Après "A Court d'Enfants" (2015) et "Links of Life" (2019) la réalisatrice Marie-Hélène Roux se lance dans un biopic d'un grand homme encore pas assez conne et reconnu. Elle porte à l'écran l'histoire et le combat du docteur Denis Mukwege (Tout savoir ICI !) Prix Nobel de la Paix 2018 qu'elle a surtout découvert en lisant son livre "Réparer les Femmes, un combat contre la barbarie" (2020) co-écrit justement avec le docteur belge Guy-Bernard Cadière. Née au Gabon, la cinéaste est très attachée à l'Afrique et le sujet ne peut que rajouter à l'intérêt. Le destin de ce médecin hors norme a déjà fait l'objet d'un documentaire avec "L'Homme qui répare les Femmes" (2015) de Thierry Michel. La réalisatrice-scénariste co-signe le scénario avec Jean-René Lemoine qui n'avait plus écrit depuis le scénario de "Moloch Tropical" (2009) de Raoul Peck. Le titre du film signifie littéralement "celui au celle qui soigne" en swahili... Après des études en Europe, le docteur-gynécologue Denis Mukwege revient dans son pays, le Congo ex-Zaïre au milieu des années 90. Après le massacre de Lemera dans son hôpital où il échappe à la mort, il constate que le viol avec mutilation devient une arme de guerre dans toute cette région d'Afrique il décide alors de se spécialiser dans la reconstruction gynécologique des victimes de ces viols barbares. Mais quand il rencontre son confrère belge Guy Cadière, ce dernier redonne un souffle à son engagement et notamment en comprenant qu'il faut aussi faire parler de lui, car faire parler de lui et son engagement permet aussi d'obtenir plus de moyens et de l'aide internationale...
Denis Mukwege est incarné par Isaach de Bankolé, acteur fidèle de Claire Denis et Jim Jarmush vu récemment dans "Black Panther" (2018-2022) et "The Brutalist" (2024) de Brady Corbet, tandis que le docteur Guy Cadière est joué par Vincent Macaigne vu récemment dans "La Venue de l'Avenir" (2025) de Cédric Klapisch mais surtout il retrouve un rôle de médecin pour la quatrième fois après déjà "Les Innocentes" (2016) de Anne Fontaine, "Médecin de Nuit" (2021) de Elie Wajeman et "Maria" (2024) de Pablo Larrain. Citons ensuite Manon Bresch vue dans "Une Zone à Défendre" (2023) de Romain Cogitore ou "Voleuses" (2023) de et avec Mélanie Laurent, Babetida Sadjo apparue dans "Dalva" (2022) de Emmanuelle Nicot ou "Amal, un Esprit Libre" (2023) de Jawad Rhalib, Deborah Lukumuena révélation de l'excellent "Divines" (2016) et vue récemment dans le navet "Toutes pour Une" (2025) tous deux pourtant de la même réalisatrice Houda Benyamina, Soliane Moisset aperçue dans "Nouveau Départ" (2023) de Philippe Lefebvre, Yves-Marina Gnahoua aperçue dans "Plein la Vue" (2019) de Philippe Lyon et tout récemment "L'Intérêt d'Adam" (2025) de Laura Wandel, Nadège Ouedraogo vue surtout dans "La Fille Inconnue" (2016), "Le Jeune Ahmed" (2019) et "Tori et Lokita" (2022) tous des frères Dardennes retrouvant après ce dernier sa partenaire Joely Mbundu qui retrouvera le duo belge pour "Jeunes Mères" (2025), Jennifer Heylen apparue dans "Débâcle" (2023) de et avec Veerle Baetens, Doukaga Kouaba vue dans "Le Panier" (2022) de Patrick Boueme, puis enfin Agathe de La Boulaye vue dans "Cheba Louisa" (2013) de Françoise Charpiat ou "Aline" (2020) de et avec Valérie Lemercier... Le film débute par un discours qui fait son effet, on est à la fois admiratif et pétrifié, le médecin Mukwege/Bankolé impose une stature mais aussi une sorte de fatalisme devant ce parterre de nantis qui s'offrent une bonne conscience à être présent dans la salle. On n'imagine pourtant mal le docteur Mukwege être aussi froid et distant alors qu'il vient chercher des appuis et des aides, c'est la première chose qui frappe. Néanmoins on salue la performance de Isaach de Bankolé et son investissement personnel, l'acteur ayant travaillé dans un hôpital et appris le swahili pour le film. Bon point aussi pour le performance de Manon Bresch et Deborah Lukumuena. Mais très vite on comprend que le film n'est pas un biopic, et qu'il se perd un peu car il ne traite jamais frontalement du sujet mais il se focalise sur l'amitié et le lien qui unit le docteur Mukwege/Bankolé et le docteur Cadière/Macaigne.
Avant leur rencontre le passé de Mukewge est résumé à l'évocation du massacre dans son hôpital précédent, tandis que le futur est résumé en quelques lignes dans un encart à la fin du film. On peut apprécier la sobriété et la pudeur autour des effroyables tortures sexuelles, mais c'est aussi pourtant une évocation très lointaine au point que le film reste très sage et très discret sur les atrocités mais aussi sur les problématiques médicaux qui sont tout autant survolés. Ce n'est nullement un film choc car on ne voit rien de choquant et/ou de trash, ça reste dans l'évocation laissant l'imagination faire le reste ce qui, faut l'avouer, peut aussi être plus perturbant. Nul besoin d'aller dans le spectaculaire ou le voyeurisme mais il y avait un juste milieu à trouver sans doute. Résumer entre autre les viols sauvages uniquement aux mines est simpliste et facile, de telles tortures sont gratuites et sont ceux de sauvages inhumains qui le font parce qu'ils aiment ça et que leur impunité facilite, ni plus ni moins, nul besoin d'autres raisons plus mercantiles. On aurait aimé aussi que le scénario s'attache un peu plus aux victimes plutôt que sur les deux médecins, en tous cas inverser légèrement la dynamique narrative sur ce point. Néanmoins ça reste un hommage mérité pour ce médecin dont le combat est une lutte d'un courage inouï, qui fait écho à celui des victimes et à leur extraordinaire résilience.
Note :