[critique] DEMOLITION

Par Pauline R. @Carnetscritique

Réalisé par Jean-Marc Vallée.

Avec Jake Gyllenhaal, Chris Cooper, Heather Lind, Naomi Watts, Judah Lewis.

Sortie le 6 avril 2016.

★★★★★

Engoncé dans un carcan superficiel, Davis ( Jake Gyllenhaal) travaille dans la finance avec son beau-père ( Chris Cooper) Lors d'un accident de voiture, il perd sa femme, Julia ( Heather Lind). Dès lors s'amorce chez Davis une renaissance, une reconstruction quotidienne de son honnêteté perdue, de sa réelle personnalité. Dans sa démarche, il rencontre Karen ( Naomi Watts), qui le bouleverse, et son fils adolescent Chris ( Judah Lewis).

Le deuil remplit Davis de curiosité, comme s'il vivait depuis une éternité dans un univers parallèle, coupé des relations, des sentiments, de la vraie vie. Cette curiosité se manifeste dans un premier temps pas le démontage systématique de tous les objets qui l'intriguent. On assiste alors à de succulentes scènes de déconstruction, puis de jubilatoires démolitions. Telle une goupille qui saute, Davis laisse exploser une grenade de sincérité, se découvre peu à peu. Mélangeant les espaces temps, Jean-Marc Vallée délivre son personnage lentement, accumulant les petits détails comme les scènes à l'énergie libératrice jouissive. Il n'hésite pas à mette Jake Gyllhenaal, décidément toujours impeccable, au cœur de situations loufoques : danser dans le métro, les écouteurs vissés aux oreilles, ou aux commandes d'un bulldozer pour une séance de destruction massive. Qui ne rêve pas un jour de s'abandonner, de laisser définitivement le verni voler en éclats ? Cela demande une grande force, de la volonté, et le réalisateur québecquois parvient parfaitement à véhiculer tout au long du film cette énergie positive.

Comme on l'a évoqué plut tôt, Jean-Marc Vallée entremêlent les scènes précédant et suivant le deuil, faisant ainsi un parallèle constant entre les deux vies du personnage. L'image suit cette comparaison, insérant les visions fantasmatiques de Davis, comme un tas de vêtements au beau milieu d'un hall d'aéroport ou une magnifique séquence de ralenti inversé lorsqu'il marche dans la rue, la musique plein les oreilles. L'enchevêtrement complexe de l'espace et du temps est constant, sans jamais devenir opaque. Demolition fait partie de ces films divertissants qui rend le spectateur intelligent. Avec une légèreté bien sentie, une loufoquerie bienvenue, le scénario explore l'intimité de Davis, sans jamais devenir pompeux.

Une des forces du film est en plus de devenir une sorte d'exutoire dans lequel, enfin, on se laisse aller à la démolition d'objets, sans aucune retenue. Et mon Dieu qu'est-ce que c'est bon !

Gyllenhaal trouve ici un rôle sur mesure, encore inédit et confirme, s'il le fallait encore, qu'il est capable de tout jouer, absolument tout ! Son duo avec Naomi Watts fonctionne particulièrement bien, et on sent beaucoup de complicité avec le jeune Judah Lewis, qui ne se laisse pas démonter et interprète un adolescent désœuvré attachant, au caractère bien trempé. On notera la présence de l'inégalable Chris Cooper, toujours aussi fin dans ses réactions, en père dévasté et incompréhensif face à la libération de son gendre. Il fait partie de ces acteurs dont on connaît la tête, sans retenir forcément le nom. Cet homme a pourtant joué dans L'Homme qui murmurait à l'oreille des chevaux, American Beauty ou The Company Men, et encore plus récemment dans la mini-série dont on vous parlait avec enthousiasme, 11/22/63. Vous le remettez ? Chris Cooper est un acteur sûr, solide comme un rock, que les réalisateurs emploient toujours avec une grande justesse.

Demolition, vous l'aurez compris, est un excellent mélange de foldinguerie et d'intelligence, un cocktail rafraîchissant, à voir absolument en ce moment !

Pauline R.

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