The Ugly Stepsister (2025) de Emilie Blichfeldt

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Premier long métrage de la norvégienne Emilie Blichfeldt après plusieurs courts métrages comme "Smed" (2013) ou "Stesostra" (2020). L'idée du film est venue à la réalisatrice-scénariste suite à un mauvais rêve où elle se retrouvait dans la peau de la demi-soeur de Cendrillon, une jeune femme invisible et oubliée. En écrivant son histoire elle a voulu explorer les relations ambigues et complexes entre les femmes qui alternent entre admiration et jalousie, tout en poussant la réflexion sur la chirurgie esthétique. La perspective féministe s'avère évidente et naturelle pour la cinéaste qui a composé une équipe de tournage quasi entièrement féminine. La cinéaste a donc imaginé une réécriture du célèbre conte de Cendrillon qui est sans doute finalement plus proche de l'oeuvre originelle des frères Grimm ou de Perrault que du Grand Classique d'animation de Disney. Film interdit au moins de 16 ans... 

Le rôle principal Elvira est incarnée par Lea Myren essentiellement vue jusqu'ici sur le petit écran avec des séries TV comme "Superia" (2009), "Jenter" (2013-2018) ou "Kids in Crime" (2022-2024). Le reste de la famille sont joués par Ane Dahl Torp cue dans "Dead Snow" (2009) de Tommy Wirkola, "The Wave" (2015) de Roar Uthaug ou "The Quake" (2018) de John Andreas Andersen, Thea Sofie Loch Naess vue surtout dans des séries TV comme "The Last King" (2016), "The Last Kingdom" (2018) ou "La Palma" (2024), Flo Fagerli vue dans le film "Numéro 24" (2025) de John Andrea Andersen. Le Prince est joué par Isac Calmroth remarqué dans la série TV "Evil" (2023-...), puis citons ensuite Malte Myrenberg Gardiner remarqué dans la série TV "Young Royals" (2021-2024), Ralph Carlsson vu dans "Fucking Amal" (2000) de Lukas Moudysson, "Sleepwalker" (2001) de Johannes Rudeborg ou "Millenium 2 - La Fille qui rêvait d'une Allumette et d'un Bidon d'Essence" (2010) de Daniel Alfredson, Cecilia Forss apparue entre autre dans la série TV "Veuves Noires" (2016-2017) après laquelle elle retrouve son partenaire Kyrre Hellum vu aussi dans la série TV "Lilyhammer" (2012-2014), Katarzyna Herman aperçue dans les films "Tableau de Chasse" (2017) de Agnieszka Holland ou "Fools" (2022) de Tomasz Wasilewski, puis Adam Lundgren vu dans les séries TV "Chernobyl" (2019) ou "Whiskey on the Rocks" (2024)... Le film est une variation autour des contes de "Cendrillon", c'ets d'autant plus aisé que le conte est lui-même issu d'une multitude d'origine dont les versions les plus connues sont celle des frères Grimm et de Charles Perrault. Mais cette fois la vraie différence et le véritable intérêt du film réside dans le fait que le point de vue n'est pas celui de Cendrillon (Agnès/Lock Naess dans le film) mais celui de la demi-soeur Elvira/Myren souvent très en retrait dans les histoires, tandis que le conte de fée à la Disney est complètement occulté pour se rapprocher plutôt du réalisme et de l'horreur des versions originelles. Aussitôt on est plongé dans une version gothique et baroque, dans une atmosphère lugubre et un environnement funeste qui est compensée tout aussi vite par des événements tantôt pathétiques tantôt malaisants comme le premier dîner en famille. Tout le monde connaît la trame générale, les soeurs vont concourir pour être la plus belle à aller au bal. L'héroïne, ou plutôt la protagoniste principale est donc Elvira/Myren, la plus laide des soeurs qui va devoir subir les pires opérations esthétiques pour devenir la plus belle et être choisie par le Prince.

Soudain, le sujet de la tolérance, de la morale très patriarcale autour du couple idéal ("trouver chaussure à son pied" !) ou du complexe de Cendrillon (Tout savoir ICI !) deviennent obsolètes pour des thématiques plus actuelles et plus modernes sur la solitude, le besoin de plaire, l'apologie de la beauté unique qui mène à des bêtises allant à l'anorexie ou la simple chirurgie esthétique. Se sachant hors des critères la pauvre Elvira/Myren va alors tout faire pour devenir la plus belle, acceptant la chirurgie la plus primaire (version Ambroise Paré plutôt que le 21ème siècle) qui amène à de véritables séances de tortures qui font froid dans le dos, les poils se hérissent notamment quand le nez et les yeux passent sous le bistouri ! Le récit ose un équilibre précaire mais diablement efficace entre les tortures d'embellissement subies par Elvira et les passages plus ou moins lubriques qui rappellent la condition de femmes soumises comme la normalité sociétale. Ainsi le filmé vite tout le manichéïsme des contes habituels, Cendrillon-Agnès n'est pas si vertueuse tandis que la demi-soeur n'est méchante que par le désir d'exister à égalité avec sa soeur. Visuellement, outre les décors et les costumes, on apprécie le choix des effets spéciaux artisanaux plutôt que numériques ce qui accentue le côté viscéral et organique des "chocs" physiques mais qui prennent toute leur ampleur grâce à une abnégation et à la performance des actrices qui laissent pantois sur quelques séquences effroyables toujours sur la ligne tangente entre le grotesque et l'authentique. C'est la grande force du film. Il manque sans doute un petit quelque chose pour être à un autre niveau, sans doute un rythme plus travaillé. Néanmoins cette fable horrifique tient ses promesses et est assez audacieux pour mériter le détour.

Note :                 

14/20