Ce film se situe dans la veine des petites comédies populaires et champêtres dont rafollent le cinéaste Philippe De Broca. Ce réalisateur-scénariste est alors à la fin d'une décennie magnifique avec surtout trois gros succès avec Jean-Paul Bemondo, "Cartouche" (1962), "L'Homme de Rio" (1964) et "Les Tribulations d'un Chinois en Chine" (1965). Mais surtout il retrouve à l'écriture son fidèle Daniel Boulanger pour la douzième fois depuis "Les Jeux de l'Amour" (1960) en comptant également leur collaboration sur les films à sketchs "Les Sept Péchés Capitaux" (1962) segment "La Gourmandise", "Les Veinards" (1963) segment "La Vedette" puis "Le Plus Vieux Métier du Monde" (1967) segment "La Révolution Française". Notons que étonnament, les deux compères qui ont travaillé sur 12 films en moins d'une décennie, vont ensuite se séparer durant pas moins de deux décennies ensuite avant une ultime collaboration avec le joli succès "Chouans !" (1988)... Il fait bon vivre à Angevine, village heureux dont le maire fait tout pour préserver le bien être et les vices du monde extérieur. Mais c'est sans compter sur sa fille Marie, belle comme le jour, courtisée ou chérie par tous et surtout par l'instituteur Gabriel mais qui est à la fois trop maladroit et timide pour se lancer malgré les encouragements de ses amis. Mais quand Marie souhaite quitter le village pour une élection de miss le risque de la perdre devient important surtout quand elle est courtisée par un riche américain qui serait prêt à déplacer tout le village de Angevine jusqu'aux Etats-Unis...
Marie est incarnée par Marthe Keller remarquée tout récemment alors dans "Mes Funérailles à Berlin" (1966) de Guy Hamilton et qui retrouve De Broca juste après "Le Diable par la Queue" (1968), tandis que son père très conservateur est joué par l'inénarrable Jean-Pierre Marielle qui retrouve lui aussi son réalisateur après "Un Monsieur de Compagnie" (1964) et vu la même année dans "Le Pistonné" (1970) de Claude Berri. L'instituteur énamouré est joué par Philippe Noiret qui venait de jouer dans deux autres comédies champêtres avec "Alexandre le Bienheureux" (1968) et "Clérambard" (1969) tous deux de Yves Robert et qui retrouvera De Broca plus tard dans "Tendre Poulet" (1978), "On a volé la Cuisse de Jupiter" (1980) et "L'Africain" (1983). Le riche américain est interprété par le méconnu Bert Convy, apparu essentiellement à la télévision et aperçu au cinéma dans seulement quelques films dont "Un Baquet de Sang" (1959) de Roger Corman, "Les Faux-Durs" (1977) de Michael Ritchie ou "L'Equipée du Cannonball" (1981) de Hal Needham. Citons ensuite Valentina Cortese aperçue dans "La Maison sur la Colline" (1951) de Robert Wise ou "Juliette des Esprits" (1965) de Federico Fellini, Henri Crémieux apparu dans "Remorques" (1941) de Jean Grémillon, "Le Septième Juré" (1962) de Georges Lautner ou "Les Demoiselles de Rochefort" (1967) de Jacques Demy, Fernand Gravey aperçu dans "Paradis Perdu" (1940) de Abel Gance ou "La Ronde" (1950) de Max Ophüls, Colin Drake apparu dans "Charade" (1963) de Stanley Donen ou "Les Grandes Vacances" (1967) de Jean Girault, François Périer un des plus grands seconds rôles français entre les années 30 et 70 avec toutefois un rôle principal dans "Les Nuits de Cabiria" (1957) de Federico Fellini et un précédent avec De Broca pour "L'Amant de Cinq Jours" (1961), Albert Michel second prolifique dont "Madame de..." (1953) de Max Ophüls, "La Traversée de Paris" (1956) de Claude Autant-Lara ou quand il retrouvera De Broca pour "Julie Po-de-Colle" (1977), Olga Valery aperçue dans "On Purge Bébé" (1931) de Jean Renoir ou "Anastasia" (1956) de Anatole Litvak, Didi Perego remarquée dans "Kapo" (1960) de Gillo Pontecorvo et "La Grande Pagaille" (1960) de Luigi Comencini et qui retrouvera De Broca dans "Chère Louise" (1972), puis citons d'autres grandes gueules et seconds couteaux comme Raymond Pierson et les fidèles de De Broca comme Lucien Raimbourg, Bernard Musson ou Marc Dudicourt... Il s'agit d'abord pour De Broca d'afficher les belles couleurs et les belles qualités du vivre à la française, les joies des loisirs bucoliques, le bistrot, les amis, le temps qui s'écoule paisiblement et en prime une beauté fraîche comme cure de jouvence pour les vieux briscards du village. Un sous-genre en soi dont le successeur ne sera qu'autre que Jean Becker avec "Les Enfants du Marais" (1999) ou "Effroyables Jardins" (2003). De Broca offre une image d'épinal truculente qui va vite s'effriter quand la belle jouvencelle s'apprêtent à quitter le nid franchouillard pour un riche et exubérant ricain.
C'est le premier jalon amusant, les gaulois haut en couleur comme le père gauchiste conservateur Jean-Pierre Marielle, le militaire retraité Fernand Gravey ou le chef d'orchestre lunaire François Périer, qui paraissent tous aussi sympathiques que béats devant la jeune Marie/Keller, une empathie joviale ambiante qui permet d'atténuer le petit côté libidineux des vieux dont s'extrait difficilement un instituteur qui reste beaucoup trop âgé pour elle. Mais face à eux, qui portent haut les couleurs franchouillardes et gauloises, le prétendant n'est pas en reste, avec la caricature mégalo du riche américain prêt à tout pour réussir au point où on frôle l'overdose. Aussi exubérant qu'irritant on se moque devant la bêtise du voyage d'un hélico de la France jusqu'à New-York à la vitesse de la lumière. Ce choc des cultures sonne comme un message surtout, Marie/Keller ne doit pas quitter son village et prendre pour époux l'homme de son village, ce qui renvoie à un message plus politique qu'on pourrait le croire à savoir "ne vendez pas les fleurons de la France à l'étranger" ; un message qui fait encore écho aujourd'hui. Mais heureusement, malgré un propos sérieux cette comédie d'une fantaisie qui flirte avec l'absurde au ton inoffensif et presque mièvre. Un petit moment léger et acidulé.
Note :
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