Après ses chefs d'oeuvres "Le Parrain" (1972) et "Le Parrain II" (1974) Francis Ford Coppola estimait que sa saga était terminée, mais après une douzaine d'années prestigieuses jusqu'à "Cotton Club" (1984) le cinéaste a commencé à connaître plusieurs échecs commerciaux à partir de "Coup de Coeur" (1982) avec entre autre "Tucker" (1988) également ce qui a permis à Paramount de faire pression sur le cinéaste pour qu'il réalise une nouvelle suite. Le producteur-réalisateur-scénariste (via sa société Zoetrope Productions) Coppola retrouve une nouvelle fois l'auteur Mario Puzo comme co-scénariste mais cette fois il ne s'agit pas d'une adaptation de son roman mais d'un scénario original. Les deux co-scénaristes décident de situer l'histoire sur les années 1978-1979 en s'inspirant très fortement du scandale de la Banco Ambrosiano (Tout savoir ICI !) et le reliant à la mort du Pape Jean-Paul 1er (Tout savoir ICI !) et notamment sur sa dimension complotiste. Plus de quinze ans après les premiers films, le cinéaste a pu retrouver aussi plusieurs de ses techniciens comme le Directeur artistique Dean Tavoularis ou le Directeur Photo Gordon Willis, tandis que le compositeur du film est Carmine Coppola, père de Francis Ford et devenu son compositeur attitré tout en reprenant évidemment ici le thème originale et mythique signée de Nino Rota. Les espoirs de Paramount sont à l'image de l'ambition affichée puisque le film est tout de même doté d'un budget de 54 millions de dollars, soit pour la comparaison, deux fois plus que le budget de son contemporain sur un même sujet "Les Affranchis" (1990) de Martin Scorcese, mais le pari est réussi puisque le box-office Monde accumule près de 137 millions de dollars (contre 47 pour le film de Scorcese). Néanmoins, Coppola n'est pas content n'ayant pas eu le Director's Cut comme en 1974, sa position étant moins confortable il n'a pu s'imposer et notamment le titre voulu par Coppola et Puzo, "The Death of Michael Corleone" est catégoriquement refusé par paramount. Il faudra attendre 2020, pour le 30ème anniversaire et la sortie DVD/BluRay le cinéaste sort la nouvelle version titrée "Mario Puzo's The Godfather, Coda : The Death of Michael Corleone", le film passe ainsi de 162mn à 158mn, et les deux différences majeures avec la version cinéma de 1990 est début qui ne commence plus dans la maison familiale mais avec la cérémonie à l'archevêché, puis la fin et ce détail où le Parrain met ses lunettes fumées. Précisons que pour cette séance nous avons vu la version Director's Cut. Le film est nommé aux Oscars à sept reprises, mais cette fois le film ne reçoit aucune statuette. Notons que ce film est grand public contrairement aux deux premiers films... A bientôt 60 ans, Michael Corleone s'attache à finaliser le transfert de ses affaires criminelles vers un consortium légal. Après des années à avoir converti ses affaires vers des business plus honnêtes il reçoit une distinction cruciale qui le crédibilise auprès de l'Eglise. Il organise une ultime affaire où il doit investir en collaboration avec la Banque du Vatican. Entre temps, il prend sous son aile Vincent Mancini, fils illégitime de son frère Sonny dont il semble avoir hérité le côté sanguin. Mais ce dernier tombe amoureux de la fille de Michael, et il est devenu un ennemi de Joey Zaza le Parrain qui a repris les affaires Corleone à New-York et qui veut grimper les échelons au sein de la Commission. Ce dernier devient un ennemi dangereux mais Michael Corleone soupçonne qu'un plus grand nom se cache derrière et qui risque de faire capoter ses affaires avec le Vatican...
Au moment du casting, un petit couac arrive quand Robert Duvall refuse le rôle, demandant un salaire équivalent à Al Pacino qu'il n'obtiendra pas ce qui obligera les deux scénaristes à réécrire le script. Seul cinq acteurs/personnages sont encore présents et ce depuis les débuts, Don Michael Corleone évidemment incarné par Al Pacino vu entre temps dans "Scarface" (1983) de Brian De Palma ou "Revolution" (1985) de Hugh Hudson, il retrouve Diane Keaton essentiellement vue auprès de Woody Allen dans dix films entre le court métrage "Men of Crisis : the Harvey Wallinger Story" (1971) et "Meurtre Mystérieux à Manhattan" (1993), Talia Shire soeur du cinéaste surtout vue autrement en épouse de "Rocky" (1976-1990) et Sofia Coppola, fille de, 19 ans lors du tournage mais qui est dans la saga depuis les débuts puisqu'elle apparaît dans le premier film alors qu'elle n'a que 3 jours (!) puisque c'est elle qui se fait alors baptisée, puis elle réapparaît en tant que passagère sur le bateau qui mène à New-York, mais elle a surtout suivre les pas de son père en dorénavant elle-même une grande réalisatrice avec son premier film "Virgin Suicides" (1999), puis enfin Richard Bright vu entre temps dans "Marathon Man" (1976) de John Schlesinger ou "Il était une fois en Amérique" (1984) de Sergio Leone, puis nous avons le retour de deux personnages du premier de retour malgré leur absence dans le n°2, Franco Citti acteur fétiche de Pier Paolo Pasolini dans une dizaine de films entre "Accatone" (1961) et "Les Mille et Une Nuits" (1974), Al Martino le fameux crooner Johnny Fontane, puis à l'inverse le seul qui n'était pas dans le n°1 mais apparue dans le n°2, Carmine Caridi qui retrouvera aussitôt après dans "Bugsy" (1991) de Barry Levinson le nouvel antagoniste Joe Montegna remarqué la même année dans "Alice" (1990) de Woody Allen. Citons ensuite le principal protagoniste après Michael Corleone, le fameux neveu Vincent Mancini incarné par Andy Garcia remarqué dans "Les Incorruptibles" (1987) de Brian De Palma et "Black Rain" (1989) de Ridley Scott et qui retrouvera dans "Gary et Linda" (1999) de Richard Wenk son partenaire Don Novello acteur fidèle de Coppola de "Tucker" (1988) à "Twixt" (2011), puis citons John Savage qui retrouve Richard Bright après "Hair" (1979) de Milos Forman et surtout vu dans "Voyage au Bout de l'Enfer" (1978) de Michael Cimino et "Salvador" (1985) de Oliver Stone, l'incroyable mais trop sous-estimé Eli Wallach mythique acteur de "Les Sept Mercenaires" (1960) de John Sturges, "Les Désaxés" (1961) de John Huston ou "Le Bon, la Brute et le Truand" (1966) de Sergio Leone, George Hamilton vu à ses débuts dans "Tonnerre Apache" (1961) de Joseph M. Newman ou "Quinze Jours Ailleurs" (1962) de Vincente Minnelli, Bridget Fonda (petite-fille de Henry Fonda) qui débuta comme Sofia Coppola très jeune puisqu'elle apparaît dans "Easy Rider" (1969) de Dennis Hopper aux côtés de son père Peter Fonda tandis qu'elle retrouvera Al Pacino dans "City Hall" (1996) de Harold Becker, Raf Vallone vu dans plusieurs classiques comme "Riz Amer" (1949) de Giuseppe De Santis, "La Ciociara" (1960) de Vittorio De Sica ou "L'Or sa Barre" (1969) de Peter Collinson, Donal Donnelly vu dans "Waterloo" (1970) de Sergueï Bondartchouk et "Gens de Dublin" (1987) de John Huston, Helmut Berger acteur culte chez Luchino Visconti dans "Les Sorcières" (1967), "Les Damnés" (1969), "Ludwig : le Crépuscule des Dieux" (1972) et "Violence et Passion" (1974), Valeria Sabel apparue dans "Navajo Joe" (1966) de Sergio Corbucci ou "Nous voulons les Colonels" (1973) de Mario Monicelli, Mario Donatone acteur fétiche dans une quinzaine de films des frères Bruno et Sergio Corbucci dont "Bluff" (1976) du second après lequel il retrouve donc l'acteur Mickey Knox remarqué à ses débuts dans "L'Enfer est à Lui" (1949) de Raoul Walsh ou "Les Ruelles du malheur" (1949) de Nicholas Ray, Vittorio Duse vu dans "Les Amants Diaboliques" (1943) et "Le Guépard" (1963) tous deux de Luchino Visconti retrouvant après ce dernier Marino Masè vu aussi dans "Les Monstres" (1963) de Dino Risi ou "Le Boss" (1973) de Fernadino Di Leo, puis enfin Al Ruscio qui retrouve Pacino après "La Chasse" (1980) de William Friedkin...
Rappelons que la fin du film "Le Parrain II" (1974) se situait en 1959, il y a donc une ellipse de près de 20 ans où on comprend que Michael Corleone s'est imposé comme le Parrain des Parrains tout en ayant méticuleusement transféré son empire du crime en multinational légal (plus ou moins !). Mais surtout les enfants de la dynastie ont forcément grandi et pris une place, logique de voir adulte les enfants de Michael/Pacino, pourquoi pas également Vincent/Garcia mais on s'étonne de ne pas voir du tout apparaître les deux aînés légitime de Sonny et donc demi-frères de Vincent, et bizarre de ne pas voir les deux enfants de Connie/Shire alors que cette dernière n'aura jamais été autant présente. Par là même, on s'étonne du personnage de Don Altobello/Wallach qui soit si important (parrain de Connie, vieil ami de Vito...) alors qu'il n'a jamais été vu ou même mentionné auparavant. Par là même, on s'étonne du traitement autour de la journaliste Grace Hamilton/Fonda, qui prend impose un personnage d'entrée alors qu'il disparaît aussi soudainement qu'il apparaît. Mais la maladresse la plus stupide se trouve au début avec Vincenzo/Garcia ne semble pas connaitre le père de sa cousine Michael Corleone et vice versa d'ailleurs avant que ce dernier précise qu'il s'est toujours occupé de lui (?!). Dommage.
Par contre, on aime le fait que Michael/Pacino semble usé, physiquement mais surtout psychologiquement, qu'il cherche une sorte de rédemption, le pardon du moins des siens mais le naturel reste comme une ombre menaçante. Ainsi si il trouve Vincent/Garcia trop sanguin comme son père il ne tarde pourtant pas à le choisir comme successeur, sans doute plus par fatigue et par manque de choix (justement où sont les autres enfants ?!) que par réel confiance au talent d'une jeune aux dents longues. En tous cas Garcia incarne un Vincent cohérent, sanguin et impulsif comme Sonny, mais aussi à la recherche d'une reconnaissance familiale et devient un prétendant tout à fait logique. Mais la véritable force du film reste son intrigue politico-religieuse solide et passionnante et vraisemblable qui s'avère même bien plus solide que la trame cubaine du "Parrain II" (1974). Ce troisième film s'avère moins violent mais pas moins tragique, il signe réellement la fin d'une époque. Troisième opus final de la plus grande saga du cinéma. 25 ans après Coppola signe l'apothéose finale de la famille Corleone. Un peu en-deça des deux premiers il reste tel un drame antique, Michael Corleone en César fatigué qui semble puni pour ses péchés pour une conclusion impitoyable et funeste mais toujours aussi beau et impressionnant.
Note :
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