Excision (Onirisme chirurgical)

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genre: horreur, gore, épouvante, drame (interdit aux - 16 ans)
année: 2012
durée: 1h21

l'histoire : Une lycéenne perturbée développe une obsession sur la médecine et fantasme de pratiquer des opérations chirurgicales sur les autres élèves.  

La critique :

En général, les films qui sortent directement en vidéo ne présentent pas un très grand intérêt. Cependant, on relève tout de même quelques exceptions. C'est par exemple le cas d'Excision, réalisé par Richard Bates Jr. en 2012. Le long-métrage n'a donc pas bénéficié d'une sortie au cinéma dans notre contrée hexagonale. Néanmoins, Excision s'est distingué dans différents festivals, notamment à Sundance et à L'étrange festival. Au Samain du cinéma fantastique de Nice, Excision remporte le Prix du public pour le meilleur film d'horreur. Excision constitue également le tout premier long-métrage de Richard Bates Jr.
A l'origine, il s'agit de l'adaptation d'un court-métrage, déjà réalisé par Richard Bates Jr. lui-même.

Au niveau de la distribution, le film réunit AnnaLyne McCord, Traci Lords, Ariel Winter, Roger Bart, Jeremy Sumpter, Malcolm McDowell, Marlee Matlin, Ray Wise et John Waters. Voilà un casting pour le moins original et intéressant. La présence de John Waters est tout sauf aléatoire. Dans Excision, on retrouve cette fascination pour le gore, les fantasmes morbides et sexuels et ces personnages étranges, fantasques et atypiques. En l'occurrence, pour Excision, Richard Bates Jr. s'invite chez David Cronenberg.
Contrairement à ce que le titre du film laisse supposer, Excision n'est pas un torture porn ni un nouveau film trash qui accumule les exécutions sadiques, vulgaires et outrancières. Excision reste avant tout un film sur l'adolescence, mais pas seulement.

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Attention, SPOILERS ! Pauline a 18 ans. Elle vit avec sa famille dans une banlieue pavillonaire américaine et suit les cours à l'école en ayant des études de chirurgienne en vue. Son physique acnéique qu'elle ne cherche pas à arranger avec du maquillage au contraire de ses proches, et son comportement je-m'en-foutiste et solitaire en font une jeune fille marginale et asociale.
Elle subit l'éducation stricte de sa mère, Phyllis, alors que son père reste passif. La petite sœur de Pauline, Grace, est elle une jeune fille modèle, mais qui souffre de mucoviscidose et dont l'état est préoccupant. 
Phyllis fait tout ce qu'elle peut pour apprendre les bonnes manières à sa fille, mais ses méthodes autoritaires ne font qu'empirer ce qu'elle veut améliorer.

Pauline est de plus en plus obsédée par des songes morbides et sanglants. Lorsque Pauline décide de perdre sa virginité, c’est là que les choses vraiment étranges commencent... Richard Bates Jr. se concentre donc sur le portrait et la psychologie de son héroïne principale, donc Pauline, une lycéenne de 18 ans. Le réalisateur plonge dans la psyché de son personnage en puisant dans les rêves morbides, sanglants et sexuels de cette jeune femme. Le fantasme va peu à peu rejoindre la réalité...
L'air de rien, Excision aborde des sujets aussi douloureux et tabous que la nécrophilie et le sadomasochisme. Ainsi, Pauline se rêve en dominatrice sexuelle se délectant du sang et du corps de ses victimes fantasmatiques à coup de scalpel et d'opérations chirurgicales.

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Richard Bates Jr. brosse donc le portrait d'une adolescente perturbée, probablement schizophrène, où prédominent la dépersonnalisation, la dissociation mentale, la perte de tout contact avec la réalité, l'anosognosie, l'agoraphobie et des délires paranoïdes aux mécaniques complexes. Pour le réalisateur, les origines de ce déséquilibre mental semblent se trouver dans les dynamiques familiales.
Le père de Pauline n'est plus la figure de loi et d'autorité dans la famille. Il subit le diktat de sa femme, Phyllis, transformée en satrape despotique et atrabilaire. Cette dernière se comporte comme une régente, un tyran grotesque, moralisateur et ubuesque auprès de sa fille. Pauline est une lycéenne rejetée, vitupérée et ostracisée à l'école, où elle subit de nombreux anathèmes et quolibets.

Sa jeune soeur, Grace, est finalement la seule personne avec qui elle entretient de bons rapports et un semblant de sociabilité. Hélas, Grace est atteinte de la mucoviscidose et son état est de plus en plus préoccupant. Pour Richard Bates Jr., le piège aurait été de sombrer dans les clichés et le pathologique. Or, le cinéaste parvient à rendre cette jeune femme crédible et paradoxalement attachante.
Richard Bates Jr. parvient même à brosser un portrait au vitriol d'une société bourgeoise et américaine. Pauline vit dans un milieu cossu qui baigne dans l'opulence afin de mieux farder le silence qui s'est instauré dans sa famille. Quant à son milieu scolaire, il est partagé entre des adultes déconnectés du monde des adolescents et des lycéens égoïstes et fallacieux, uniquement focalisés sur leur petit nombril.

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A partir de là, Excision aborde de nombreuses thématiques passionnantes. Il n'est pas seulement question de la folie sous-jacente de Pauline, de sa famille et de ses études scolaires. Excision nous parle aussi de féminité, de désir et de sexualité. Pourtant, malgré ses nombreuses qualités, Excision n'est pas exempt de tout reproche. Dans sa dernière demi-heure, le long-métrage tourne un peu en rond.
C'est par exemple le cas lorsque le film réitère plusieurs fois les homélies et les prières de Pauline, implorant le "Notre Père" pour justifier ses comportements les plus déviants. Mais ne soyons pas trop sévères, Excision reste un film d'horreur largement au-dessus de la moyenne habituelle. Le long-métrage s'inscrit également dans la tonalité de May et de The Woman (tous les deux réalisés par Lucky McKee), qui s'intéressaient eux aussi à l'adolescence et aux rapports ambigus entre la virilité et la féminité. 

Note: 15/20

sparklehorse2 Alice In Oliver