L’arroseur arrosé – Don’t Breathe : la maison des ténèbres

Sorties le 5 octobre 2016 Réalisation : Fede Alvarez Durée : 1h28

Avec : Jane Levy, Stephen Lang, Dylan Minette, Daniel Zovatto...

Production : Ghost House Pictures, Good Universe, Screen Gems Inc., Stage 6 Films

Distribution : Sonny Pictures Releasing France

Un coup de génie peu horrifique

Trois ans après le brillant reboot d' Evil Dead, la joyeuse troupe composée de Fede Alarez (réalisation), Rodolfo Sayagues (scénario), Sam Raimi (producteur et ô combien éclairé réalisateur de la trilogie Evil Dead) et Robert G. Tapert (production), se retrouve pour un film aussi malin que peu sanglant.

À Detroit, Rocky, Alex et Money multiplient les cambriolages pour se faire un peu d'argent. Mais lorsqu'ils apprennent qu'un vieil aveugle cache chez lui une somme plus que rondelette, les trois jeunes voient en cet ultime coup de maître la porte de sortie à leur vie de misère. Prudente mais confiante la petite bande investit la maison, sans se douter que le dit aveugle est en fait un ancien militaire, sans yeux certes, mais avec plus d'un tour dans son sac. Commence alors une nuit infernale où les chats deviennent petit à petit des souris...

L’arroseur arrosé – Don’t Breathe : la maison des ténèbres

Loin de l'esprit gore d' Evil Dead, Don't Breathe expérimente l'horreur sous une autre forme et met la violence à l'honneur. Qu'elle soit physique ou psychologique, le film la révèle sous toutes ses coutures et la place dans chaque recoin de l'histoire ; fer de lance de la narration principale tout en étant l'élément majeur de l'environnement socio-culturel des personnages. Mais si la violence donne une certaine matière au récit, on est loin du film " d'horreur d'art et essai ", ne l'oubliez pas, le père Fede et son ami le père Sam n'ont qu'une motivation : faire monter la pression.

Fort d'un scénario aussi rusé qu'implacable et d'une réalisation qui allie technicité et efficacité, Don't Breathe peut se vanter d'être la fierté de ses papas. Il faut dire qu'à la base tout découle d'une excellente idée : une potentielle victime qui réussit en dépit de sa cécité à prendre aux pièges des jeunes gens dont l'avantage - la vue - se métamorphose en handicap. Ce huis-clos donne naissance à un duel, où, malgré un flashback en scène d'ouverture, le spectateur ne sait jamais comment l'histoire va évoluer. L'aveugle et la jeune Rocky sont comme deux animaux également pris au piège dans une maison qui transforme la faiblesse de l'un en faiblesse pour l'autre. Cette forme d'égalité dans le face à face guide le film et met religieusement de l'eau dans le moulin du suspens jusqu'au bras de fer final.

L’arroseur arrosé – Don’t Breathe : la maison des ténèbres

Si objectivement cette heure et demie est aussi intelligente que réjouissante, tout le monde ne se prendra pas forcément au jeu. La dynamique hitchockienne du récit, et la qualité de la mise-en-scène (dont un plan séquence génial, notons le) sont inattaquables, mais, le cœur à ses raisons que la raison ignore. Qu'on se le dise bien, Don't Breathe utilise les codes du film d'horreur avec parcimonie, le but premier est de tenir en haleine grâce au suspens pur, non pas horrifique. Mais lorsque les barrières de l'horreur cèdent au suspens, l'esprit du spectateur peut-être amené à aborder l'histoire différemment, et, à prêter attention à des détails qui ne peuvent plus être balayé par une giclée de sang. Apparaît alors le regret que certains aspects ne soient pas plus approfondis, notamment la psychologie et le passé des personnages. Conforté dans l'idée que l'on ne sursautera pas toutes les cinq minutes, l'attention se dirige sur d'autres éléments du récit qui sont abordés : utiles et bien amenés pour un film d'horreur, survolés et pas assez exploités pour un film juste de fiction.

Ce petit bémol ne gâche néanmoins pas les qualités du long-métrage qui réussit tout de même à faire accepter la situation telle qu'elle est au public. Elle ne fait que semer la graine de la perplexité dans l'esprit du spectateur.

En conclusion, avec Don't Breathe Fede Alvarez démontre encore une fois ses talents de réalisateur et sa capacité d'innovation. Intelligemment écrit et mis en scène, ce film vous fera passer un bon moment sans vous faire hurler de peur pour autant.

L'avis de Bizard Bizard : allez-y au trot.

Crédits images: avoir-alire.com (couverture) - allocine.fr - ecranlarge.com