Critique : Le Jour d’après de Hong Sang-soo

Par Cinephiliacr

Areum s'apprête à vivre son premier jour de travail dans une petite maison d'édition. Bongwan, son patron, a eu une relation amoureuse avec la femme qu'Areum remplace. Leur liaison vient de se terminer. Ce jour-là, comme tous les jours, Bongwan quitte le domicile conjugal bien avant l'aube pour partir au travail. Il n'arrête pas de penser à la femme qui est partie. Ce même jour, la femme de Bongwan trouve une lettre d'amour. Elle arrive au bureau sans prévenir et prend Areum pour la femme qui est partie...

Hong Sangsoo tourne comme il respire. Il a un régime de deux à trois films par an, ce qui est plutôt intense. C'est pourquoi il présentait à Cannes deux films : La caméra de Claire hors compétition et Le Jour d'après en compétition. C'est à ce dernier, celui des deux qui correspond le plus à ce qu'on connaît d'Hong Sangsoo, que nous nous intéressons.

La base du cinéma d'Hong Sangsoo, ce sont des personnages qui vivent des situations relativement banales. Ce à quoi s'intéresse particulièrement le cinéaste coréen, ce sont les relations qui lient chacun d'entre eux. Un des passages obligés, c'est la table et les verres d'alcool qui la jonchent. Quand on parle du cinéma d'Hong Sangsoo, on dit souvent, comme cliché, qu'il s'agit de personnages à table qui boivent du saké. Le Jour d'après n'y fait pas exception. C'est un lieu qui obsède presque le réalisateur car c'est là que les gens se livrent. Ils se confient. Et l'alcool aide à désinhiber.

L'alcool est également un outil que le metteur en scène utilise pour créer d'autres tensions voire retournement de situation. C'est pour cela que c'est une pièce maîtresse de son art. Dans Le Jour d'après, des situations se règlent mais des problèmes se créent aussi à cause de cela. Attention, il ne faudrait pas résumer le cinéma d'Hong Sangsoo à cela, c'est bien plus riche mais, tout cela a un objectif précis et une place importante. Ces scènes à table jalonnent son cinéma depuis longtemps. C'est principalement dans ces moments qu'il impose sa patte de mise en scène. Elle consiste en une caméra sur pied qui fixe les personnages, assis. Sangsoo lui donne du mouvement en passant d'un personnage à l'autre en fonction des dialogues. C'est une jolie chorégraphie qui se joue devant les yeux des spectateurs.

Dans Le Jour d'après, Hong Sangsoo s'intéresse, comme souvent, à des histoires de couples. Ici, il s'agit d'un patron qui a une amante, chose que sa femme découvre. Mais celle qui va tout se prendre dans la figure, c'est la nouvelle employée, complètement innocente dans l'histoire. Mais quand l'amante va faire son retour, les choses vont naturellement se compliquer. Une fois encore, ce qui fait que le film est étonnamment prenant, c'est le talent de dialoguiste et de metteur en scène d'Hong Sangsoo. Le schéma narratif qu'il utilise, il l'a déjà usé jusqu'à la corde. Plus grand chose n'est surprenant dans ce qu'il propose. Il n'en reste pas moins que Le Jour d'après parvient à se démarquer quelque peu par rapport aux précédents films d'Hong Sangsoo. Il est bien plus drôle que les autres, chose plutôt rare dernièrement dans les œuvres du coréen.

Une fois encore, Hong Sangsoo a fait appel à Kim Saeybuk, qui avait déjà un tout petit rôle dans Yourself and yours que nous avions découvert au Black Movie Festival à Genève en janvier dernier. Mais le rôle principal revient évidemment à son épouse, Kim Min-hee, déjà vue dans Un jour avec, un jour sans, Yourself and yours, La caméra de Claire et, Mademoiselle de Park Chan-wook. C'est un casting de grande qualité qui convient parfaitement à l'univers d'Hong Sangsoo.

Le Jour d'après n'est honnêtement pas le meilleur film du metteur en scène coréen. On pourrait presque parler de best of. Cependant, l'humour, la mise en scène et les dialogues font mouche. La preuve qu'Hong Sangsoo reste un grand cinéaste.

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