[CRITIQUE] : Honeymoon

Première réalisation de la jeune américaine Leigh Janiak, Honeymoon s’est construit une réputation au sein des festivals du monde entier. Le film relate l’histoire de Paul et Bea, un jeune couple qui, en guise de voyage de noces, s’offre un séjour dans une maison isolée aux abords d’un lac. Suite à une crise de somnambulisme, Bea est retrouvée par son mari en pleine forêt, nue et totalement désorientée. Paul trouve Bea changée…

Disposant d’un budget plus que modeste, Honeymoon ne pâtit jamais de ce manque de moyens. Tout d’abord, le travail minutieux effectué par Kyle Klutz à la photographie, qui confère à l’ensemble une atmosphère crépusculaire fascinante. Et puis bien sûr, la présence au casting de deux acteurs en pleine éclosion : Rose Leslie (Game of Thrones) et Harry Treadaway (Penny Dreadful). Car en effet, le choix de ces deux talents prometteurs s’avère judicieux, et constitue la principale qualité du film. L’alchimie parfaite composée par le duo Leslie/Treadaway inspire automatiquement l’empathie du spectateur. Confrontés à des peurs universels, les personnages permettent au spectateur de s’identifier immédiatement. La peur viscérale de s’engager ou de devenir parents s’incarne sous la forme d’un traumatisme inconscient, qui refait surface violemment. Le film témoigne d’un certain savoir-faire et d’une aisance chez la cinéaste pour dépeindre les dérives d’un couple contaminé par une angoisse inconsciente. Janiak met ainsi en place une descente psychotique inquiétante, quelque part entre Roman Polanski et Michael Haneke, où paranoïa et tension sexuelle se côtoient.

Malheureusement, passé son exposition intéressante, Honeymoon s’effondre totalement. Le film donne constamment l’impression de se chercher, multipliant les pistes intéressantes sans jamais parvenir à les consolider. Jamais touchant, jamais troublant et surtout jamais dérangeant, le film déçoit dans ses deux derniers actes, tant la mise en place du dispositif promettait un traitement bien plus exigeant. L’évolution du personnage de Bea est expédiée trop rapidement, au détriment d’un véritable crescendo émotionnel, annihilant ainsi toute l’efficacité  de la caractérisation de ses deux protagonistes. Comme souvent avec ce genre de premier métrage aux influences mal digérées, Honeymoon a recours à la facilité et boucle le tout en nous balançant une scène trash racoleuse tout droit sortie de A Serbian Film. N’est pas Cronenberg qui veut, hélas.

Malgré les efforts de son excellent casting, Honeymoon s’avère finalement frustrant et parfaitement insignifiant. Est-ce que cela en fait un navet infréquentable pour autant ? Évidemment non, et l’on espère voir Leigh Janiak sur d’autres projets aussi sincères.