[Critique] Samba réalisé par Eric Toledano et Olivier Nakache

Publié par le 19 octobre 2014 dans Critiques | Poster un commentaire

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« Samba, sénégalais en France depuis 10 ans, collectionne les petits boulots ; Alice est une cadre supérieure épuisée par un burn out. Lui essaye par tous les moyens d’obtenir ses papiers, alors qu’elle tente de se reconstruire par le bénévolat dans une association. Chacun cherche à sortir de son impasse jusqu’au jour où leurs destins se croisent… Entre humour et émotion, leur histoire se fraye un autre chemin vers le bonheur. Et si la vie avait plus d’imagination qu’eux ? »

Intouchables 1.5, où comment faire moins bien avec la même chose.

Réalisateurs connus, puis reconnus pour leur talent, Olivier Nakache et Éric Toledano sont pour beaucoup, uniquement reconnus comme les réalisateurs de l’excellent Intouchables. Plus de 19 millions d’entrées au box-office français, Intouchables n’est plus un film, c’est un phénomène de société puisque tout le monde n’a eu que ce mot à la bouche entre novembre 2011 et février 2012. Au-delà du phénomène Intouchables, il ne faut surtout pas oublier d’où viennent ces réalisateurs français qui ont débuté leur carrière au cinéma sur une fausse note, mais qui ce sont très vite repris avec l’excellente duologie Nos Jours Heureux/Tellement Proches. À eux deux, ces derniers films proposent l’intégralité des thèmes qui sont chers au duo de réalisateurs. Le temps qui passe, la découverte de l’autre, le regard que l’on peut porter sur autrui, ainsi que les conflits générationnels comme intergénérationnels, sont des thèmes qui leur parlent et qui parlent également aux Français. Ce n’est donc pas pour rien que leurs films fonctionnent (toujours plus de 700.000 entrées) et qu’Intouchables a eu un succès retentissant puisqu’il parle de la société dans laquelle on évolue chaque jour, mais avec tendresse, délicatesse et une certaine complaisance. Ils ne sont jamais dans le jugement et n’osent pas prendre parti afin de laisser parler le spectateur et le faire réfléchir. C’est astucieux, mais avant tout intéressant puisque cette distance permet aux films d’associer des genres à priori totalement différents, que sont le drame, la comédie et la romance.

Contrairement à Intouchables qui avait pour but de mettre en avant la rencontre entre deux personnes provenant de milieux sociaux que tout oppose, Samba possède toujours cette envie de confrontation dans l’utilise seulement dans un second temps, à des fins relationnels et amoureux. Là où Intouchables encore une fois, réussissait le pari fou d’alliers des moments de comédies légères avec une tension dramatique palpable, notamment grâce aux superbes compositions de Ludovico Einaudi, qui nous hantent encore, Samba conserve cette légèreté dans les dialogues et dans sa mise en scène, mais n’arrive pas à retrouver cette tension dramatique alors que le sujet s’y prête encore plus et que certains plans ont clairement comme objectif d’émouvoir, tout en faisant réfléchir le spectateur sur les conditions de vie des sans-papiers. Adapté du roman Samba pour la France écrit par Delphine Coulin et publié en 2011, le long-métrage Samba reprend les bases posées par le roman de Delphine Coulin. Protagoniste sans papiers, arrivé à Paris depuis 10 ans et prêt à tout pour rester dans ce pays qu’il chérit tant, Samba va devoir accumuler les petits boulots et faire en sorte de ne pas se faire remarquer pour réussir à avoir enfin droit aux papiers qu’il aimerait tant avoir. Là où Delphine Coulin se servait des mots pour accentuer le désarroi, la pauvreté et parfois la peur avec laquelle vit Samba chaque jour afin d’augmenter la charge émotionnelle, Éric Toledano et Olivier Nakache ne font que survoler leur sujet et n’arrive pas à inculquer l’intensité nécessaire pour « choquer » et émouvoir le spectateur. Une adaptation n’est pas chose facile à faire, mais là où un roman peut se permettre de décrire un environnement ou un personnage dans les moindres détails, et ce, durant plusieurs pages, un film possède la même faculté, mais par le biais de l’image. À l’instar de toutes leurs réalisations, le duo Nakache/Toledano réussi à livrer un film salvateur, un film plein de bons sentiments dans lequel il nous est possible de déchiffrer les leçons à en tirer, mais cette légèreté qui va remarquablement à tous leurs films, leur fait défaut ici puisqu’elle prend radicalement le pas sur les autres émotions qu’auraient pu transmettre ce film.

Malgré ce manque d’intensité dramatique, Samba se repose sur des bases suffisamment solides pour permettre aux acteurs de faire parler leur talent pour offrir aux spectateurs quelques beaux moments de tendresse et de comédie. Ces bases sur lesquels se repose Samba ne sont autre que celles instiguées par Intouchables et sont succès c’est pas pour rien. Sur le plan narratif on retrouve une structure identique à celle qui avait si bien fonctionné dans Intouchables, avec une structure en cinq temps : l’introduction, la première rencontre, la naissance des sentiments, une séparation ou dispute, puis sur une cinquième partie que je ne divulguerais pas pour préserver la surprise. Malheureusement, là où Intouchables se basait exclusivement sur une scène clef à chaque étape pour faire progresser la relation entre les deux protagonistes tout en offrant quelques moments intimistes et drôles, Samba tente d’aller encore loin en impliquant à l’intérieur même de ces étapes, des personnages extérieurs au couple principal. À cause de cet ajout et cet entrelacement d’arc-narratifs plus ou moins complexe, le récit se perd dans un surplus d’informations et ce doit d’effectuer plusieurs ellipses afin de faire en sorte que le film ne perde à aucun moment son rythme de croisière ce qui à la fois entache l’histoire du couple principal et met totalement à l’écart les personnages secondaires qui sont intéressants, mais totalement sous-exploités. De ce fait, on a un film qui survole son propos comme il a déjà été dit, mais également ces personnages. De plus, certaines scènes, qui ne sont présentes que pour amorcer les scènes clefs, sont inutiles. Et lorsqu’on voit de quelles manières se terminent certaines autres scènes qui auraient mérité meilleur développement, on se pose la question existentielle du : Pourquoi ce tel choix ?

À peine trois ans après la sortie triomphale du film Intouchables, il n’était pas chose facile que de réaliser une nouvelle prouesse cinématographique et émotionnelle pour le duo de réalisateurs français. Au-delà des points négatifs qui ont été énumérés tout au long de la critique, Samba reste bel et bien un petit feel good movie qui permet au spectateur de passer un bon moment. Alors oui, les thèmes abordés sont simplement survolés pour éviter de sombrer dans le drame et le pathos, oui les personnages secondaires ne sont pas correctement exploités et la construction narrative est calqué sur celle d’Intouchables, néanmoins, Omar Sy, Charlotte Gainsbourg et le compositeur Ludovico Einaudi arrivent grâce à leur talent respectif à porter le film et à inculquer à certaines scènes une once d’émotion que ce soit dans le registre romantique ou comique. Oui ce n’est pas le film de l’année comme on aime le dire, oui c’est une déception, mais on passe un moment agréable malgré tout et on arrive à développer une certaine tendresse envers les protagoniste grâce à la mise en scène du duo Nakache/Toledano qui fait toujours dans la mise en valeur des personnages/acteurs.

 3/5

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