La Grande Illusion

Par Crazyduck @Crazy_Critics

© ETABLISSEMENTS BRAUN & CIE/R.A.C. 1937


© R.A.C. 1937


© R.A.C. 1937


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Pourquoi voir La Grande Illusion ?
Il y a des films qui vieillissent et d’autres qui traversent le temps avec une facilité déconcertante, La Grande Illusion de Jean Renoir appartient sans conteste à la seconde catégorie, sorti en 1937, deux ans seulement avant une nouvelle guerre mondiale, ce chef d’œuvre humaniste conserve aujourd’hui une puissance rare, à la fois historique, politique et profondément humaine.
Figure majeure du cinéma mondial, Jean Renoir un réalisateur, scénariste et acteur français dont l’œuvre a profondément marqué l’histoire du 7ème art, né en 1894, Jean Renoir et le fils du peintre Auguste Renoir et d'Aline Charigot, il a grandit au milieu des pinceaux et des toiles mais c’est la caméra, et non le pinceau, qu’il choisira pour peindre le monde.
Dans les films de Renoir, on retrouve la douceur des couleurs impressionnistes transposée en lumière et en mouvement, les paysages vivants, les visages baignés de soleil, les ombres subtiles, son cinéma est une véritable peinture de l’âme humaine.
Ce qui fait la grandeur de Renoir, c’est son regard sur les hommes, dans ses œuvres, personne n’est entièrement bon ni mauvais, chacun agit selon sa nature, ses désirs, ses illusions, son cinéma est celui du pardon, de la complexité morale, le cinéaste refuse de condamner, il filme les failles, les contradictions de l'Homme.
Jean Renoir a influencé toute une génération de cinéastes de la Nouvelle Vague comme Truffaut et Godard, mais également des réalisateurs internationaux comme Kurosawa ou Satyajit Ray, il a ouvert la voie à un cinéma du réalisme poétique, à la fois ancré dans la société et ouvert à la poésie du quotidien.
Après avoir réalisé Les Bas-fonds avec Jean Gabin (Le Quai des brumes, La Bête humaine) et Louis Jouvet (Hôtel du Nord, Quai des Orfèvres), Jean Renoir retrouve de nouveau Gabin pour La Grande Illusion, une œuvre pacifiste et humaniste.
Pendant la Première Guerre mondiale, deux officiers français, le capitaine de Boeldieu (Pierre Fresnay) et le lieutenant Maréchal (Jean Gabin), sont abattus au-dessus des lignes allemandes et faits prisonniers par un officier allemand, le capitaine von Rauffenstein, un aristocrate courtois et respectueux, qui partage avec de Boeldieu une culture et un code d’honneur communs à la noblesse européenne.
Les prisonniers sont envoyés dans différents camps, où ils rencontrent d’autres détenus, notamment Rosenthal, un riche banquier français de confession juive, qui partage généreusement ses colis de nourriture, ensemble, ils préparent des évasions tout en tissant des liens d’amitié qui dépassent les barrières de classe et d’origine.
Dans La Grande Illusion le réalisateur refuse tout manichéisme, ici pas de combat entre le bien et le mal, l’ennemi n’est pas un démon sanguinaire, le commandant allemand von Rauffenstein (incarné par un Erich von Stroheim bouleversant de dignité) partage avec Boeldieu un coté aristocratique, qui rend les deux hommes presque comme des frères, Jean Renoir filme cette relation avec une grande délicatesse.
Le cinéaste offre également une réflexion sur les classes sociales à travers le parcours des deux officiers français, Boeldieu (noble) et Maréchal (ouvrier), il montre que ce qui sépare les hommes, ce ne sont pas les frontières, mais les barrières qu’ils portent en eux.
Coté interprétation on retrouve Jean Gabin qui incarne un Maréchal terrien, franc et attachant, dans sa filmographie il incarne des hommes simples, parfois brisés, souvent révoltés, mais toujours humains, il est ici l’âme du peuple français, il est incarne à la fois la France en bleu de travail et en pardessus.
Pierre Fresnay, campe un aristocrate digne et mélancolique tout en retenue, Erich von Stroheim incarne la noblesse allemande déchue, un homme conscient que son monde touche à sa fin, Renoir orchestre leurs rencontres comme des duels de regard, portés par une mise en scène fluide.
Ce qui frappe dans La Grande Illusion, c’est l’absence de combats, pas de tranchées ni d’assauts, seulement des visages et des mots, ici la guerre devient le décor d’une tragédie sociale, au delà de millions de morts ce joue la gloire militaire et la supériorité des classes.
Près de 90 ans plus tard, La Grande Illusion reste un manifeste d’humanité, Jean Renoir livre un film sur la tolérance, la compréhension mutuelle et sur ce que les hommes partagent malgré tout, un film à (re)découvrir comme une leçon de cinéma et d’humanité.

Un monument du cinéma français

© R.A.C. 1937

Synopsis :


Pendant la Première Guerre mondiale, deux officiers français, le capitaine de Boeldieu et le lieutenant Maréchal, sont abattus au-dessus des lignes allemandes et faits prisonniers par un officier allemand, le capitaine von Rauffenstein, un aristocrate courtois et respectueux, qui partage avec de Boeldieu une culture et un code d’honneur communs à la noblesse européenne.
Les prisonniers sont envoyés dans différents camps, où ils rencontrent d’autres détenus, notamment Rosenthal, un riche banquier français de confession juive, qui partage généreusement ses colis de nourriture, ensemble, ils préparent des évasions tout en tissant des liens d’amitié qui dépassent les barrières de classe et d’origine.

© R.A.C. 1937

Anecdotes :

Le fort où sont emprisonnés les officiers est le château de Haut-Kœnigsbourg en Alsace, restauré par Guillaume II. 

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Joseph Goebbels, ministre de la Propagande nazie, qualifia le film de « l’ennemi cinématographique n°1 ». 

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À sa sortie, le film fut accusé de défaitisme par la droite française. 

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Le titre vient d’un livre de Norman Angell (The Great Illusion, 1910), qui affirmait que la guerre entre nations civilisées était économiquement impossible, malheureusement il se trompait.

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