Notre petite soeur "Umimachi Diary"

Notre petite soeur

Suzu Hirose, Ryo Kase, Takafumi Ikeda

Par devoir, elles se rendent à l'enterrement de leur père, qui les avait abandonnées une quinzaine d'années auparavant.

D'un commun accord, les jeunes femmes décident d'accueillir l'orpheline dans la grande maison familiale...

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Entretien avec relevé dans le dossier de presse.


Au départ, je m'étais dit que j'allais seulement modifier la chronologie de l'histoire. Mais j'ai peu à peu changé d'avis et j'ai décidé d'écrire un scénario en y incorporant des scènes qui ne figurent pas dans le roman. Après m'être demandé comment imaginer une intrigue qui ne dépasse pas deux heures et qui tienne compte des problématiques de l'oeuvre originale, j'ai compris qu'il était préférable de limiter les décors et les personnages, et d'ajouter des épisodes inédits. Par exemple, on a décidé de placer Ninomiya du Sea Cat Diner au centre de l'histoire pour qu'elle puisse incarner des personnages qu'on ne voit pas dans le film. On a fait plusieurs tentatives et sans doute commis quelques erreurs, mais tout s'est éclairci après avoir engagé Suzu.


Notre petite soeur C'est exactement ce que j'ai fait sur ce film, bien qu'il s'inspire d'un roman graphique. Les monologues surprenants du livre et les didascalies sont frappantes, mais je ne voulais pas trop m'en servir. Du coup, j'ai réfléchi à la manière de transposer cet univers à travers le dialogue et les expressions des personnages.

Pendant le tournage, la distinction entre livre et film s'est atténuée. Je me demandais si telle scène figurait dans le roman ou si je l'avais inventée : je considère que c'est la preuve que j'ai pu m'approprier l'oeuvre d'origine.

La beauté des quatre soeurs comme celle des paysages de Kamakura est frappante. Pourquoi avez-vous fait appel au chef-opérateur Takimoto Mikiya après Tel père, tel fils ?

La posture très droite des personnages est plus proche des personnages de
Yasujiro Ozu que de ceux de Mikio Naruse. Les quatre soeurs ont une grande dignité dans l'apparence physique. Je me suis dit qu'il était préférable de les filmer comme si elles faisaient partie du paysage, plutôt que dans un style documentaire. C'est ce que j'avais en tête en sollicitant Takimoto Mikiya. Nous avons veillé scrupuleusement à la mise en place des comédiens et à la composition minutieuse des plans.


C'est la première fois que vous travaillez avec la compositrice Kanno Yoko.


Notre petite soeur Nagasawa m'a suggéré le nom de Kanno Yoko alors que je m'interrogeais sur la musique pendant le tournage. La première idée a consisté à trouver un thème avec un quatuor à cordes pour les quatre soeurs, puis à définir un instrument par soeur, et à réunir le tout harmonieusement vers la fin.

Nous avons utilisé des morceaux préexistants qu'elle avait composés pour les images déjà tournées, et comme le résultat était formidable, j'ai décidé de lui confier la partition.

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Note d'intention relevée dans le dossier de presse.

En découvrant le premier tome de
Umimachi Diary en 2007, immédiatement fasciné par l'ouvrage, décide de l'adapter pour le cinéma. À première vue, ce manga s'apparente à un drame familial émouvant, mais en s'y attardant davantage, on constate qu'il est plus nuancé qu'il y paraît. La présence de la demi-soeur cadette Suzu permettra-t-elle à l'aînée Sachi et à ses soeurs de se réconcilier avec leurs parents à qui elles en veulent toujours ?

Comment Suzu, qui a appris que sa naissance était source de souffrances, pourra-t-elle s'affirmer dans sa nouvelle vie ?

C'est à partir de ces deux questionnements que a échafaudé cette trajectoire d'une année au cours de laquelle les quatre protagonistes deviennent soeurs et finissent par former une vraie famille. Le travail d'adaptation a commencé à l'automne 2012. Tandis que Tel père, tel fils était censé sortir au Japon à l'été 2013, s'est attelé à l'écriture du scénario.

Tout en s'inspirant des personnages et des différents épisodes du livre, il a développé le parcours des quatre soeurs en fonction de sa propre sensibilité et de ses recherches. Chemin faisant, il a été encouragé par l'auteur Notre petite soeur Yoshida Akimi : "Je lui ai dit : Oublie le roman et adapte-le comme tu le souhaites", se souvient-il.

Se sentant soutenu, a imaginé son propre dénouement. Le tournage, qui a démarré au printemps 2014, s'est déroulé sur quatre saisons.

est très fier de ses actrices, qu'il qualifie de . S'agissant de Kaho, qui campe la soeur benjamine Chika, il souligne qu' "quatre soeurs idéales". Il évoque le choix d'Ayase Haruka dans le rôle de la soeur aînée Sachi : "Elle a un charisme et une aisance qui sont très proches du personnage dans le roman. Kaho possède à la fois profondeur et sensibilité. Elle a été d'une grande précision dans son jeu et dans ses déplacements". Hirose Suzu, qui incarne la plus jeune de la fratrie, Suzu, ressemble à tel point à son personnage dans le livre que ses trois soeurs ont cru la voir surgir du roman. "Quand j'ai rencontré Hirose à l'audition, j'ai eu le sentiment que le personnage de papier s'animait sous mes yeux !", reprend le cinéaste. "Elle n'était pas du tout impressionnée devant ses aînées pendant les répétitions. Sa présence, à divers moments, était impressionnante. J'étais convaincu qu'elle était la seule à pouvoir jouer le rôle ". "Jusqu'à présent, l'image d'Ayase correspondait plutôt à celle de la soeur cadette. Mais je me suis dit que sa posture bien droite et sa démarche convenaient parfaitement à la soeur aînée. Elle est empreinte d'une attitude propre à l'ère Showa qui évoque la comédienne Hara Setsuko". Le rôle de Yoshino a été confié à Nagasawa Masami qui avait déjà tourné sous la direction du réalisateur dans I Wish : " La soeur cadette, à l 'esprit frondeur, évolue dans un contexte profondément marqué par la mort. Nagasawa est très belle et je me suis dit qu'elle correspondait parfaitement au personnage", ajoute

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a surtout utilisée avec des enfants.
La caractérisation des personnages ne s'inspire pas forcément du graphisme du roman. Les costumes, les coiffures et le maquillage ont été conçus en fonction des comédiennes. Hirose, qui campe Suzu, n'a pas reçu le scénario : on lui donnait son texte verbalement à chacune de ses scènes. Il s'agit d'une technique que "Elle était formidable au moment des répétitions", précise-t-il. "Du coup, je lui ai demandé ce qu'elle préférait". Au final, la comédienne a choisi la deuxième option et a donc joué sans scénario. C'est un dispositif, dans le cinéma de , révélateur de la manière dont la personnalité d'un comédien nourrit son personnage. Par exemple, la façon particulière dont mange Chika s'inspire de celle dont Kaho se nourrit.

a cherché à transposer les quatre saisons telles qu'elles apparaissent dans le livre.
L'histoire de ces quatre soeurs se déroule dans une ville de bord de mer. Dès sa découverte du roman graphique, "Je trouve que l'une des grandes qualités du film tient à la manière dont la lumière qui baigne cette petite station balnéaire évolue au fil des événements", note le réalisateur. En évoquant avec précision le temps qui passe, le cinéaste s'attache à l'évolution et à la transformation des habitants de la petite ville. Notre petite sœur raconte aussi l'histoire d'une maison. Le foyer familial est un espace important qui évoque les paysages propres à chaque saison et la vie des quatre soeurs.


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poursuit : "Je n'aurais pas tourné le film si on n'avait pas déniché la maison qui convenait à cette histoire".

Après des repérages approfondis, l'équipe a trouvé le site correspondant aux consignes du réalisateur.

Un Japon loin de celui que l'on croît connaître. Des lieux propices aux rêves dans lesquels la nature est à la fois généreuse et splendide.

Le réalisateur fait appel une deuxième fois à Takimoto Mikiya comme Directeur de la photo. "Je trouve que l'une des grandes qualités du film tient à la manière dont la lumière qui baigne cette petite station balnéaire évolue au fil des évènements" déclare Kore-eda. Le résultat est splendide, enivrant, irréel et poétique. Ce "tunnel" dans lequel deux enfants s'engouffrent sur une bicyclette est lumineux et magique.

Le film est construit autour "d'une histoire de femmes" pour reprendre le mot du réalisateur. Quatre jeunes femmes dont on suivra des moments de vie, entre rires étouffés et courbettes à répétition. D'une saison à l'autre nous partageons leur quotidien. De désillusions, en problèmes familiaux, de la maladie au décès en passant par des fêtes, avec un splendide feu d'artifice, entre autres. Quelques vagues amourettes viendront ponctuer le quotidien des deux aînés entre recettes de cuisine et liqueur de prunes. D'autres femmes, très attachantes aussi, apparaîtront dans des rôles secondaires.

On arrive à envier ces traditions ancestrales qui tiennent bon face à une modernité qui reste, ici, bien en retrait. Il y a aussi cette dignité dont tous les personnages sont imprégnés, tous ces moments bienveillants entre jeunes élèves sans oublier le grand cœur d'un banquier. Tout est idéalisé pour mieux nous emporter et nous offrir du rêve.

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Un film attendrissant et généreux.