Dramatica : la théorie expliquée (71)

Nous allons aborder dans cet article un concept très important de la théorie narrative Dramatica : les Thematic Points. Je me suis autorisé par le biais de la traduction qui consiste surtout à traduire la pensée derrière le langage plutôt qu’à donner littéralement des mots qui ne sont pas porteurs de sens, en Contenant Thématique.

Vous avez compris si vous avez suivi cette série d’articles sur Dramatica que la théorie distingue 4 lignes dramatiques :

  1. Overall Story Throughline (un point de vue objectif sur l’histoire)
  2. La ligne dramatique du personnage principal
  3. La ligne dramatique de l’Influence Character
  4. La ligne dramatique entre le personnage principal et l’Influence Character que Dramatica dénomme aussi comme ligne dramatique subjective (Subjective Story Throughline).

Maintenant chaque ligne dramatique est constituée d’une succession de moments, d’événements, de situations. Pour que le thème puisse être véhiculé, il lui faut un support.
C’est-à-dire qu’il y aura des moments, des événements, des situations qui supporteront le thème.

Mais ce ne seront pas n’importe quels moments, situations ou événements. Dans chaque ligne dramatique, Dramatica a identifié des moments, des événements et des situations spécifiques et singulières dans lequel viendra s’insérer votre matériel narratif porteur du thème.
Ce sont ces moments, situations et événements particuliers que je nomme Contenants thématiques.

LES CONTENANTS THEMATIQUES
Overall Story Throughline

Une histoire raconte quelque chose. Cette ligne dramatique de l’Overall Story donne un point de vue d’ensemble sur ce qui se passe. C’est un point de vue objectif.
Les autres lignes dramatiques sont aussi des points de vue singulier sur l’histoire. Pour le personnage principal, par exemple, c’est comme si nous voyions l’histoire à travers ses yeux, à travers ce qu’il lui arrive. Dramatica aime comparer l’Overall Story Throughline au regard d’un général qui observe le champ de bataille du haut de sa colline.

Alors que le point de vue du personnage principal serait celui du soldat en plein cœur de la tempête. En pratique, c’est comme si vous aviez quatre angles de prises de vue sur le même événement qui se déploie dans la durée.

L’Overall Story Throughline est une vue d’ensemble. Elle examine les problèmes qui concernent tous les personnages. En effet, un personnage pourrait connaître quelques affres qui lui seraient personnels sans que cela affecte d’autres personnages.
Avec cette ligne dramatique, on observe les flux et reflux des forces en présence. Que ces forces soient manifestées par le protagoniste, l’antagoniste et n’importe quel autre personnage.

L’Overall Story Throughline n’est pas concerné par l’individu. Cette ligne dramatique ne les reconnaît qu’à travers leurs fonctions. C’est-à-dire en tant qu’archétypes (protagoniste, antagoniste, Gardien…).
Cette ligne dramatique est nécessaire pour que le lecteur ait une vue d’ensemble de l’histoire car sans cette vue de ce qui se passe globalement, il aura des difficultés à comprendre cette histoire.

L’Overall Story Throughline démontre au lecteur comment tous les personnages et toutes les forces dramatiques en œuvre s’intègrent dans le projet pour former un tout. Et ce tout ne peut être saisi que par les fonctions (les archétypes tels que les voit Dramatica : protagoniste, antagoniste…).
Pour le lecteur, ce regard extérieur sur les interactions entre les personnages et entre ceux-ci et les événements lui permet de situer l’histoire dans un cadre, un contexte, une fondation sur laquelle l’histoire va se construire et puis un arrière-plan contre lequel elle va se dérouler.

Les contenants dramatiques de l’Overall Story Throughline
Benchmark

Ce contenant thématique est la mesure qui permet de connaître la progression de l’histoire. Il n’indique pas quand elle finira. Mais sachant ce qu’il s’est passé  jusqu’à présent, le lecteur et les personnages peuvent juger de la distance qu’il reste à parcourir pour atteindre l’objectif (Story Goal dans la terminologie de Dramatica).

Benchmark et donc le matériel narratif qu’il contient indique une évolution, un progrès mais aussi un degré (dans l’escalade de la tension par exemple) et aussi une préoccupation qui devient plus intense. Considérez le Benchmark comme une jauge qui permet au lecteur (et aux personnages) de juger de l’évolution de l’histoire.

Le contenu narratif qui servira au Benchmark est un élément dramatique qui permet de mesurer la progression de l’histoire.
Par exemple, nous avons des personnages objectifs (c’est-à-dire qu’on les suit selon leurs fonctions dans l’histoire puisque nous sommes dans la ligne dramatique de l’Objective Story).
Au cours de l’intrigue, ces personnages passent beaucoup de temps à rechercher des informations (ils répondent ainsi au type Learning de la classe Physics). 

On pourrait croire que leur objectif (ou Story Goal) est d’apprendre un maximum d’informations pour résoudre une énigme. C’est une erreur parce que le Story Goal est d’obtenir les informations  (le Story Goal est du type Obtaining de la classe Physics).
Par contre, l’accumulation d’informations qui doit permettre de résoudre l’énigme est le Benchmark qui mesure l’avancée vers la réussite de l’objectif ou plus globalement la résolution du problème.

Dans cet exemple, c’est le type (juste en dessous de la classe) qui correspond au Benchmark. Vous trouverez dans cet article les explications de types :
DRAMATICA : LA THÉORIE EXPLIQUÉE (31)

Un exemple que donne Dramatica est 12 hommes en colère où le Benchmark est de type Preconscious.

Catalyst

Pour rappel, Dramatica ne mentionne pas particulièrement d’incident déclencheur dans la théorie. Comme le terme Catalyst a souvent été employé comme incident déclencheur, il est préférable de ne pas confondre les significations.

Pour Dramatica, Catalyst est cependant un élément dramatique qui fait avancer l’histoire. Le Catalyst en tant que contenant thématique spécifique à l’Overall Story Throughline est ce matériel narratif qui agit comme une percée et qui semble accélérer le développement de l’histoire.

Il arrive au cours de celle-ci des moments de blocage où les choses semblent approcher de l’inertie comme si soudain l’histoire se paralysait. Et c’est spécifiquement à ces moments précis que Catalyst s’avère nécessaire. Parce que son introduction va en quelque sorte débloquer la situation, résoudre en fait ce qui la bloquait ou tout simplement contourner l’obstacle d’un revers de main afin que l’histoire puisse continuer.

Par exemple, dans Hamlet, à chaque fois que Hamlet découvre plus de preuves des méfaits de son oncle (Catalyst), il fait un pas de plus dans sa décision de le tuer.
En retour, dès que Claudius peut prouver la folie de Hamlet, c’est une raison de plus pour l’écarter. Et ainsi de suite.

Dans cet exemple, Catalyst (contenant thématique) ressort à la variation de type Evidence du type Memory de la classe Mind.
Concernant Evidence, je vous renvoie à cet article :
DRAMATICA : LA THÉORIE EXPLIQUÉE (37)

Nous continuerons l’étude des contenants thématiques dans le prochain article.