvé intéressant de revenir sur un film plus ancien et d'analyser sa portée sur notre société actuelle. Pointer du doigt des problématiques ne veut pas forcément dire renier le statut de « bon film ». Thelma et Louise reste un excellent film (et en haut de la liste dans mon cœur). Mais il ne faut pas sacraliser les vieux films. Ils ne sont pas intouchables. Cela devient même intéressant d'y revenir, de critiquer pour voir l'évolution avec le cinéma de maintenant. Thelma et Louise a fait sensation à son époque (pour de bonnes et mauvaises raisons). Considéré comme un film féministe en 1991, en 2018 il n'aurait plus ce statut pour toutes les raisons citées au-dessus. C'est un film important, car il a ouvert des portes et démontrer qu'un film « d'action » (ce n'est pas à proprement parler un film d'action mais vous voyez l'idée) peut fonctionner avec des femmes au premier plan. Pourtant l'écriture et la mise en scène n'en font pas un film féministe car il reste ambiguë pour avoir un plus large public. Cette ambiguïté ne laisse plus de place pour réellement remettre en question le patriarcat. Thelma et Louise reste un film très important pour la suite du cinéma américain et j'invite quiconque à le visionner/revisionner (j'arrive chez vous avec mon blu-ray). Laura Enjolvy