Boudu sauvé des eaux

Par Dukefleed
1932: Boudu un homme déjà en marge de la société de consommation
Boudu est un clochard insoumis, insolent et épris d’une liberté sans borne recueilli par des bourgeois au bon cœur qui font beaucoup d’effort pour le sortir de sa misère… Mais Boudu n’est pas un anarchiste qui souhaite faire s’écrouler l’édifice de cette famille bourgeoise, il n’a tout simplement pas la même vision de la société que le commun des mortels, il vit en dehors mais s’y sent bien. Pas envieux pour un sou, ses rapines, c’est juste pour survivre ; ses actes ne sont pas guidés par des idéaux politiques, juste par son bon plaisir. Cet être indomptable et imprévisible qui par sa volonté de ne pas se fondre dans le système prend des allures d’anar’ ; et c’est bien çà qui dérangea le public et les critiques de l’époque. Comment un homme auquel on donne toutes les clés pour se sortir de la précarité ne s’en saisi pas ? Pire fait un pied de nez à la société… Un comportement absurde pour l’époque, mais un personnage qui aujourd’hui est toujours aussi moderne dans une société qui elle semble de plus en plus absurde. Renoir débute ici sa peinture peu élogieuse de la bourgeoisie et donne déjà un sens social à son cinéma. Pas manichéen, Renoir ne dépeint pas ces bourgeois comme des gens malhonnêtes, malveillants… par contre guidés par la morale chrétienne et leur mission : remettre sur les rails la brebis égarée. Mais la brebis est retorse. Boudu est un vrai libertaire lui, il refuse de suivre la masse, le modèle en vigueur. Beau pied de nez de Renoir à une société du début de l’ère industrielle qui fût déboussoler par la posture de Boudu… mais ce modèle consumériste a vécu depuis 85 ans, Boudu parait d’autant plus pertinent et courageux aujourd’hui qu’au siècle dernier. Un Renoir est toujours immanquable et puis Boudu révéla au grand public l’opulence de Michel Simon. Qui pourrait aujourd’hui après près d’un siècle reprendre ce rôle ? Boudu est Michel Simon : sa tenue générale, ses expressions faciales, son articulation,  son timbre de voix, sa démarche titubante, son allure débraillée… Inspiré de Chaplin, sa composition tua toute reprise éventuelle. Simon-Renoir au début d’une carrière cinématographique prometteuse, et c’est un atout supplémentaire du film.Sorti en 1932Ma note: 16/20