Valeur Sentimentale (2025) de Joachim Trier

6ème long métrage du réalisateur-scénariste dano-norvégien Joachim trier après "Reprise (Nouvelle Donne" (2006), "Oslo, 31 Août" (2011), "Back Home" (2015), "Thelma" (2017) et "Julie (en 12 Chapitres)" (2021) et retrouve tout autant de fois son fidèle ami et co-scénariste Eskil Vogt qui est lui-même passé derrière la caméra entre temps avec ses films "Blind" (2014) et "The Innocents" (2021). Joachim Trier a commencé à avoir l'idée lorsque sa propre maison familiale a été mise en vente : "Je me suis d'abord demandé ce que  mes parents et grands-parents avaient traversé dans leur vie, mais j'ai ensuite commencé à envisager les choses du point de vue d'un jeune, du regard d'un enfant, sur la maison dans laquelle il a grandi. Un foyer est un concept hautement subjectif, et cette maison est devenue un autre point de départ pour aborder un récit plus complexe : une réflexion sur la vie et nos attentes." Cette production franco-scandinave a été très bien accueilli au dernier Festival de Cannes 2025 où il a reçu le Grand Prix... Agnès et Nora voient leur père débarquer après de longues années d'absence. Ce dernier, réalisateur de renom, propose à Nora, comédienne de théâtre, de jouer dans son prochain film mais elle refuse avec défiance. Le père propose alors le rôle à une jeune star hollywoodienne, ravivant ainsi des souvenirs de famille douloureux... 

Les deux soeurs sont jouées par Renate Reinsve qui retrouve son réalisateur après  "Oslo, 31 Août" (2011) et "Julie (en 12 Chapitres)" (2021) et vue depuis dans "La Convocation" (2024) de Halfdan Ullmann Tondel, "Another End" (2024) de Piero Messina et "A Different Man" (2024) de Aaron Schimberg, puis Inga Ibsdotter Lilleaas vue dans "A Beautiful Life" (2023) de Mehdi Avaz, tandis que leur père est incarné par Stellan Skarsgard vu récemment  dans le dyptique "Dune" (2021-2024) de Denis Villeneuve et en reprenant pour la 5ème fois son rôle chez Marvel dans "Thor : Love and Thunder" (2022) de Taika Waititi, et retrouve après "Melancholia" (2011) de Lars Von Trier son partenaire Jesper Christensen surtout connu comme M. White dans les 007 de Daniel Craig (2006-2015). Citons ensuite Anders Danielsen Lie qui retrouve son réalisateur pour la 4ème fois mais vu aussi entre temps dans "Bergman Island" (2021) de Mia Hansen-Love ou "Première Affaire" (2024) de Victoria Musiedlak, Cory Michael Smith fidèle de Todd Haynes avec "Carol" (2015), "Le Musée des Merveilles" (2017) et "May December" (2023), Catherine Cohen connue comme scénariste auparavant notamment des films français "La Femme de ma Vie" (1986) et "Indochine" (1992) tous deux de Régis Wargnier avant de jouer ensuite les actrices comme dans "Lovebirds" (2020) de Michael Showalter ou "Maman, j'ai râté l'avion (Ca recommence !)" (2021) de Dan Mazer, Lars Väringer aperçu dans "Astrid" (2019) de Pernille Fischer Christensen ou "Midsommar" (2019) de Ari Aster, puis enfin n'oublions pas la star hollywoodienne Elle Fanning qui avait disparu des grands écrans pour se focaliser sur la série TV "The Great" (2020-2023) avant de revenir avec "Un parfait Inconnu" (2024) de James Mangold... Deux soeurs très différentes, mais liées par une enfance a priori difficile, s'accommodent plus ou moins bien d'un père toujours aussi absent, a priori une fois encore, et qui se retrouvent tous dans le deuil après la mort de leur mère, divorcée depuis longtemps du père devenu par la suite trop peu présent comme on le comprendra bientôt avec insistance. Des deux soeurs, c'est surtout la comédienne reconnue mais célibataire qui semble en vouloir à mort à on paternel, cinéaste non moins reconnu. On pense alors à plusieurs dynasties bien connues, des Depardieu aux Fonda en passant par les Brasseur ou les Douglas aux destins intra-familiaux plus ou moins heureux. Mais vu les réactions violentes et les décisions définitives de l'aînée donc, Nora/Reinsve, on attend un secret de famille terrible ou une tragédie impardonnable mettant en cause le père... ATTENTION SPOILERS !... inceste ou violences conjugales ?! Abandon factuel de la famille et/ou laissant la mère vraiment seule et sans ressource ?! Mais rien de tout ça, il quitte sa femme en laissant la maison, il est souvent et beaucoup absent mais n'est jamais vraiment parti apparemment, et donc ils n'est pas un père abject ou indigne et les deux femmes ont eu une enfance plutôt normale et en tous cas rien dans le film nous laisse envisager une chose terrible, en tous cas pas plus que dans la majorité des familles, et pas pire (loin de là) que celle de votre serviteur !... FIN SPOILERS !... Résultat, jamais on ne réussit à comprendre Nora qui freine des deux pieds sa relation avec son père, même sa soeur la trouve trop "froide" ou trop "sévère". Ainsi on a bien du mal à la comprendre son "jusqu'au-boutisme" et son côté impardonnable alors que le père tend la main, même si il reste parfois maladroit. 

Mais ok, on peut aussi accepter que les deux femmes soient fragiles psychologiquement, et n'ont donc jamais su comment évoluer mettant tout sur la faute d'un père pas assez présent - les absents auront toujours tort. On remarque que le récit est centré sur la maison familiale, imposée d'ailleurs dès l'ouverture du film, et qui reste le fil conducteur du récit jusque dans les flash-backs qui nous donne des indices sur les générations précédentes pour constater, là aussi, que les sujets abordés restent en surface et jamais ne seront vraiment exploités dans le présent. Une sorte de résumé express d'une famille, une chronique qui s'avère très classique car trop universelle pour se démarquer de n'importe quelle autre famille. Là aussi on s'attend donc à un twist, un rebondissement ou un lien tangible avec les flash-backs mais rien n'arrivera. Pourtant, la construction narrative offre des perspectives émotionnelles intéressantes, un prisme familial élargi qui permet surtout d'avoir plus d'empathie pour Gustav/Skarsgard finalement et étonnamment que pour Nora/Reinsve. Joachim Trier signe une chronique familiale émouvante mais pas déchirante ni d'ailleurs touchante à l'exception de quelques passages dont un qui n'est même pas "familial" mais professionnel (Elle Fanning épatante aussi). NIveau émotion on reste trop à l'écart, la faute donc à cette enfance qui n'a rien de difficile, en tous cas pas au point d'en faire une tragédie, il aurait fallu un paramètre plus probant (le passé plus ancien ?!). On reste donc sur notre faim alors que les acteurs sont impeccables, des personnages dont on attend encore le pourquoi du comment, avec un dernier acte d'un optimisme timide mais salvateur et bien présent qui nous offre le sourire et la larme à l'oeil. Donc mise en scène, montage, acting on est dans le grand film, il manque un propos et un sujet plus profond et plus palpable pour nous convaincre pleinement. A conseiller fortement toutefois.

Note :                 

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14/20