De Nathan Ambrosioni
Avec Camille Cottin, Juliette Armanet, Monia Chokri
Chronique : Cela doit être très gratifiant pour un acteur ou une actrice de rencontrer un réalisateur qui vous voit et vous comprend instinctivement. C’est ce que doit ressentir Camille Cottin lorsqu’elle tourne avec Nathan Ambrosioni, qui la comprend, et donc la dirige, comme personne. Il va chercher en elle une douceur nouvelle tout en conservant la force qu’elle dégage naturellement. Elle était épatante en mère célibataire de cinq enfants dans Toni en Famille, le formidable premier film du jeune réalisateur. Forcément, on compare un peu. Les Enfants vont bien est un peu moins lumineux, plus sérieux. Il adopte un rythme plus lent, plus posé, comme pour traduire le besoin pour son héroïne de digérer ce qui lui arrive. Un ton un peu plus adulte, peut-être, mais sans doute encore plus juste.
Cottin privilégie ainsi la retenue à l’énergie, mais elle traduit parfaitement la sidération dans laquelle se retrouve Jeanne après le départ de sa sœur. Elle incarne magnifiquement cette femme qui va devoir endosser, malgré elle, le rôle de figure maternelle pour ses neveu et nièce alors qu’elle a toujours refusé d’avoir des enfants.
Ses silences, ses regards expriment ce que Jeanne ne parvient pas à formuler, ce qu’elle cherche à comprendre, ce qu’elle interprète mal dans les intentions de son ex.
Jeanne cherche l’omniprésente absente, cette sœur qui lui a laissé ses enfants sans préciser pour combien de temps. Car si l’on ne voit Juliette Armanet que quelques minutes à l’écran, Suzanne, qu’elle interprète, hante le film de bout en bout.
Ambrosioni confirme un don épatant pour la direction d’acteurs, en particulier lorsqu’il dirige des enfants. La précision de l’interprétation des deux gamins joue beaucoup dans la crédibilité de l’histoire.
La mise en scène est très propre et appuie le naturalisme du récit. Ambrosioni compose de jolis plans sans ostentation ni trop en faire. C’est sobre mais minutieusement travaillé et pensé ; on le remarque dans le soin tout particulier qu’il porte à sa manière de cadrer l’image et d’élargir le champ. Une réalisation remarquable de maîtrise et de maturité pour un deuxième film.
Si le fond est moins prenant et la forme moins dynamique que dans Toni, si Les Enfants vont bien embrasse une trame plus classique et s’inscrit davantage dans l’héritage du drame social à la française, ce nouveau film dégage encore une très forte personnalité et s’élève grâce à la rare alchimie entre une actrice et son metteur en scène. Ce dernier s’impose déjà, à 26 ans, comme un grand cinéaste de la famille.
Synopsis : Un soir d’été, Suzanne, accompagnée de ses deux jeunes enfants, rend une visite impromptue à sa sœur Jeanne. Celle-ci est prise au dépourvu. Non seulement elles ne se sont pas vues depuis plusieurs mois mais surtout Suzanne semble comme absente à elle-même. Au réveil, Jeanne découvre sidérée le mot laissé par sa sœur. La sidération laisse place à la colère lorsqu’à la gendarmerie Jeanne comprend qu’aucune procédure de recherche ne pourra être engagée : Suzanne a fait le choix insensé de disparaître…