Cinéma | LES AIGLES DE LA RÉPUBLIQUE – 12,5/20

Cinéma AIGLES RÉPUBLIQUE 12,5/20

De Tarik Saleh
Avec Fares Fares, Lyna Khoudri, Zineb Triki

Chronique : Tarik Saleh clôt sa trilogie cairote avec une satire politique grinçante sur les liens troubles entre pouvoir et création artistique et, par extension, sur l’entretien de la propagande dans un régime autoritaire.
Son acteur fétiche, Fares Fares, incarne George Fahmy, star du cinéma égyptien, vedette adulée mais humain peu glorieux, qu’on va pousser à interpréter le président en place, un homme qu’il exècre, dans un biopic tout à sa gloire.
Avec Les Aigles de la République, Saleh brouille volontairement la frontière entre fiction et réel en construisant son récit autour de la figure d’Abdel Fattah al-Sissi. Un choix qui donne d’abord un ton presque burlesque au film, Geoge ne ressemblant en rien à celui qu’il est censé incarner.
Mais, à mesure que l’intrigue avance, la satire s’efface au profit d’un thriller politique plus sombre. Les intimidations subies par l’acteur et ses proches ne sont que la partie émergée d’un engrenage bien plus vaste, dans lequel il se retrouve entraîné malgré lui.
Malheureusement le thriller peine à se lancer, il ne décolle vraiment qu’au dernier. Et même lorsqu’il atteint ce climax, Les Aigles de la République s’avère un peu brouillon, pas très clair dans ses intentions.
Saleh effleure le grand sujet que Les Aigles de la République aurait pu être sans jamais totalement l’empoigner, peut-être embarrassé par le mélange des genres, peut-être victime d’une sorte d’autocensure du fait qu’il cite des politiques au pouvoir.
Le rythme est par conséquent un peu mollasson comparé au Caire Confidentiel, dernier film du réalisateur et grand thriller paranoïaque. Le scénario est d’autant plus décevant que si son point de départ est très consistant, il échoue à réellement mettre en exergue le parallèle entre machination politique et mécanique de propagande.
Si le fond aurait pu être plus développé, la mise en scène des Aigles de la République est magnifiquement exécutée. Saleh fait preuve d’une parfaite maitrise et orchestre ses séquences avec une précision qui lui permet, par le seul agencement des plans, de faire monter la tension. Quelques scènes atteignent ainsi une puissance narrative impressionnante. Le réalisateur suédo-égyptien peut aussi s’appuyer sur un casting irréprochable. Fares Fares offre un visage humain et faillible à ce « Delon égyptien » englué dans un complot qui le dépasse. Il est entouré d’une foule personnages nébuleux, interprétés par des comédiens avec des « gueules », participant à conférer au film son identité. Il peut aussi compter sur de très belles figures féminines, interprétées avec classe par la mystérieuse et envoutante Zineb Triki (Nadia El Mansour dans le Bureau des Légendes) et la toujours talentueuse Lyna Khoudri.

Synopsis : George Fahmy, l’acteur le plus adulé d’Egypte, est contraint par les autorités du pays d’incarner le président Sissi dans un film à la gloire du leader. Il se retrouve ainsi plongé dans le cercle étroit du pouvoir. Comme un papillon de nuit attiré par la lumière, il entame une liaison avec la mystérieuse épouse du général qui supervise le film.