Moby Dick

Un grand merci à Rimini Editions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Moby Dick » de John Huston.

Moby_dick« J’ai embarqué pour chasse la baleine, pas pour assouvir la vengeance du capitaine »

1814. Le jeune Ismaël embarque à bord du baleinier le Péquod. Le navire est sous la responsabilité du capitaine Achab, un homme étrange et sombre, obsédé par une idée fixe : retrouver Moby Dick, la baleine blanche qui l’a mutilé et défiguré quelques années plus tôt. L’équipage réalise peu à peu qu’Achab a basculé dans la folie et se montre prêt à prendre tous les risques pour parvenir à ses fins.

« Un capitaine n’est jamais contre la loi : il est la loi »

Moby_Dick_PeckFils du célèbre comédien Walter Huston et d’une journaliste, John Huston nait dans un milieu bercé par les arts, le cinéma et la littérature. Pourtant, c’est sur le ring qu’il débute comme boxeur au milieu des années 20. Mais rattrapé par son goût pour les lettres, il est embauché comme scénariste/dialoguiste à la MGM dès le début des années 30. Il travaille ainsi sur de nombreux films, comme « Le double assassinat de la rue Morgue », « L’insoumise » ou encore « Le mystérieux Docteur Clitterhouse ». Mais c’est surtout grâce au scénario de « Sergent York » en 1941 qu’il obtient la reconnaissance de ses pairs et qu’il accède finalement à la réalisation. S’en suivra une prolifique et éclectique carrière (près de cinquante films en quarante-cinq ans) ponctuée de films entrés depuis dans la légende du Septième art (« Le faucon maltais », « Le trésor de la Sierra Madre », « Key largo », « Quand la ville dort », « Les désaxés », « Dieu seul le sait »…). Mais plus encore, Huston restera célèbre pour avoir adapté – le plus souvent avec succès – des œuvres littéraires complexes à l’écran. On lui doit ainsi notamment les adaptations des « Racines du ciel » d’après Romain Gary, « La nuit de l’iguane » d’après Tennessee Williams, « L’homme qui voulut être roi » d’après Rudyard Kipling ou encore « Gens de Dublin » d’après James Joyce. En 1956, il s’attaque à un monument de la littérature américaine en adaptant le roman d’Herman Melville « Moby Dick » dont il cosigne le scénario avec l’écrivain Ray Bradbury.

« La folie d’un homme mène les autres hommes à la folie »

Moby_Dick_BasehartPlus encore qu’un grand succès de librairie, « Moby Dick » est avant tout le grand roman américain par excellence. Une œuvre dense et éminemment complexe, qui brasse les grands thèmes et les grands mythes fondateurs de l’Amérique : la conquête, le devoir, l’esprit de sacrifice et une certaine idée de l’ordre social. Un récit d’aventures épique et magistral qui nous conte l’épopée d’un baleinier et l’obsession de son capitaine pour la baleine blanche qui lui a pris sa jambe. Une traque aux allures de quête mystique, doublée d’une fable philosophique à la dimension religieuse très prégnante (l’homme qui défie la nature et les éléments et donc le divin, dualité du Bien et du Mal). A l’évidence, John Huston réussit ici avec beaucoup de talent l’exploit d’adapter un roman pourtant réputé inadaptable tout en restant fidèle au texte et à l’esprit du livre, dont il parvient à retranscrire subtilement les questionnements métaphysiques. Au plus près des marins, il filme également la rudesse du quotidien à bord du Péquod, les doutes qui envahissent les hommes d’équipage et le basculement progressif du capitaine dans la folie. Seul petit bémol, en privilégiant par moment le côté allégorique du film au détriment de son côté épique, le récit parait parfois un peu statique, en dépit de quelques belles scènes de chasse à la baleine et d’un final dantesque et impressionnant. Formellement, le film se révèle très réussi et d’une grande beauté visuelle, qui rappelle par moment les peintures américaine du 19ème siècle (notamment la scène mémorable du sermon interprétée par Orson Welles). Quant au casting, il est dominé par un Gregory Peck impérial dans un rôle totalement à contre-emploi, bien entouré il est vrai par des seconds rôles prestigieux (Richard Basehart, Leo Glenn, Royal Dano...). Au final, Huston signe là une adaptation très réussie du roman de Merville, doublée d’une belle fresque à l’esthétique très soignée. Tout juste regrettera-t-on que le film manque d’un soupçon de rythme pour nous harponner totalement.

Moby_Dick_Huston

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Le blu-ray : Le film est présenté dans une nouvelle édition remasterisée en Haute Définition. Il est proposé en version originale américaine (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres optionnels français sont également proposés.

Côté bonus, le film est accompagné d’une interview de Pierre Berthomieu, Maître de Conférences en Etudes Cinématographiques à l’Université Paris Diderot ainsi que d’une interview de Philippe Ramos, auteur de « Capitaine Achab » (court métrage sorti en 2003, puis long métrage sorti en 2007). Enfin, un livret de 12 pages accompagne cette belle édition.

Edité par Rimini Editions, « Moby Dick » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 23 mai 2017.

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