L'Homme Invisible - 1933 ("Le pouvoir de faire plier le monde")

Par Olivier Walmacq

Genre : horreur, épouvante, fantastique 
Année : 1933
Durée : 1h10

Synopsis : Jack Griffin, un scientifique, a trouvé le moyen de devenir invisible. Soucieux de trouver la formule qui lui permettra un retour à la normale avant d'annoncer sa découverte, il s'enroule le visage de bandeaux et se retire dans l'auberge d'un village isolé. Son aspect étrange ainsi que son comportement attirent la curiosité des gens et l'empêchent de travailler. Agacé, Griffin cherche à effrayer les villageois et se sert de son pouvoir à des fins de plus en plus malintentionnées.  

La critique :

Né en 1889 dans une famille ouvrière, le réalisateur, James Whale, se passionne tardivement pour le noble Septième Art. En effet, James Whale arrête sa scolarité dès l'âge de 13 ans. Il participe à la Première Guerre Mondiale. Arrêté puis écroué dans un camp allemand, c'est durant cette période qu'il se découvre une passion pour le théâtre. Il devra attendre la fin de la Première Guerre Mondiale pour diriger sa première pièce de théâtre. Après la guerre, les premières représentations sont déjà plébiscitées par la presse et le public. James Whale est alors repéré par les producteurs.
C'est dans ce contexte inattendu qu'il réalise son tout premier long-métrage, La Fin du Voyage, en 1930. Puis les choses s'accélèrent. James Whale devient un cinéaste prolifique et enchaîne les tournages.

En 1931, l'immense succès de Frankenstein, avec Boris Karloff, le rend célèbre dans l'industrie cinématographique hollywoodienne et auprès du grand public. Viennent également s'ajouter La Fiancée de Frankenstein (1935), Une soirée étrange (1932), Cocktails et homicides (1935), L'homme au masque de fer (1937) et bien sûr L'Homme Invisible (1933).
A l'instar de Frankenstein et de La Fiancée de Frankenstein, L'Homme Invisible (The Invisible Man dans la langue de Shakespeare) va rapidement s'imposer comme un grand classique du cinéma fantastique et d'épouvante. A l'origine, le long-métrage est l'adaptation d'un roman éponyme de H.G. Wells. Le film sort également dans un contexte houleux, soit au moment de l'apogée du nazisme en Allemagne. 

Parallèlement, une autre production fantastique cartonne au box-office. Il s'agit de King Kong (Ernest B. Schoedsack, 1933). A son tour, The Invisible Man va connaître de nombreux chapitres, remakes et succédanés, notamment Le retour de l'homme invisible (Joe May, 1940), La Femme Invisible (A. Edward Sutherland, 1940), L'agent invisible contre la Gestapo (Edward L. Marin, 1942) ou encore La Vengeance de l'homme invisible (Ford Beebe, 1944). 
A cela s'ajoutent plusieurs séries télévisées dérivées (celles de 1959, 1975 et 2000), Les Aventures d'un homme invisible (John Carpenter, 1992) et un remake assez grotesque, Hollow Man : l'homme sans ombre (Paul Verhoeven, 2000). La distribution de The Invisible Man (donc la version de 1933...) réunit Claude Rains, Gloria Stuart, William Harrigan, Henry Travers, Una O'Connor et Forrester Harvey. 

Attention, SPOILERS ! (1) Un étrange personnage a élu domicile dans l’auberge d’un petit village de la campagne anglaise. Aucune partie de son corps n’est visible : il porte des gants, son visage est recouvert de bandelettes, des lunettes noires cachent ses yeux. Il s’agit d’un jeune savant, Jack Griffin, qui poursuit en secret des recherches sur l’invisibilité. Les villageois craintifs, accompagnés d’un policier, font irruption dans la chambre de l’étranger.
Celui-ci déroule alors ses bandelettes, quitte ses vêtements et disparaît à la vue de tous. (1) 
Certes, L'Homme Invisible version James Whale a inspiré de nombreux ersatz. Pourtant à ce jour, le film de 1933 reste la meilleure version (et surtout la plus fidèle) du célèbre opuscule de H.G. Wells. Toujours imitée mais jamais égalée. 

Certes, presque 85 ans se sont écoulés depuis la sortie de The Invisible Man. Pourtant, ce chef d'oeuvre de l'épouvante et du fantastique n'a rien perdu de son charme. Premier constat : la qualité (époustouflante) des effets spéciaux et visuels. Certes, aujourd'hui, le cinéma actuel possède toute une armada de techniques, d'ordinateurs et d'érudits dans le domaine des effets numériques.
En ce sens, 
L'Homme Invisible de 1933 reste un film terriblement moderne. Depuis les effets spéciaux "trompe-l'oeil" (si j'ose dire...) de James Whale, personne n'a su renouveler le concept, se contentant de dupliquer (à satiété) l'ingéniosité du célèbre cinéaste. Mais au-delà de ses effets spéciaux et visuels, admirables pour l'époque, The Invisible Man nécessite plusieurs niveaux de lecture.

Certes, le thème de prédilection reste la longue descente en enfer puis la folie immarcescible d'un scientifique, complètement fanatisé par sa nouvelle découverte. Rendu invisible et condamné à subir un état physiologique à priori irréversible, le savant Jack Griffin perd peu à peu la raison, semant la terreur, la mort, le chaos et la désolation dans une petite communauté. 
Pour y parvenir, le scientifique s'adjoint les services et l'obédience de l'un de ses fidèles prosélythes, néanmoins sous la menace. Devenu totalement incontrôlable, Jack Griffin se gausse des policiers et des villageois. Très vite, l'homme invisible préfigure l'avènement de la "Terreur" dans la presse et les journaux. Impossible de ne pas y voir quelques accointances avec l'ascension, en parallèle, d'Adolf Hitler en Allemagne. "Je veux faire régner la terreur ! J'ai enfin le pouvoir de faire plier le monde !" claironne Jack Griffin à l'un de ses anciens comparses. James Whale a la bonne idée de ne pas confiner son homme invisible dans son laboratoire scientifique. Au contraire, au gré de ses pérégrinations, Jack Griffin multiplie les meurtres et les déprédations. Son nouveau pouvoir le rend (évidemment) insaisissable. 
Pour le stopper, un chef de police fait preuve de perspicacité. En l'état difficile d'en dire davantage. James Whale exploite réellement les capacités de son héros principal. Surtout, le réalisateur montre un certain talent derrière le montage et la mise en scène. Bref, au risque de me répéter, on tient là un vrai classique du cinéma d'épouvante.

Note : 17.5/20

 Alice In Oliver

(1) Synopsis du film  sur : http://www.cinemafantastique.net/Homme-invisible-L.html