[Critique] La femme au tableau réalisé par Simon Curtis

The-Woman-in-Gold

« Lorsqu’il fait la connaissance de Maria Altmann, un jeune avocat de Los Angeles est loin de se douter de ce qui l’attend… Cette septuagénaire excentrique lui confie une mission des plus sidérantes : l’aider à récupérer l’un des plus célèbres tableaux de Gustav Klimt, exposé dans le plus grand musée d’Autriche, dont elle assure que celui-ci appartenait à sa famille ! D’abord sceptique, le jeune avocat se laisse convaincre par cette attachante vieille dame tandis que celle-ci lui raconte sa jeunesse tourmentée, l’invasion nazi, la spoliation des tableaux de sa famille, jusqu’à sa fuite aux Etats-Unis. Mais l’Autriche n’entend évidemment pas rendre la « Joconde autrichienne » à sa propriétaire légitime… Faute de recours, ils décident d’intenter un procès au gouvernement autrichien pour faire valoir leur droit et prendre une revanche sur l’Histoire. »

Woman in Gold ou La femme au tableau est le nouveau film des producteurs du Discours d’un Roi et du Majordome. Avec un casting de grands noms, porté par Ryan Reynolds, et une histoire prenante et tirée de faits réels, les producteurs semblent avoir trouvé une des recettes du succès. Simon Curtis, réalisateur peu connu (My Week With Marilyn), met en image cette histoire entre Viennes durant la 2nd Guerre mondiale et le Los Angeles des années 90. Traitant de l’holocauste différemment, La femme au tableau remplit-il son rôle de fresque historique ?

La femme au tableau est un film d’époque, alternant entre le Los Angeles de la fin des années 90 et le Viennes des années 40. Les décors et l’ambiance du Viennes sous domination nazie sont parfaitement retranscrits. Des bâtiments jusqu’au plus petit détail, le travail fait est absolument bluffant. C’est à travers les yeux de Maria que l’on découvre le Viennes de sa jeunesse, l’Autriche à l’aube de l’invasion nazie et sous occupation. Lors de son voyage, elle traverse les rues et habilement on passe des années 90 au passé. On en apprend plus sur son histoire et sur l’enjeu principal. Pourquoi est-elle autant liée à ces tableaux, qu’est-ce qui l’a poussé à détester son pays. Là où Le Pianiste dépeignait une vision des rafles bien plus visuelle et violente, La femme au tableau préfère montrer l’horreur en douceur, en installant au fur et à mesure une ambiance malsaine et créant le malaise. Au fil des flashbacks on avance dans le temps et les actions des envahisseurs se font de plus en plus choquantes. Plus on en apprend sur l’histoire qui lie Maria à ce pays, mieux on comprend ce qui la pousse à se battre. Le réalisateur utilise pleinement cela, il en joue et donne lieu à certaines scènes très symboliques. Une scène est marquante et résume la raison du combat que mène Maria. Dans un musée, Maria et le personnage de Ryan Reynolds admirent le tableau de la Woman in Gold, on comprend après les nombreux flashbacks à quel point une œuvre d’art est importante pour celui qui a vécu. Véritable pont entre le passé et le présent, l’oeuvre est le dernier lien concret qui rattache Maria à sa famille. En contraste on observe un groupe de lycéens qui de manière nonchalante, passe devant le tableau sans y prêter attention.

La réalisation est en opposition avec le reste. Simon Curtis compte principalement des téléfilms dans sa filmographie. Cela se ressent grandement, dès les premières minute les cadres, le montage et l’image en général rappellent fortement des téléfilms insipides. Les scènes s’enchainent à une vitesse folle, pour un drame c’est inhabituel. Le long-métrage perd en crédibilité d’entrée de jeux. On est perdu entre un casting 5 étoiles et une réalisation anecdotique. C’est donc sans surprise qu’on assiste à une première demi-heure sans réelle intensité. Mais une fois que l’intrigue s’amorce, le réalisateur se laisse un peu aller à un format plus créatif en offrant quelques plans inventifs et esthétiques. Les grandes étapes de l’évolution de la quête de Maria sont illustrées comme il se doit par des mouvements de caméra plus travaillés. On retiendra l’ensemble des scènes d’époque dans Viennes. La scène de la Cour Suprême est elle aussi à noter, on y voit une performance très bonne de Ryan Reynolds. Le reste du casting est très convaincant. Mention spéciale pour Tatiana Maslany (Orphan Black) et Max Irons (The Riot Club).

Lorsque le film se termine, on reste partagé. Déjà par la qualité du film, qui reste inégale malgré de très bons points Ardoisepositifs. Ensuite par le message que fait passer le réal avec cette histoire. L’histoire d’une femme qui va priver un pays d’un trésor national par pur égoïsme. Une sorte de revanche sur ceux qui ont martyrisé sa famille, sauf que de l’eau est passée sous les ponts et que le nazisme a disparu d’Autriche. On nous montre que légalement, Maria est en droit de disposer de ce tableau, mais priver l’Autriche, son pays natal, de sa « Joconde », laisse tout de même perplexes. Si Simon Curtis nous propose sa vision bienveillante de la vieille dame, il amène par la même occasion une controverse qui poussera les spectateurs au débat, ce qui est une bonne chose.

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