[Rétrospective] Le début d’année 2015 au cinéma – Chapitre III: Mars

Par Kevin Halgand @CineCinephile

21h07.

… EEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEUGH …

Un lourd mal de crâne semble lui paralyser les systèmes nerveux. Il est par terre, sous une rame de métro. Un certain frisson lui parcourt une échine encore bloquée. Que s’est-il passé? Où est-il? Il reçoit des détritus et quelques mégots sur ses membres du corps, et s’aperçoit par la même occasion qu’il se retrouve nu. Ses bras sont lourds, il est encore dénué de toute fonction motrice. Il semble perdu quand tout d’un coup, il se rappelle qu’il avait oublié quelque chose d’important lundi dernier. Quelque chose qui pourrait décevoir nombre de personnes, et pire, pourrait déprogrammer définitivement ce qu’il a de plus cher aujourd’hui. Déterminé, il réussit finalement à se redresser sur les quais avec une adresse incroyable. Les passants le regardent, ébahis et surpris par un retournement de situation aussi improbable que ceux d’un navet sorti au mois de mars que je ne citerais pas. Il se mit à courir, arpente la rue, prend son vélo et le chevauche jusqu’à son paisible village situé non loin de la station où il dormBON ok le film en question plus haut c’était Diversion. Enfin bref, il retrouve ses vêtements dans un caniveau, les arbore avec classe et style malgré son pull DDP et son pantalon Lulu Castagnette, et rentre chez lui afin de retrouver son chat, l’embrasser tendrement, pleurer de joie d’être rentré en vie et vivant, allumer son ordinateur, et regarder l’épisode de L’Incroyable Famille Kardashian qu’il avait oublié de regarder précédemment et dont il s’était souvenu en se réveillant. Sa vie est désormais saine et sauve. Au contraire de son cerveau, mais là c’est son problème.

Oui, bon, cette intro n’a rien à voir avec cette chronique, mais j’avais rien trouvé d’autre de plus sympathique que de raconter la vie d’un neuneu dont on a spécialement rien à faire. Puis de toute façon, dans le dernier épisode, les soeurs Kardashian offrent à leur mère une couche pour qu’elle n’ait plus envie d’uriner dans les magazines, alors ce n’était pas si important.

Bonjour à tous et bienvenue dans la chronique rétrospective du mois de mars qui sera consacré aux films ayant vu leur sortie être programmée dans ce mois où il est bon d’aller au cinéma, parce que dehors il flotte en permanence. Puis en plus y a La Fête du Cinéma en mars, et ça faut pas dire mais c’est sympa quand même. Avant de démarrer, je voulais d’abord m’excuser très sincèrement pour mon absence de lundi dernier: en effet, la mouche flemme-flemme, variante occidentale de la mouche tsé-tsé, fait de monstrueux ravages dans les Landes. Allez, petit tour d’horizon des films du mois, le tout sans transition.

Chappie, de Neill Blomkamp: Et on démarre par l’une des plus grosses attentes de l’année pour de nombreuses personnes, et cette attente s’appelle Chappie. Après l’excellent District 9, l’exécrable Elysium, et la nomination de Blomkamp au poste de réalisateur pour le prochain film de la saga Alien, Chappie servait de confirmation sur le talent  de cet individu à l’exercice de la réalisation. Et par chance, Chappie est une belle réussite. Si elle est loin d’être parfaite – une bande originale trop présente et parfois opportuniste, notamment lors des multiples passages musicaux de Die Antwoord; ou encore quelques maladresses dans le scénario -, cette aventure a au moins le mérite de brasser des thèmes élaborés et un million de fois plus aboutis que dans Elysium; le tout avec une aisance assez folle et un véritable soin et une lisibilité exemplaire apporté aux scènes d’action. Chappie est donc un beau succès, de quoi commencer le mois de mars avec de belles promesses.

Inherent Vice, de Paul Thomas Anderson: Nouveau-né d’un réalisateur génial, Inherent Vice a su diviser les fans et les néophytes de ce metteur en scène. Film trop long, trop lent, trop ennuyeux, incompréhensible, limite masturbatoire… Sauf que non. Inherent Vice est un grand film, et je n’ai jamais cédé à l’ennui devant. A la fois très drôle, profondément mélancolique, et complètement déjanté dans son intrigue à tiroirs, Anderson déploie cette nouvelle jeunesse, sortie de Woodstock, découvrant les paradis artificiels les évadant d’un monde de conspiration et de doute. Son casting parfait, son délire métaphysique et son intrigue brumeuse tiennent en haleine durant les 2h28 de pellicule. Un véritable trip, tristement jubilatoire.

 –Diversion, de Glenn Ficarra et John Requa: I Love You Philip Morris, c’était sympathique. Crazy Stupid Love, c’était sympathique. Diversion, par contre, est spectaculaire dans sa nullité. Prévu comme le grand come-back de Will Smith, Diversion promet un divertissement solide et intéressant dans sa première demie-heure, avant de verser dans une surenchère lourdingue et profondément stupide. Comédie romantique fade et aussi légère que Guy Carlier sur un tremplin à la piscine, bondé de twists qui ne font plus aucun effet à force d’en rajouter à chaque scène, à la mise en scène qui ne comporte que deux-trois idées quand elle ne verse pas dans la pub pour un apéritif sans alcool, le film s’enfonce dans l’insupportable au fil des minutes, quitte à en devenir invraisemblable et détestable. Seul point positif, Margot Robbie est une très belle femme avec de superbes formes,  et le premier qui me dit qu’il n’a pas remarqué ça dans le film… est vraiment un menteur.

Attention, ceci est un message important. Pour le prochain film, la rédaction de CinéCinéphile vous informe que nous rentrons dans une violente zone de turbulences. Une zone encore très difficile à cerner, une zone de roue libre assez violente, à prendre dans un sérieux le plus strict. Nous rentrons… EN ZONE ANNA KENDRICK.

The Voices, de Marjane Satrapi: The Voices était également l’une des grosses attentes de l’année, et notamment pour voir la prestation, remarquée positivement dans de nombreux festivals, de Ryan Reynolds avant d’endosser pour la première fois – NON, SON PERSONNAGE N’EST PAS DANS ORIGINS WOLVERINE – le rôle de Wade Wilson, aka Deadpool, au cinéma. Et Dieu sait que Ryan Reynolds serait devenu un bon acteur en 2015! Après Captives, l’acteur interprète superbement Jerry Hickfang, personnage simplet et schizophrène, cherchant juste de l’amitié et une petite amie. Bien que le film ait du mal à aller au delà de son concept initial (un homme qui parle à son chien bienveillant et son chat irlandais psychopathe) et se garnit progressivement de symboles sur-signifiants (l’empilation de sacs-poubelles en parallèle d’une personnalité multiple qui éclot chez Jerry), il n’en reste pas moins une agréable comédie noire farcie de quelques moments cocasses et complètement délirants. Et ANNA KENDRICK EST UNE TRES GRANDE ACTRICE QUI MET EN ACTIVITÉ TOUTES SES NUANCES DE JEU AVEC BRIO, SON RÔLE DE JEUNE FEMME SYMPATHIQUE ET AMOUREUSE EST TOUCHANT AU POSSIBLE. Bref, The Voices est un bon film, un peu surestimé, mais il reste un bon petit film sympathique. ET Y A ANNA KENDRICK.

La ZONE ANNA KENDRICK est officiellement terminée. Merci de votre compréhension.

Hacker, de Michael Mann: Éloge de l' »intra-vélocité », chapitre I. Il faudra m’expliquer un jour pourquoi vous n’aimez pas ce film. Hacker, ou Blackhat dans sa version originale, est un modèle de techno-thriller. Blindé d’une précision exemplaire dans la mise en scène, progressant de niveau en niveau tel un jeu vidéo pour accéder au « boss final » du hack, le tout sans un discours didactique éreintant grâce notamment à une énorme vitesse d’exécution de chacune des décisions prises (parallèle évident mais subtil avec le réseau informatique qui s’accélère au fil des jours dans le monde), Michael Mann arrive à établir un film d’action proche de la perfection, mais légèrement entâché par une sorte d’aspect conventionnel lié à la relation et les rapports de force qu’entretiennent les deux personnages principaux du film (bien que Hemsworth réussisse à être un formidable héros « Mannien »). Un sacré tour de force, magnifiquement imagé et mis en scène, le tout doté d’un scénario béton. Hacker est l’un des indispensables de l’année.

En Route!, de Tim Johnson: Depuis quelques années, je me suis accordé une relation longue distance avec DreamWorks Animation. Entre coups d’éclat époustouflants (les Dragons, Les Croods, Eldorado, Shrek 1 et 2, Nos Voisins Les Hommes – si si je vous assure) et véritables accidents industriels (Mr. Peabody et Sherman, Gang de Requins, Shrek 3 et 4), on ne sait plus où se donner de la tête. En Route!, leur dernière production, scelle leur sort: DreamWorks a du mal à se réinventer. Pâle copie de Lilo & Stitch assortie de personnages aussi digestes qu’un peuple entier de Jar-Jar Binks, le film ne semble tenir que sur son visuel qui reste légèrement sympathique. Le reste du film fait également penser à une gigantesque publicité pour Rihanna, le tout agrémentée d’une morale balourde sur la famille et la condition humaine. Ce n’est jamais drôle, jamais touchant, avare en émotions, fade dans sa construction de personnages et extrêmement prévisible sans jamais oser apporter une légère once d’originalité. De plus, le personnage doublé par Rrrrrennifer Lopez ne mange pas de tacos dans le film, ce qui fait également office d’une grosse déception. Bref, si vous avez des enfants, épargnez-leur ce pitoyable et opportuniste En Route!, et allez voir Vice-Versa. Vous en aurez plus pour votre argent.

Un Homme idéal, de Yann Gozlan: Un scénario en béton armé ne fait pas tout. Le cinéma français aujourd’hui se résumerait presque à une succession de comédies dont les trois-quarts ne parviennent même pas à extirper un seul sourire. Mais par chance, quelques cinéastes et producteurs ont le courage d’oser tourner des thrillers renouant avec le glorieux temps de la Nouvelle Vague. Une homme idéal fait partie de cette catégorie, puisqu’il fait renaître un genre de polar que l’on a plus le courage de produire ces temps-ci. Or, il existe un deuxième problème en France, un problème de l’orre de la technique. Le MONTAGE D’INTENTION. Parce que oui, Un Homme idéal est très bien écrit et l’interprétation de Pierre Niney est remarquable, mais chaque retournement de situation dans les scènes sont présentées trois plans avant, la réalisation abuse de symboliques et s’évade de toute subtilité,et ainsi le film se noie dans son propre jeu alors qu’il aurait pu être un excellent thriller. Cependant, le film a su avoir de nombreux fans, donc il serait mieux pour vous de vous faire votre propre avis dessus.

Waste Land, de Pieter van Hees: J’avais parlé de ce film dans les colonnes de CinéCinéphile il y a quatre mois de cela, mais puisque nous sommes en pleine période de rétrospective, je ferais bien d’en reparler un petit peu. Waste Land est un sommet d’opportunisme. Il tente de se mettre au niveau de ses nombreuses références (KillList principalement) mais échoue complètement à cause de son manque complet d’originalité. Son scénario alterne trop maladroitement les séquences intimistes et les séquences policières, et fondre les deux au fur et à mesure de la progression de l’intrigue n’arrangent pas les choses, tant les acteurs sont eux-mêmes complètement perdus. De plus, le réalisateur sachant que la moitié de son casting est assez lamentable, il préfère se focaliser sur son acteur principal, Jérémie Rénier, même s’il n’y a aucune raison d’être champ sur lui. Pour conclure, on peut aussi rajouter que le film est d’un ennui absolument mortel, car tous les personnages semblent antipathiques et l’histoire, associée à l’imagerie du film, est extrêmement poseuse. Un sale moment à oublier.

Big Eyes, de Tim Burton: Le retour de tonton Tim, l’adulte aux yeux d’enfants? Oui… et non. Disons que Big Eyes est garni de quelques idées plutôt intéressantes dont une solide réflexion sur l’art et la pensée de l’art (en témoignent la mise en scène faisant figure complète de mises en abyme), mais Burton se perd dans son propre film, et il n’en reste qu’un long-métrage bâtard, à l’intérêt dissous par son ambition gigantesque de valser entre les codes et les genres; mais c’est malheureusement très maladroitement disposé. Si Amy Adams est rayonnante dans son rôle de peintre soumise aux intérêts financiers de son mari escroc, Christoph Waltz exaspère dans son rôle en totale roue libre qui trouve finalement un intérêt en toute fin de film, tel un gigantesque Deus Ex Machina de tournage. Une belle déception en somme.

En bref,

voilà un petit récapitulatif des films de mars:

-Oh yeah man. That’s a fucking masterpiece.: Inherent Vice;

-Indispensable: Hacker;

-Divertissant: Chappie;

-ANNAKENDRICKANNAKENDRICKANNAKENDRICKANNAKENDRICKANNAKENDRICKANNAKENDRICK: The Voices;

-Pétard mouillé dommageable: Un Homme idéal; Big Eyes;

-Nul: Diversion; Waste Land;

-Bitch better don’t have my money: En Route!;

Et c’est ainsi que notre trip hebdomadaire, consacré cette semaine au mois de mars, s’achève. On se retrouve la semaine prochaine pour un nouveau rendez-vous, peut-être le dernier étant donné que je n’ai pas pu voir beaucoup de films en avril, mai et juin. Allez, à la prochaine!

Chivers.

P.S: Vous avez été très nombreux (deux personnes, elles se reconnaitront) à avoir participé à mon jeu-concours la semaine dernière, et ça me touche beaucoup. En tout cas, non, ce jeu n’était pas une blague, et je remercie Big Boss de m’avoir aidé à monter une image afin d’inclure ce rouleau de scotch à l’intérieur. La réponse n’a d’ailleurs pas été trouvée par les participants, et j’avoue que ce n’était pas si compliqué pourtant. Ci-dessous, la réponse. A la semaine prochaine!

http://www.youtube.com/watch?v=uAXtO5dMqEI