Gangs of Wasseypur, critique

gangs of wasseypur critique

La Quinzaine des Réalisateurs a fait escale pendant plus de 5 heures en Inde avec la fresque Gangs of Wasseypur. Une histoire urbaine de gangster toute à la démesure du cinéma de bollywood moderne influencé par les américains mais aux codes profondément indiens.

Gangs of Wasseypur, critiqueLorsque l’on parle de Bollywood, on pense forcément au décors kitschs, aux costumes magnifiques, aux romances niaises et dépassées, au jeu très approximatif des acteurs et bien entendu aux chansons et aux chorégraphies délicieusement ridicules s’étirant sur plus de 3 heures. Le premier plan de Gangs of Wasseypur est comme cela, mais la caméra prend très vite du recul et nous nous apercevons alors que c’est une télé qui sera démolie quelques secondes plus tard. Tout de suite, le ton est donné, le film ne sera pas une énième bluette indienne. Mais le réalisateur Anurag Kashyap n’explose cette image que pour y revenir plus subrepticement.

Car Gangs of Wasseypur est avant tout l’histoire de familles de gangsters qui s’opposent pour régner en maitre sur les quartiers populaires de Wasseypur. Le but sur plus de 5 heures de films est ainsi de tracer une fresque généalogique complète. Mais plutôt que de s’orienter dans l’aspect romanesque, le réalisateur oriente son film du côté du film de gangster urbain, comme si, très grossièrement, il mêlait Slumdog Millionnaire à au Parrain (cette comparaison est évidemment à relativiser et le film est évidemment très loin d’égaliser la trilogie des Corleone).

Gangs of Wasseypur, critique

Toutefois, le réalisateur a un gros problème de narration. En effet, sur les 5 heures de film, les premières 90 minutes servant à poser le contexte et les personnages sont brouillonnes. En ayant beaucoup trop de choses à raconter, il va trop vite et reste assez confus sur les 2 premières générations de gangsters. Heureusement, cela s’arrange ensuite et devient beaucoup plus plaisant à suivre, notamment grâce à un rythme frénétique qui enchaine les événements, les changements de camps, les apparitions de nouveau personnages, les morts violentes et sanglantes, … Il souffrira même de vouloir trop en mettre dans la dernière bobine qui s’appuie sur la voix off pour dérouler la conclusion un peu expédiée. En cela le film aurait en fait gagné à n’être centré que sur le segment principal du fils prenant le pouvoir, zappant ainsi la première partie et apportant plus de profondeur à la conclusion. Il n’en reste pas moins qu’on se laisse prendre au jeu devant le spectacle disproportionné du film.

Gangs of Wasseypur, critique

Avec un tel spectacle, Gangs of Wasseypur donne un coup de pied dans la fourmilière du cinéma indien que l’on a peu l’habitude de voir, en particulier sous cette forme urbaine et moins rêveuse, dans nos contrées. Mais malgré les apparences, il ne le révolutionne pas complètement non plus. Car comme dans tout film de Bollywood, Kashyap est généreux. Et il y va ici clairement en alignant les moments de n’importe quoi grandiloquents et en même temps assez cheaps, que ce soit dans les assassinats, dans un gunfight final dans un hôpital tout en faisant partir le scénario un peu dans tous les sens (sur 5 heures de films, il y a de quoi faire !). Et si il n’y a pas de séquences clipesques chorégraphiées, on n’échappera pas aux chansons qui rythment l’action à longueur de film. Sans oublier l’humour désamorçant rapidement la violence, le traitement purement indien du thème des gangsters et des mafias, du sort particulier réservé aux femmes (reléguées complètement au second plan) et des personnages finalement assez vides, reflets d’archétypes du genre mais qui nous entrainent malgré tout efficacement dans un récit assez dense.

Gangs of Wasseypur, critique

On aurait pu s’attendre à 5 heures d’ennui et, même si le film a du mal à démarrer, ce Gangs of Wasseypur se révèle tout de même assez prenant pour peu que l’on adhère au style indien toujours légèrement too much et kitsch. En spectacle unique et il n’y avait bien qu’en festival que l’on pouvait voir ça.

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