Projet du fameux duo Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsak (dont les vies, surtout le premier, valent bien un film !), qui se sont lancés d'abord avec les documentaires "Grass : a Nation's Battle for Life" (1925) et "Chang" (1927), avant de passer à la fiction avec l'un des derniers films muets de Hollywood "Les Quatre Plumes Blanches" (1929). A chaque fois oscillant entre les postes de producteurs-réalisateurs les deux hommes ont de l'ambition à revendre et, sans aucun doute encore empreint des aventures de leur première vie guerrière ils décident de porter à l'écran la nouvelle "The Most Dangerous Game" (1924) de Richard Connell qui est adapté par James Ashmore Creelman qui a signé auparavant des films comme "La Victoire du Coeur" (1922) de Sidney Franklin et "La Danse Rouge" (1928) de Raoul Walsh et qui retrouvera juste après le duo Cooper-Schoedsak pour un certain "King Kong" (1933), qui a la particularité d'avoir été tourné quasi simultanément sur les mêmes lieux et décors, essentiellement en journée pour "King Kong" et de nuit pour "Les Chasses du Comte Zaroff" (1932) ! Mais si le duo assure ensemble "KIng Kong" devant et derrière la caméra, sur ce premier film Cooper reste uniquement producteur, tandis que Schoedsak est également réalisateur en collaboration avec Irving Pichel qui sera aussi acteur notamment dans "Cléopâtre" (1934) de Cecil B. De Mille ou "L'Insoumise" (1938) de William Wyler et signera en solo ses films "La Source de Feu" (1935), "Shanghaï, Nid d'Espion" (1942) ou "Sables Mouvants" (1950). Précisons que la musique est signée par Max Steiner, un des plus fameux compositeurs de l'Âge d'Or, avec trois Oscars en prime mais aussi connu pour son travail sur "Autant en Emporte le Vent" (1939) de Victor Fleming et "Casablanca" (1942) de Michael Curtiz. En France, le film ne sort qu'en 1934 sous le titre "La Chasse du Comte Zaroff"... Un chasseur et aventurier de renom effectue une croisière de luxe en petit comité mais leur navire fait naufrage dont il est l'un des deux seuls survivants. Ils échouent sur une île qui semble appartenir au comte Zaroff qui les accueille. Mais très vite leur hôte, riche, raffiné et cultivé avoue qu'il est un passionné de chasse et que désormais, n'ayant plus d'autres frissons, il recherche de nouvelles proies...
L'aventurier ayant fait naufrage est incarné par Joel McCrea vu dans "L'Ennemie" (1927) de Fred Niblo ou "L'Oiseau du Paradis" (1932) de King Vidor mais qui deviendra une star avec "La Femme et le Pantin" (1935) de Josef Von Sternberg ou "Ville sans Loi" (1935) de Howard Hawks, puis retrouvera dans "La Femme la plus Riche du Monde" (1934) de William A. Seiter sa partenaire Fay Wray vue dans "Une Soirée de Folie" (1925) de Leo McCarey ou "La Symphonie Nuptiale" (1928) de Erich Von Stroheim et qui retrouve ses producteurs-réalisateurs entre "Les Quatre Plumes Blanches" (1929) et "King Kong" (1933) à l'instar de Noble Johnson qui était déjà dans "Intolérance" (1916) de D.W. Griffith, et qui retrouvera aussi bien dans "King Kong" (1933) que dans sa suite "Le Fils de Kong" (1933) le duo de cinéastes mais aussi Robert Armstrong vu dans "Une Fille dans Chaque Port" (1928) de Howard Hawks et plus tard dans "Dans la Purée de Londres" (1933) de Schoedsak en solo à la réalisation, puis Steve Clemente qui a débuté dans "L'Inconnu" (1917) et "Du Sang dans la Prairie" (1918) tous deux de John Ford. Citons ensuite William B. Davidson apparu entre autre dans "Le Hors-la-Loi" (1925) de W.S. Van Dyke ou "Les Anges de l'Enfer" (1930) de Howard Hugues, James Flavin également de retour avec "King Kong" (1933) et qui tournera encore jusqu'à "De Sang Froid" (1967) de Richard Brooks en passant par "Les Raisins de la Colère" (1940) et "Les Cheyennes" (1964) tous deux de John Ford, Hale Hamilton vu juste avant dans "Le Champion" (1931) de King Vidor et "Je suis un Evadé" (1932) de Mervyn LeRoy, puis enfin n'oublions le comte Zaroff alias Leslie Banks remarqué plus tard dans "L'Homme qui en savait Trop" (1934) et "La Taverne de la Jamaïque" (1939) tous deux de Alfred Hitchcock... Le film débute en mer, où on est en présence de personnes privilégiées, l'élite dans divers domaines qui s'offrent une croisière mais dont on apprend rien, ni vraiment sur les raisons de cette croisière, ni sur les personnages à l'exception évidemment du héros, aventurier sûr de lui, courageux et droit cela va s'en dire. Cette partie aurait mérité 5-10mn de plus pour étoffer à la fois ce naufrage et le lien entre ces personnalités. Mais évidemment, ça reste peut-être un détail puisqu'on attend avec impatience la chasse à l'homme tant attendue.
On savoure l'arrivée sur l'île, où la jungle sauvage et le manoir gothique offre un paradoxe envoûtant, dans décors qui vont ensuite s'enrichir d'autres paysages, et surtout d'une atmosphère oscillant constamment entre Film Noir et fantastique. On note aussi un comte Zaroff qui serait le pendant "humain" d'un Dracula, a contrario le héros est beaucoup trop idéalisé, trop lisse avec une idylle qui manque un peu de sel ce qui s'explique par la volonté claire des producteurs-réalisateurs de se focaliser sur l'aventure et l'action. Dommage d'autant plus qu'ils sauront justement mieux faire avec "King Kong". La traque est rythmée et assez brutale pour l'époque mais reste forcément un peu sage pour notre 21ème siècle mais on notera quelques passages particulièrement réussis comme l'assaut des chiens ou la chute dans la cascade. En conclusion un film d'aventure et de traque solide et prenant, mais qui manque un peu de densité et de flamboyance. A voir ne serait-ce que pour son statut de film précurseur dans le genre.
Note :