The Magdalene Sisters (2002) de Peter Mullan

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Second long métrages en tant que réalisateur-scénariste pour Peter Mullan entre ses deux autres jolies réussistes que sont "Orphans" (1997) et "Neds" (2010). Pour son projet le réalisateur-scénariste-acteur écossais revient sur l'existence des terribles couvents irlandais, dit les Couvents de la Madeleine (Tout savoir ICI !) et s'inspire pour son scénario du documentaire "Sex in a Cold Climate" (1998) de Steve Humphries. Après la fermeture du dernier couvent de ce type en 1996 et le scandale qui s'ensuit, le cinéaste signe donc le premier film sur le sujet. Un sujet épineux qui restera un thème polémique, voir tabou, et uniquement deux autres films abordera le sujet, et plus indirectement avec "Philomena" (2014) de Stephen Frears et très récemment "Tu ne mentiras Point" (2025) de Tim Mielants. Pour l'anecdote, le film qui est projeté aux pensionnaires du couvant est "Les Cloches de Sainte-Marie" (1945) de Leo McCarey... Irlande en 1964, trois nouvelles jeunes femmes arrivent au couvent de la Madeleine, contre leur gré. Il s'agit de Margaret violée par son couin à un mariage, la honte s'étant abattu sur la famille il semble que le mieux était donc de l'envoyer au couvent. Bernadette, orpheline devenue jolie en grandissant suscite la convoitise des jeunes hommes du quartier, au point où la direction de l'orphelinat la destine au pire et pour lui éviter ce  destin l'envoie au couvent. Puis Rose, enceinte sans être mariée, on la sépare de son bébé avant d'être emmenée au couvent. Les trois jeunes femmes vont devenir amies mais vont surtout apprendre à vivre à l'abri du péché... 

La mère supérieure est incarnée par Geraldine McEwan vue dans "Robin des Bois, Prince des Voleurs" (1991) de Kevin Reynolds ou Peines d'Amour Perdues" (2000) de Kenneth Branagh et surtout connue pour avoir jouée le rôle principal de la série TV "Miss Marple" (2004-2007). Les trois nouvelles pensionnaires sont jouées respectivement par Anne-Marie Duff aperçue auparavant dans "Enigma" (2001) de Michael Apted et depuis vue dans "Les Suffragettes" (2015) de Sarah Gavron ou "Sur la Plage de Chesil" (2017) de Dominic Cooke, Nora-Jane Noone vue ensuite dans "The Descent" (2005) de Neil Marshall, "Brooklyn" (2015) de John Crowley ou "Le Clan des Bêtes" (2024) de Christopher Andrews, et Dorothy Duffy apparue plus tard dans "Trauma" (2005) de Marc Evans ou "A l'Heure des Souvenirs" (2018) de Ritesh Batra. Le cinéaste Peter Mullan s'octroie un second rôle, normal pour cet magnifique acteur dont on peut citer chez d'autres les films "Trainspotting" (1996) de Danny Boyle, "My Name is Joe" (1998) de Ken Koach, "Boy A" (2007) de John Crowley ou "Hostiles" (2017) de Scott Cooper, et il retrouve après "Mademoiselle Julie" (1999) de Mike Figgis sa partenaire Eileen Walsh vue plus tard dans "Eyes of War" (2009) de Danis Tanovic, "Les Evadés de Maze" (2017) de Stephen Burke et surtout "Tu ne mentiras Point" (2025) où elle retrouve le couvent. Citons ensuite Mary Murray apparu dans "Adam & Paul" (2004) de Lenny Abrahamson ou "The Wonder" (2022) de Sebastian Lelio, et retrouve après "Crush Proof" (1998) de Paul Tickell l'actrice Eithne McGuinness qui retrouvera Phyllis MacMahon dans "Shaun of the Dead" (2005) de Edgar Wright et "Eamon" (2009) de Margaret Corkery, Britta Smith vue dans "Au Nom du Père" (1993) de Jim Sheridan ou "The Serpent's Kiss" (1997) de Philippe Rousselot, Frances Healy vue ensuite dans "Davin" (2014) de Graham Jones ou "Lulu and the Electric Dreamboat" (2023) de Michael Casey et Paddy Murphy, Eamonn Owens vu dans "Le Général" (1998) de John Boorman ou "Les Cendres d'Angela" (1999) de Alan Parker, Chris Simpson vu plus tard dans "La Guerre des Ombres" (2008) de Karl Skogland ou "'71" (2014) de Yann Demange, Sean Colgan aperçu dans "In Loving Memory" (2000) de Audrey O'Reilly ou "Mon Cher Ennemi" (2001) de Goran Paskaljevic, puis enfin Daniel Costello apparu plus tard dans "Albert Nobbs" (2011) de Rodrigo Garcia ou "Reputation" (2025) de Philip Curry... Le film indique qu'il s'agit d'une histoire inspirée de plusieurs histoires vraies, suite aux quelques témoignages qui ont pu se faire entendre après 1996 mais dela reste encore sporadique ; rappelons que le film va réveiller les consciences mais qu'il faudra attendre 2009 encore avant qu'une commission d'enquête publie un premier rapport accablant. Notons que les critiques contre le film s'avère souvent très partisanes, pro-Eglise à l'évidence et donc autant de mauvaise foi que aveugles. Il est vrai qu'on pourrait pointer du doigt un panel limité de trois histoires, trois jeunes femmes, trois jeunes victimes d'une société empoisonnée par le puritanisme le plus vil et le plus hypocrite surtout.

En effet, le réalisateur a choisi trois destins représentatifs, le cas attendu et logique de la victime de viol mais qui porte le fardeau de la honte, le cas attendu et logique de la grossesse hors mariage, puis le cas le plus intéressant car sans doute plus subjectif de la sexualité sous-jacente qui deviendrait forcément incontrôlable. Le film s'ouvre sur trois faits, trois événements tragiques qui vont sceller le destin de trois femmes emprisonnées malgré elles dans un couvent qui doit permettre d'expier leur faute et sauver leurs âmes. C'est là que sans en dire trop, mais en quelques plans aussi fugaces que précis, Peter Mullan pointe du doigt l'effet pervers du mercantilisme dans le clergé et nous pouvons ici rappeler que l'un des paramètres qui a permis la (trop) lente disparition de ces couvents est justement l'invention du lave-linge ! Le cinéaste choisit une image légèrement granuleuse, un ton terne mais pas grisâtre ou trop triste, l'austérité de ces couvents s'impose logiquement. Le sadisme des religieuses est sans doute un peu trop systématique, peut-on penser qu'il existait tout de même un peu d'humanité ou d'empathie ?! Mais la bêtise n'a d'égal que l'appât du gain, et l'impunité religieuse ouvre forcément à l'abus. Le survie amène à des cas déchirants comme une femme qui accepte son destin après quarante ans entre ces murs, où celle qui après une dernière tentative de s'en sortir décide finalement de devenir elle-même une nonne tortionnaire. Peter Mullan signe un drame tragique et touchant, sans concession et qui reste le seul film de fiction sur le sujet... Incontournable !

Note :                 

18/20