Cinéma | ÉVANOUIS – 15,5/20

Par Taibbo

De Zach CreggerAvec Josh Brolin, Julia Garner, Alden Ehrenreich

Chronique : Le salut d’Hollywood viendra-t-il du cinéma de genre ?
Après les succès surprise (et mérité) de Sinners, le film vampirique de Ryan Coogler, la sensation de l’été est un drame horrifique sacrément bien foutu.
Divisé en chapitres empruntant chacun le point de vue d’un des personnages clé de l’intrigue, Évanouis profite pleinement des opportunités narratives qu’offre sa structure éclatée pour raconter une histoire captivante, cohérente de bout en bout, effrayante bien sûr, mais suscitant aussi l’empathie pour ses protagonistes. Ce puzzle dont les pièces s’assemblent progressivement permet au réalisateur Zach Cregger de traduire la détresse collective d’une communauté face au drame mystérieux qui la frappe, révélant au passage à travers leurs réactions une partie du visage de l’Amérique d’aujourd’hui.
Grâce aux révélations que nous apporte chaque segment, on appréhende mieux la psychologie de ceux qui les incarne. L’enquête progresse au rythme de nos rencontres avec les personnages, en même temps que les éléments horrifiques du scénario se dévoilent. Malgré la multiplication des sous-intrigues, Cregger ne perd jamais de vue que la disparition mystérieuse de ces 17 enfants reste le cœur du récit, un récit auquel on s’accroche de plus en plus en espérant une seule chose, que le dénouement soit à la hauteur de ce qui nous y a amené. Avouons-le, ce n’est pas tout à fait le cas. Mais c’est aussi parce que Cregger a déployé jusqu’à là une mise en scène d’une maitrise épatante, si bien qu’on n’est pas loin de penser que le chemin pour y arriver importe plus que la résolution elle-même.
Dans sa manière de raconter, Cregger ne laisse rien au hasard, faisant preuve d’une technique irréprochable (travelling, zoom, plans fixe..), d’un sens du récit exceptionnel et d’un vrai talent pour traduire l’angoisse et l’incompréhension autant que la peine.
Que ce soit dans la diversité et l’intelligence de ses plans, l’usage parcimonieux des codes du film d’horreur, le très juste dosage des effets dramatiques, ou le soutien d’une musique originale parfaitement adaptée, Evanouis donne l’impression d’une œuvre parfaitement aboutie. On remarquera également le recours bienvenu à un humour presque grotesque pour désamorcer le malaise et l’inconfort que peuvent provoquer certaines scènes.
Zach Cregger démontre une créativité et une singularité qu’on n’avait pas observé depuis longtemps au sein des studios US. Un peu comme quand Nolan faisait Memento, Villeneuve Incendies ou, si on remonte encore plus loin, Shyamalan Le 6ème sens.
On sort de Evanouis avec la conviction d’avoir vu quelque chose d’original, de brillant, un film profondément et durablement marquant pour le cinéma d’horreur. Et l’éclosion d’un réalisateur qui va compter à l’avenir.

Synopsis : Lorsque tous les enfants d’une même classe, à l’exception d’un, disparaissent mystérieusement la même nuit, à la même heure, la ville entière cherche à découvrir qui — ou quoi — est à l’origine de ce phénomène inexpliqué.