Brigade spéciale

Un grand merci à Éléphant Films pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Brigade secrète » de George Sherman.

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« Ne discutez jamais avec un flic. Répondez simplement à ses questions ! »

Un interne est assassiné au sein de l’hôpital Bellevue de New York. L’affaire semble compliquée et le chef de la police décide de placer l’inspecteur Fred Rowan, qui a officié comme infirmier dans l’armée, sous couverture dans l’établissement. Sa plongée en immersion lui fait courir de nombreux dangers…

« Tout le monde s’inquiétait pour Forster mais personne ne savait ce qui le rongeait »

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Prolifique artisan de la série B américaine comptant plus de cent réalisations à son compteur, le nom de George Sherman reste immanquablement associé au genre du western, auquel il aura consacré la plus grande partie de sa carrière. Et en la matière, il aura dirigé les plus grands acteurs du genre, de John Wayne (« Big Jake ») à Audie Murphy (« Le diable dans la peau ») en passant par Joel McCrea (« Les rebelles »), Van Heflin (« Tomahawk ») ou Jeff Chandler (« A l’assaut du Fort Clark »). Mais surtout, il se distinguera par la place qu’il saura faire aux personnages féminins dans cet univers à la codification très masculine. Ce qui profitera à des actrices au tempérament affirmé comme Yvonne de Carlo (« La fille de prairies », « Le barrage de Burlington », « Calamity Jane et Sam Bass ») ou Maureen O’Hara (« Sur le territoire des Comanches »). Mais en bon exécutant, il saura aussi se confronter, occasionnellement, à d’autres genres cinématographiques, au gré des modes et des demandes de ses employeurs. Au tournant des années 50, on le voit ainsi tour à tour s’essayer au film de cape et d’épée (« A l’abordage ») ou d’aventures parfois exotiques (« Le prince de Bagdad »), au film de guerre et d’espionnage (« Raid secret », « Chasse aux espions »), au drame social (« Ville d’acier ») ou encore au film noir, avec « Haute pègre » en 1948.

« Une balle dans la tête, ce n’est pas l’œuvre d’un dingue. Quand un dingue commence, tout le barillet y passe ! »

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Un genre qu’il retrouve en 1950 avec « Brigade secrète », film noir dans la plus pure tradition hollywoodienne de l’après-guerre. On y suit l’inspecteur Fred Rowan, jeune policier de la brigade secrète spécialisée dans les infiltrations, que ses supérieurs envoient en immersion dans un hôpital pour élucider une série de meurtres qui y ont eu lieu. Un univers froid dans lequel il devra avancer masqué et sans se faire repérer. Une gageure pour un homme sans autre formation médicale que celle d’infirmier pendant la guerre. Fort de son postulat, George Sherman réussit à broder un petit film noir très efficace et surprenant à plus d’un titre. D’une part, de par sa dimension documentaire (très en vogue à l’époque, à l’image des films noirs d’Anthony Mann comme « La brigade du suicide »), qui donne un côté très immersif et très crédible au récit. Et d’autre part, par le choix d’un cadre inhabituel (l’hôpital public) pour un film de ce genre, qui lui permet d’évoquer des problématiques – ici le trafic d’opiacé et son usage non médical – ordinairement retoqué par le code de censure Hays. En filigrane, le film donne à voir une réalité sociale inattendue, marquée notamment par la réelle précarité des internes en médecine des hôpitaux publics américains, pressurisés et mal payés alors qu’ils sont déjà largement endettés par le coût de leurs études. Une réalité sociale qui place tous les personnages – l’inspecteur Rowan compris – face à de nombreux dilemmes moraux. Sur la forme, le cinéaste tire remarquablement parti d’un scénario plutôt bien troussé dont les coupables restent longtemps insoupçonnables de par leur apparence inoffensive et use judicieusement de ses décors (l’hôpital devient à la fois un lieu où l’on sauve des vies et un endroit interlope où l’on se livre à des trafics peu reluisants) et des ambiances nocturnes notamment pour renforcer l’atmosphère froide et oppressante du récit. Injustement méconnu, « Brigade secrète » s’impose au final comme un petit film noir habile, efficace et captivant en ce qu’il montre une réalité sociale méconnue qui mérite amplement d’être (re)découvert.

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Le blu-ray : le film est présenté dans un nouveau Master restauré en Haute-Définition et proposé en version originale américaine (2.0). Des sous-titres français et anglais sont également disponibles.

Côté bonus, le film est accompagné d’une présentation signée par Eddy Moine (11 min.), ainsi que d’une bande-annonce d’époque.

Édité par Éléphant Films, « Brigade secrète » est disponible en combo blu-ray + DVD ainsi qu’en édition DVD depuis le 28 mai 2024. Le film est également disponible en édition simple blu-ray depuis le 10 septembre 2024.

Le site Internet d’Éléphant Films est ici. Sa page Facebook est ici.