Les Proies, critique

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Après 4 ans d’absence, Sofia Coppola est de retour avec un beau casting et un prix cannois de la mise en scène. Les Proies est une relecture évidemment féminine, délicate et piquante, fidèle à l’esprit de sa réalisatrice.

Les Proies, critiqueAprès 3 œuvres passionnantes (surtout Virgin Suicides et Lost in Translation) sur l’adolescence, la féminité et la solitude, on avait complètement perdu Sofia Coppola dans l’ennui le plus total avec Somwhere et the Bling Ring ! 4 ans de pause lui aurons surement permis de bien mûrir son nouveau projet. Et pourtant celui-ci n’est pas une oeuvre originale puisqu’il s’agit d’une nouvelle adaptation du livre de Thomas P. Cullinan, Les Proies, déjà porté à l’écran par Don Siegel avec Clint Eastwood.

Evidemment, si la première adaptation était à l’avantage de l’acteur culte et adoptait le point de vue masculin, la vision de Sofia Coppola est diamétralement opposée. En effet, dans cette histoire se déroulant durant la guerre de sécession un soldat blessé est recueilli dans un pensionnat de jeunes filles. Une arrivée qui va complètement chambouler la vie de ces quelques femmes et adolescentes, seules depuis bien trop longtemps et ravies de pouvoir établir un contact avec le monde extérieur.

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Dès les premières scènes dans un bois brumé, Sofia Coppola pose une ambiance feutrée et magnifie l’isolation de ses héroïnes. Une ambiance qui ne va faire que s’accentuer une fois dans la grande demeure coloniale où vit la petite communauté. Ici tout y est abordé avec délicatesse, vu à travers un drap de dentelle pour ne pas révéler tout de suite les frustrations des membres de la petite communauté.  L’arrivée du soldat va commencer à faire pousser des épines sur les roses blanches que sont ces (jeunes) femmes qui vont s’éveiller au désir de manière innocente ou plus tordue. En ce sens, Sofia Coppola mérite bien le prix de la mise en scène reçu à Cannes tant elle arrive à nous faire comprendre par son cadre et son découpage les envies des protagonistes sans pour autant en dire trop.

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Et d’un autre côté, elle a enfin une véritable histoire à raconter. Et si l’on sera un peu déçu parce qu’elle ne va pas forcément au bout, on sera par contre étonné du second degré dont les comédiennes font parfois preuve, donnant alors une lecture moins dramatique du film et plus sarcastique sur les sentiments et pulsions de ces femmes vis à vis de leur hôte masculin qui était au départ doté de bonnes intentions. Nicole Kidman, Kirsten Dunst et Elle Fanning jouent donc parfois de manière froide et détachée des personnages dont le sang commence à bouillir intérieurement, gardant tout pour elles avec une maîtrise jusqu’au boutiste là où Colin Farrell se révèle du coup légèrement fade.

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Pourtant, le film est parfois nourri de quelques incohérences à la fois dans le récit mais aussi chez ses personnages qui auraient mérité d’être plus fouillés. Mais pourtant, avec la délicatesse de sa mise en scène qui fait surgir des moments beaucoup plus noirs de manière étrange, Sofia Coppola arrive à nous emporter dans les brumes de cette école presque hantée où l’homme n’est finalement pas le bienvenu. Avec ce nouveau film, la réalisatrice montre en tout cas qu’elle est de retour et on espère que son prochain sera à la hauteur de ses premiers films.