Cote 465 (1957) de Anthony Mann

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Après une période Film Noir dans les années 40 comme "La Cible Vivante" (1945) suivi d'une période western, dont "Winchester 73" (1950) voici donc que le réalisateur-producteur Anthony Mann signe là son premier film de guerre. Adapté du roman "Day Without End" (1949) de Van Van Praag le scénario a été confié au duo Philip Yordan ("Johnny Guitar" en 1954 de Nicholas Ray et "La Chevauchée des Bannis" en 1959 de André De Tothdans lequel jouait déjà Robert Ryan) et Ben Maddow ("Quand la Ville dort" en 1950 de John Huston et "L'Equipée Sauvage" en 1953 de Laslo Benedek) pour un résultat souvent salué puisque ce film est entré à la postérité bien qu'il soit rester un peu à l'ombre de titres majeurs du genre sortis à la même période comme "Le Pont de la Rivière Kwaï" (1957) de David Lean et "Les Sentiers de la Gloire" (1957) de Stanley Kubrick. Notons tout de même que pour une fois pas de 14-18 ou de 39-45 puisqu'une fois n'est pas coutume ce film de guerre s'intéresse à la guerre de Corée (1950-1953).

A sa sortie en salle l'histoire du film a trouvé des mauvais échos dans l'armée des Etats-Unis qui trouvait le film offensant pour les officiers. Où comment 17 soldats sous les ordres d'un lieutenant réquisitionne une jeep dans laquelle un soldat aguerri et teigneux transporte son colonel en état de choc. Ce dernier est joué par l'expérimenté Robert Keith, dans une rôle quasi muet, qui a déjà connu la guerre de Corée avec le film "Le Cirque Infernal" (1953) de Richard Brooks. Les deux personnages principaux sont joués par Aldo Ray, star depuis peu, et surtout l'excellent Robert Ryan qui retrouve Anthony Mann après "L'Appât" (1953). Dans un second rôle on reconnait Vic Morrow qui venit d'apparaitre dans ses premiers films, "Graine de Violence" (1955) de Richard Brooks et "La Loi du Prairie" (1956) de Robert Wise, puis futur papa de l'actrice Jennifer Jason Leigh... Dans une économie total Mann signe un film de guerre dans un décor minimaliste et avec un casting limité. On est plongé dans un groupe restreint, coincé au pied d'une colline infestée de coréens qu'on ne voit pratiquement jamais. Le Noir et Blanc accentue le côté sec et aride de l'endroit comme le réalisme du film, dans un style âpre et direct qui inspirera des films comme "L'Enfer est pour les Héros" (1962) de Don Siegel et "La 317ème section" (1964) de Pierre Schoendoerffer.

On ne comprend pas très bien l'"offense" du film pour l'armée puisque il n'y ait jamais question le lâcheté et/ou des décisions ouvertement stupides. Bien au contraire, les soldats sont confrontés à la peur, à l'angoisse, à la soif, et même à la solitude à différents degrés. Si le film repose sur le face à face du soldat Aldo Ray et de l'officier Robert Ryan on évite l'écueil habituel de l'officier narcissique, abusant de son autorité contre un soldat héroïque et vertueux. Par contre on a du mal à croire au personnage joué par Aldo Ray, un soldat si dévoué à son colonel ça en est presque ridicule. La fin est un peu décevante, à la fois trop symbolique (ce qui est antinomique vu le réalisme recherché) et un peu trop unilatéral (un massacre qui "choisit" ses cibles). En tous cas un film qui doit beaucoup à ses acteurs dont le toujours impeccable Robert Ryan. L'expérience du film aura été assez enrichissante pour que Anthony Mann retrouve la même équipe (ses acteurs principaux et ses scénaristes) pour le film "Le petit Arpent du Bon Dieu" (1958), tandis qu'il ne signera qu'un second film de guerre, "Les Héros de Télémark" (1965), moins pointu dans la forme mais plus en mode divertissement hollywoodien.

Note :