Masaan, La jeunesse indienne entre tradition et modernité

Par Journal Cinéphile Lyonnais @journalcinephil

Masaan
Réalisé par  Neeraj Ghaywan
Avec  Richa Chadda, Vicky Kaushal, Sanjai Mishra, Shweta Tripathi
France/Inde, 2015, 1h43 

Date de sortie : 24 juin 2015

Prix spécial Un certain regard et  prix Fipresci au Festival de Cannes 2015.

Description

À Bénarès, la cité sainte au bord du Gange, un jeune homme pauvre tombe amoureux d’une jeune fille qui n’est pas de la même caste que lui. Une étudiante à la dérive est torturée par la culpabilité suite à la disparition de son premier amant. Son père perd son sens moral pour de l’argent, et un jeune garçon cherche une famille. Des personnages en quête d’un avenir meilleur, écartelés entre le tourbillon de la modernité et la fidélité aux traditions, dont les parcours vont bientôt se croiser…

« Premier long-métrage du jeune réalisateur indien Neeraj Ghaywan, Masaan explore les conflits entre tradition et modernité, entre la part intime de l’homme et son engagement dans la société. Une intrigue vibrante, portée par un trio d’acteurs au diapason. » Avoie-alire.com

A propos du film

Pour son premier film, Neeraj Ghaywan a une approche très éloignée du cinéma indien de Bollywood. Comme Anurag Kashya (Gangs of Wasseypur, Ugly), Kanu Beh (Titli – Une chronique indienne), ou Ritesh Batra (The Lunchbox), Neeraj Ghaywan fait partie de la nouvelle génération de réalisateurs indiens qui essaye de  faire du cinéma autrement. Il n’y a aucune scène de danse ou de chant. A nos yeux occidentaux, Masaan frappe dans un premier temps par son intérêt documentaire. Car le film nous montre un visage de l’Inde rarement vu sur nos écrans : le quotidien de membres de différents groupes sociaux, filmé de manière ni misérabiliste ni superficielle.

L’action du film, se situe à Varanasi (Bénarès), dans le décor impressionnant des « ghats« , escaliers aménagés au bord du Gange où se déroule la crémation des corps. Ici, depuis la nuit des temps, les hindous font brûler leurs morts et versent leurs cendres dans le fleuve sacré. Cette activité  véritablement dantesque effectuée par les « dalits », la caste la plus basse de la société, est formidablement mise en scène.

Le réalisateur s’intéresse à l’histoire de ceux qui sont chargés de brûler ces corps, et qui appartiennent aux classes basses de la société, mais aussi à des personnes plus favorisées socialement.

Masaan parvient à entremêler habilement deux histoires différentes. La première est celle de Deepak, un jeune ingénieur prometteur, issu des  « dalits« , qui tombe amoureux de Shaalu, une fille d’une caste supérieure. La famille de Deepak s’occupe des rites funéraires sur un « ghat ». Lui est beau garçon, étudiant sérieux, et ambitieux.  Shaalue est jolie, intelligente, passionnée de poésie… À chaque fois qu’il aperçoit Shaalu au détour d’une rue, le cœur de Deepak bat fort.  L’appartenance à deux castes distinctes est plus qu’une barrière sociale, c’est un abîme infranchissable.  Un jour, malgré tout et n’y tenant plus, il l’aborde. Étonnamment elle ne l’envoie pas balader comme elle le devrait, se montrant progressiste. Mais nul ne sait où les mènera cette aventure clandestine…

La seconde  raconte l’histoire de Pathak, un professeur cultivé et progressiste, prêt à tout pour sauver sa fille Devi d’un scandale sexuel. Devi, une étudiante (interprétée par Richa Chadda, très connue en Inde), décide de braver les règles de la société hindoue interdisant le sexe avant le mariage. Mais elle est surprise par la police avec son amant, qui préfère se suicider que d’affronter la honte de cette situation. Devi est alors avec son père victime du chantage d’un policier corrompu.

Les protagonistes de chaque histoire se retrouvent chacun dans une impasse morale à cause des règles et des lois dictées par leurs aînés.

Neeraj Gaywan, nous livre un tableau sans concession de la condition féminine et de la jeunesse en Inde. Aujourd’hui, l’Inde est un pays où les jeunes se rencontrent sur Facebook, mais où les traditions restent tenaces même si les choses avancent lentement !

La sublime photographie d’Avinash Arun Dhaware et la musique composée par Bruno Coulais et Indian Ocean ne font qu’ajouter de l’émotion à ce beau premier film.

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