Et viva la révolution!

Par Platinoch @Platinoch

Un grand merci à BQHL Éditions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Et viva la révolution ! » de Duccio Tessari.

« Si vous me donnez quelques hommes et carte blanche pour sillonner le Mexique, ma haine se chargera du reste ! »

Au moment où la révolution met le Mexique à feu et à sang, le prince russe exilé Dimitri Orlovsky apprend l’existence d’un trésor d'un million de dollars en or dont un seul homme connaît l'emplacement, Lozoya, une fripouille qu’il arrache à sa geôle. Bientôt rejoints par Mary O’Donnell, une journaliste irlandaise en quête d’une figure héroïque mexicaine pour son journal, les deux hommes se font passer pour des révolutionnaires de manière à mieux s’approcher du pactole. Ils n’avaient cependant pas prévu l’intervention de deux sérieux compétiteurs : un shérif, qui plus est cousin d’Orlovsky, et un général mexicain préoccupé par ses propres intérêts…

« Si tu n’es pas un optimiste, ne sois pas un bandit ! »

En pleine effervescence depuis les années 50, le cinéma bis se nourrit du cinéma américain dont il revisite à sa sauce les genres les plus emblématiques, leur offrant le plus souvent une forme de prolongation dès lors qu’ils passent de mode à Hollywood. Ce sera vrai avec le péplum d’abord (50’s principalement), puis avec le western (60’s) et enfin avec le film noir (70’s). Ainsi, si le genre mythique et matriciel du western entame une longue agonie en Amérique au début des années 60, il retrouve une réelle vitalité en Italie où une bande de jeunes cinéastes lui redonnent ses lettres de noblesse, signant même quelques chefs d’œuvre du genre comme « Django » ou « La trilogie du dollar ». Mais comme toujours, le genre sera exploité ad nauseam et finira par sombrer dans sa propre caricature à partir des années 70, ne donnant sauf rares exceptions (« Keoma » notamment) plus lieu qu’à des comédies parodiques. C’est dans ce contexte que Duccio Tessari, prolifique cinéaste alors reconnu pour ses péplums (« Les titans ») et ses westerns (« Un pistolet pour Ringo », « Le retour de Ringo ») et qui restera par la suite célèbre de ce côté-ci des Alpes pour ses collaborations avec Alain Delon (« Les grands fusils », « Zorro »), se lance en 1971 dans la réalisation de « Et viva la révolution ! ».

« Mieux vaut être pauvre et vivant que mort et riche ! »

Adaptation d’un roman de Lewis B. Patten – auteur de romans westerns qui ont donné lieu à des adaptations cinématographiques telles que « Une poignée de plombs » de Don Siegel ou « Les géants de l’ouest » d’Andrew V. McLaglen – « Et viva la révolution ! » reprend à son compte un canevas largement usé du western, à savoir la recherche concurrentielle d’un trésor, qui poussera des personnages antagonistes à faire équipe (ou à se trahir perpétuellement, c’est selon !) pour atteindre leur but. Un postulat qui a fait les grandes heures du western italien, et notamment du fameux « Le bon, la brute et le truand » de Sergio Leone. Mais à la différence de ses collègues Leone ou Damiani (on pense notamment à son excellent « El Chuncho ») Tessari fait ici le choix délibéré de dénuer son récit de toute réflexion politique-morale, pour n’en garder que la seule dimension divertissante. Et de fait, le film oscille en permanence entre gravité (l’assassinat gratuit de la sœur et du neveu de Lozoya) et humour burlesque (le héros qui abat trois mitrailleurs d’une seule balle), n’hésitant pas à recourir à des effets scénaristiques un peu éculés, comme les entourloupes que se tendent mutuellement les deux héros, ou le recours à certains personnages très archétypaux (le général cruel et méchant, la crapule au grand cœur ou la journaliste intrépide et bagarreuse). Mais si le spectacle n’est pas déplaisant, force est de constater qu’il demeure limité du fait de l’absence de tout réel enjeu dramatique et d’une succession de gags parfois un peu balourds. On en retiendra néanmoins son chouette casting international (Franco Nero, Eli Wallach, Lynn Redgrave) qui lui confère l’aura d’un western sympathique, à défaut d’être vraiment mémorable, et qui annonce – au même titre que « On l’appelle Trinita » sorti quelques mois plus tôt – la mode des westerns parodiques (tous les Terrence Hill/Bud Spencer, mais aussi des films comme « Mon nom est personne ») et, par ricochet, le déclin et la fin à venir du western italien.

**

Le blu-ray : Le film est présenté dans un Master Haute-Définition, en versions italienne, française et anglaise (toutes 2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

Côté bonus, le film est accompagné d’une Interview de Jean-François Giré, auteur du livre « Il était une fois… le western européen » et réalisateur du documentaire « Sergio Leone, une Amérique de légende » (46 min.).

Édité par BQHL Éditions, « Et viva la révolution ! » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 4 avril 2024.

Le site Internet de BQHL Éditions est ici. Sa page Facebook est ici