Le heros et son monde

La première étape dans la construction du monde de votre héros est d’élaborer sur les oppositions visuelles qu’offrent les personnages et leurs valeurs.

La seconde étape consiste à définir le point d’arrivée de l’arc dramatique du héros.
Selon John Truby, la construction d’un héros devrait commencer par la révélation, c’est-à-dire l’ultime développement de sa transfiguration au cours de l’histoire.
Ensuite, on remonte étape par étape à la faiblesse, au besoin et au désir qui caractérise le héros au début de l’histoire.

C’est ainsi que le parcours d’un personnage est échelonné par des leçons qu’il apprend au cours de ses pérégrinations. Et en tant qu’auteur, il est préférable de connaître la fin du voyage avant de le parsemer des dites leçons.
Le monde de l’histoire se construit essentiellement sur les relations qui unissent les personnages entre eux.
La théorie narrative Dramatica distingue les relations structurelles, situationnelles et émotionnelles. Ce sont ces relations qui dessinent le monde de l’histoire.

Mais cet univers lui aussi connaît un changement dans sa formulation. En effet, il apparaît sous une certaine représentation au début de l’histoire et sous une autre à la fin de celle-ci.

De l’esclavage à la liberté

Nous allons reprendre l’allégorie de John Truby.

Au début de son aventure, le héros est prisonnier de ses passions. Il en est plus précisément l’esclave. Il est en quelque sorte dans l’erreur. Ses jugements sont faussés.

A la fin de l’histoire, il s’est délivré de ses passions. Il a recouvré sa liberté, son libre arbitre.
Pour Truby, le monde de l’histoire doit rendre compte de ce mouvement. Il doit lui aussi être passé d’un état d’esclavage à celui de liberté.

Les passions

Etre esclave de ses passions signifie pour le héros qu’il est contraint par ses faiblesses psychologiques et morales.
Pour Truby, le monde dans lequel il évolue est donc déséquilibré. Comme Charlot dans Les Temps Modernes qui lutte pour survivre dans le monde industrialisé.
Truby l’assimile à une dystopie.

A la fin de l’histoire, le monde a changé. Il est devenu libre. L’ordre de cet univers tel que vous l’avez défini (vous êtes l’auteur, ne l’oubliez pas) traduit une communauté.
L’individu n’est plus isolé, il fait partie d’une communauté. Elle peut d’ailleurs être autant matérielle que spirituelle. Pour John Truby, le monde est devenu une utopie.

Un point de rencontre entre le monde et le héros

La création d’un monde fictionnel a pour but de le connecter au héros. Le héros enchaîné vit dans un monde ordinaire (au début de l’histoire) qui s’apparente à un monde de contraintes où son libre arbitre ne peut s’exprimer.
Ce n’est pas le monde qui est la cause de cette coercition (même si c’est le thème de votre fiction). C’est bien le personnage lui-même qui est lié par ses faiblesses. Et c’est ce qui l’empêche d’évoluer.

Et en devenant libre, en se débarrassant de ses chaînes, en surmontant ses faiblesses donc, il crée souvent un nouveau monde imprégné de cette nouvelle liberté.

La structure de l’histoire

Pour John Truby, l’univers fictif est une expression physique (concrète visuellement) de qui est votre héros et comment il se développe au cours de l’histoire.

Et vous définissez votre personnage principal à travers la structure de l’histoire. Cette structure qui identifie les besoins du héros, ses valeurs, ses désirs bons ou mauvais et les obstacles auxquels il devra faire face.

La question que l’auteur doit se poser est comment le monde qu’il va inventer peut être l’expression de la faiblesse de son héros. Comment cet univers fictif va-t-il pouvoir incarner, illuminer ou accentuer la faiblesse de son personnage.

Vertigo

Sueurs Froides de  Alec Coppel et Samuel Taylor, d’après le roman D’entre les morts de Pierre Boileau et Thomas Narcejac met en avant la faiblesse psychologique du héros Scottie dès la séquence d’ouverture.

A la poursuite d’un criminel sur les toits de San Francisco, Scottie glisse et se retrouve suspendu dans le vide.
Le vertige s’empare de lui. Un collègue tente de lui porter secours mais se tue au cours de la tentative.

Scottie en gardera un sentiment de culpabilité qui le hantera pendant toute l’histoire. C’est ainsi que le monde de l’histoire illumine ce vertige dont souffre Scottie (sa faiblesse).
Ce motif est répété lorsqu’il tentera d’empêcher la femme qu’il aime de se suicider, incapable qu’il est de la rejoindre sur le clocher.

Et c’est aussi en profitant de cette faiblesse que l’antagoniste pourra manipuler Scottie.