Cinéma | LA PETITE DERNIÈRE – 15/20

Cinéma PETITE DERNIÈRE 15/20

De Hafsia Herzi
Avec Nadia Melliti, Ji-Min Park, Amina Ben Mohamed

Chronique : D’une délicatesse et d’une pudeur infinie, La Petite Dernière aborde avec une absolue justesse le coming out lesbien, sujet jusqu’ici assez peu invité dans le cinéma français. Si La Vie d’Adèle est un grand film sur l’amour et le désir, l’homosexualité de son héroïne s’avère vite secondaire et son traitement est d’ailleurs parasité par la fétichisation qu’en fait son réalisateur. Le film d’Hafsia Herzi l’aborde frontalement, mais avec douceur et bienveillance. L’œil féministe et sobrement engagé de la réalisatrice brosse le portrait touchant de Fatima (Nadia Melliti, éclatante révélation, prix d’interprétation à Cannes), jeune fille musulmane tentant de faire cohabiter ses désirs et sa foi.
Découpée en quatre saisons comme autant d’étapes cadençant son émancipation (les questions, la découverte, l’exploration et l’affirmation), la narration de La Petite Dernière est fluide et rend parfaitement compte de son apprentissage. Cela ne se passe évidemment pas sans heurts, d’autant que deux variables essentielles vont venir contrarier son émancipation, la religion et l’amour. Hafsia Herzi confronte en effet avec courage homosexualité et religion. Fatima est musulmane, mais ce qu’elle vit ne serait pas différent dans un famille pratiquante chrétienne ou juive. Au sein de chaque communauté où le dogme religieux nie les différences et impose les codes auxquels se conformer, ses enfants souffriront toujours de ne pouvoir être eux-mêmes malgré un attachement sincère à leur foi. En parallèle, La Petite Dernière dit aussi beaucoup de la douleur souvent exacerbée des premiers amours déçus, surtout quand ils sont cachés.
La mise en scène de Herzi capte le bouillonnement intérieur de son personnage, son âme sans cesse tiraillée. Elle sait se faire romanesque et sensuelle, mais jamais voyeuriste et saisit surtout l’intime sans jamais sombrer dans le pathos. Ce chemin tracé sur toute une année tend vers une scène de coming out bouleversante, d’une rare authenticité et d’une belle dignité.
Parmi les plus beaux films sur l’amour lesbien sortis au cinéma, La Petite Dernière marquera sans doute profondément la filmographie Queer francophone contemporaine.

Synopsis : Fatima, 17 ans, est la petite dernière. Elle vit en banlieue avec ses sœurs, dans une famille joyeuse et aimante. Bonne élève, elle intègre une fac de philosophie à Paris et découvre un tout nouveau monde. Alors que débute sa vie de jeune femme, elle s’émancipe de sa famille et ses traditions. Fatima se met alors à questionner son identité. Comment concilier sa foi avec ses désirs naissants ?