La Ciociara (1960) de Vittorio De Sica

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Grand film signé de Vittorio de Sica, acteur-réalisateur majeur du cinéma italien d'après-guerre auquel on doit notamment "Le Voleur de Bicyclette" (1948), "Umberto D." (1951) et "Hier, aujourd'hui et demain" (1963)... Ce film dans lequel De Sica ne joue pas, est produit pas Carlo Ponti, nabab du cinéma italien et conjoint adultérin de la star Sophia Loren (Ponti déjà marié en Italie où le divorce est illégal, épouse la star au Mexique malgré tout) ; rappelons aussi que De Sica et Sophia Loren tourneront pas moins de 16 films ensemble (devant et/ou derrière la caméra) entre 1953 et 1974. Comme partenaire on reconnait les deux acteurs italiens connus Raf Vallone (vu dans "Riz Amer" en 1949 de Giuseppe De Santis) et Renato Salvatori (en plein succès avec "Rocco et ses frères" en 1960 de Luchino Visconti), tous deux dans deux seconds rôles qui tiennent plus du caméo tandis que le rôle masculin principal ets tenu par la nouvelle coqueluche de la Nouvelle Vague, Jean-Paul Belmondo qui vient d'exploser dans "A bout de souffle" (1960) de Jean-Luc Godard. Pour l'anecdote il est amusant de noter que Belmondo reprendra le rôle principal "Umberto D." dans le remake peu inspiré "Un homme et son chien" (2009) de Francis Huster.

Pour ce film-ci par contre il faut avouer que faire passer Bebel pour un italien pur souche est un peu difficile. Le film, aussi connu en VF sous le titre "La Paysanne aux pieds nus", est l'adaptation du roman éponyme (1957) de Alberto Moravia et se doit d'être défendu et replacé dans un contexte bien précis. En effet on peut lire trop souvent que ce film serait raciste ou du moins doté d'un message plus ou moins détestable. rappelons que le film (et donc le roman) s'inspire de faits malheureusement réels connus en Italie sous le terme "Maroquinades" (tout savoir ICI !) où comment des corps expéditionnaires français composés de soldats marocains, tunisiens, algériens et sénégalais se sont rendus coupables de crimes de guerre (pillages et divers et surtout de viols sur plusieurs centaines d'italiens, hommes femmes et enfants) surtout localisés autour du Monte Cassino dans la région du Ciociarie (d'où le titre du film !). ... Dont acte !...

Comme à son habitude Vittorio de Sica place son récit dans un contexte sociale difficile et se focalise sur les citoyens d'en-bas, et si la guerre est omniprésente ce qui l'intéresse reste le quotidien du citoyen lambda, celui qui vit les conséquences de la guerre sans qu'il ait pu dire son mot. Le cinéaste s'oublie parfois un peu trop dans le décolleté de sa star mais ça n'est jamais outrancier et la sensualité de Sophia Loren n'a rien d'un péché ! Le noir et blanc semble un peu fade parfois mais le grain offre un côté "usé" qui colle plutôt bien à la dramaturgie du film. On suit donc une mère et sa fille adolescente qui traverse le pays, de Rome à leur campagne en aller-retour alors que nous sommes en 1943 et que l'Italie passe en quelques semaines du fascisme à la libération avec tous les dangers que l'anarchie peut offrir en pareil cas de transition. Sophia Loren remporte l'Oscar de la meilleure actrice (1ère fois pour une actrice ne s'exprimant pas en anglais !) et le Prix d'interprétation féminine au festival de Cannes 1961. Un rôle important pour l'actrice qui le reprend (chose rare) dans le téléfilm éponyme (1988) de Dino Risi.

Note :