Turkish Star Wars (Le plus grand nanar de toute l'histoire du cinéma)

Par Olivier Walmacq

Genre: science-fiction, n'importe "nawak", inclassable, comédie
Année: 1982
Durée: 1h31

L'histoire : L'humanité vit paisiblement et possède une technologie avancée. Mais des méchants hommes veulent utiliser cette technologie pour devenir immortels. S'opposent alors l'Empire Tyrannique et les gentils humains. Pour se protéger des méchants, les gentils créent un bouclier autour de la Terre. Les méchants veulent alors s'emparer du cerveau des humains pour conquérir notre planète.

La critique :

En 1959, Ed Wood réalise Plan 9 From Outer Space, une série Z de science-fiction qui deviendra célèbre presque 15 ans plus tard. Cette fumisterie involontaire devient populaire quelques temps après la mort du cinéaste. Il marque la consécration du cinéma bis, et plus largement d'un autre pan du noble Septième Art : le nanar, un sous genre du cinéma.
Plan 9 From Outer Space devient même le plus mauvais film de toute l'histoire du cinéma. C'est sans compter sur Turkish Star Wars, réalisé par Cetin Inanç en 1982. Lui aussi est considéré comme le plus grand nanar de science-fiction de tous les temps, donc à égalité avec Plan 9 From Outer Space. Tout comme le film d'Ed Wood, Turkish Star Wars va connaître le succès et la notoriété bien des années après sa sortie.

De son titre original,Dünyayı Kurtaran Adam, littéralement "L'homme qui sauva le monde", Turkish Star Wars est, comme son titre l'indique, un film turc. Le long-métrage se taille une certaine réputation sur la Toile. Dans un premier temps, c'est le site Nanarland (http://www.nanarland.com/) qui exalte les qualités à la fois loufoques, farfelues et parodiques de ce nanar hors-norme.
En effet, Turkish Star Wars n'est pas seulement un film de science-fiction. Le long-métrage oscille finalement entre plusieurs genres : le space opera, les arts martiaux à la sauce kebab, la parodie science-fictionnelle, un mélange disparate entre Star Wars et Indiana Jones, et un film totalement inclassable et presque expérimental en un sens.

Inutile de mentionner les acteurs. Ce sont tous de joyeux inconnus. Seul Cüneyt Arkin, qui a aussi écrit le scénario du film, fait figure d'exception. L'acteur est très populaire dans son pays (donc la Turquie, au cas où vous n'auriez pas suivi). Cüneyt Arkin est parfois surnommé le "Alain Delon turc". Hélas, et vous vous en doutez, la comparaison s'arrête bien là.
Pourtant, Cüneyt Arkin possède une filmographie impressionnante. Pas moins de deux cents films à son actif ! Le plus célèbre, chez nous, reste évidemment Turkish Star Wars. Au début des années 1980, le cinéma turc tente de s'exporter à l'étranger. Pour parvenir à ses fins, il produit de nombreux films librement inspirés du cinéma hollywoodien.

Ainsi, plusieurs grands succès sont repris et plagiés : Star Trek, Rambo, Star Wars, Superman et même Bruce Lee font l'objet de nanars très personnels, précédés par la mention "Turkish". Paradoxalement, pour des raisons de droits d'auteur, tous ces nanars seront vigoureusement interdits aux Etats-Unis. C'est aussi la raison pour laquelle Turkish Star Wars reste encore assez méconnu aujourd'hui.
Dès l'introduction, la voix-off du narrateur nous présente les grandes lignes du scénario, pour le coup totalement incompréhensible et nébuleux. Attention, SPOILERS ! Dans le futur, l'Homme est parti à la conquête de l'espace et colonise d'autres planètes. L'humanité vit paisiblement et possède une technologie très avancée.

Mais des extraterrestres, aux intentions bellicistes, souhaitent utiliser les connaissances humaines pour conquérir l'univers. Dotés eux aussi d'une technologie moderne, il leur manque cependant un "ingrédient" nécessaire : le cerveau humain ! S'ensuit alors une guerre nucléaire entre les humains et l'Empire Tyrannique. Murat et Ali, deux pilotes de vaisseaux spatiaux de l'armée des gentils humains, s'écrasent sur une planète inconnue au cours d'une bataille.
Sur place, ils doivent affronter les sbires de l'Empire Tyrannique et déjouer les plans machiavéliques du chef suprême, une sorte de Dark Vador version surannée. Vous l'avez donc compris. Inutile ici de rechercher la moindre cohérence dans ce scénario obscur et même totalement alambiqué.

Ainsi, le film débute en nous montrant certaines séquences de Star Wars : la Guerre des Etoiles. La musique du film original est elle aussi reprise et galvaudée. Elle est parfois coupée par une bande originale cacophonique, visiblement composée par un amateur un peu trop alcoolisé. Mais Turkish Star Wars ne se contente pas seulement de piller le long-métrage de George Lucas.
Il reprend également la bande originale d'Indiana Jones. On relève également des incohérences géographiques. Par exemple, l'action du film est censée se dérouler dans un désert en Turquie. Pourtant, on aperçoit distinctement la pyramide de Kheops et le Sphynx de Gizeh qui se situent en Egypte. Bref, on nage ici en plein délire et en pleine fanfaronnade.

Turkish Star Wars se démarque également par son côté artisanal et même amateur. Ne vous attendez pas à assister à de grandes batailles spatiales. Tout du moins, quand il y en a, ce sont des séquences du vrai Star Wars qui sont insérées outrageusement dans le film. Le célèbre sabre laser de Luke Skywalker est ici troqué par une vulgaire épée en plastique.
A partir de là, Turkish Star Wars accumule les personnages les plus fantasques et les plus insensés : des ninjas foireux qui gesticulent dans tous les sens, des robots moisis et en carton-pâte, des extraterrestres aux visages érubescents sortis tout droit d'une foire à tout, des momies enrobées dans du papier toilette... et je n'en finirais pas de citer des exemples complètement "nazebroques" de ce genre.

A cela, s'ajoutent des combats "homériques" avec des sauts sur des trampolines, des gros nounours bariolés, aux couleurs ringardes et bigarrées, un montage complètement foireux... Bref, ce ne sont pas les exemples qui manquent. Que les choses soient claires. Dans son genre, Turkish Star Wars reste totalement inénarrable, encore une fois inclassable et expérimental.
Paradoxalement, tous ses défauts font aussi ses qualités. Les nanars actuels (Sharknado, L'attaque du requin à deux têtes...) ne possèdent pas la folie, l'hystérie, ni le côté artisanal et loufoque de cette pitrerie comique et science-fictionnelle. Bref, Turkish Star Wars a bien mérité son statut du plus grand nanar de toute l'histoire du cinéma.

Côte: Nanar

 Alice In Oliver