L'idée est avant tout celle de Calder Willingham, scénario auréolé de ses collaborations avec un certain Stanley Kubrick avec lequel il a co-écrit "Les Sentiers de la Gloire" (1957), "Spartacus" (1960) et même "Le Vengeance aux Deux Visages" (1961) qui sera finalement réalisé par son acteur Marlon Brando après des différents artistiques, mais il a aussi signé "Les Vikings" (1958) de Richard Fleischer. Le scénariste adapte le roman éponyme, en V.F. "Mémoires d'un Visage Pâle" (1964) de Thomas Berger et le projet est proposé à Arthur Penn, remarqué par le western "Le Gaucher" (1958) et sortant du succès "Miracle en Alabama" (1962) mais entre temps le réalisateur est viré du film "Le Train" (1964) de John Frankenheimer et tandis que son film "Mickey One" (1965) est un échec les studios jugent le coût d'un tel film trop élevé. Le scénario est alors mis dans un tiroir, Calder Willingham signe alors le scénario de "Le Lauréat" (1967) de Mike Nichols tandis que le réalisateur atteint les sommets avec "La Poursuite Impitoyable" (1966) et surtout avec "Bonnie and Clyde" (1967) qui permet aux deux hommes de relancer le projet. Arthur Penn, considéré à Hollywood comme un "intellectuel" ce qui lui a valu quelques déboires (films 1964-1965) va en profiter justement pour instiller des éléments qui vont renvoyer à la guerre du Vietnam... Âgé de 121 ans, Jack Crabb est le seul survivant du massacre de Little Big Horn. Il est interviewé par un jeune journaliste sur son incroyable destin ce que le vieil homme va s'empresser de raconter. Jeune il est enlevé par les cheyennes qui l'adoptent. Les aléas de la vie font qu'ils doit quitter sa tribu, il va alors faire plusieurs métiers dont pistolero, connaître plusieurs femmes parfois à l'insu de son plein gré, revenir chez les cheyennes, et vivre le drame de Little Big Horn...
Le rôle titre est incarné par Dustin Hoffman révélé dans "Le Lauréat" (1967) justement et confirmé avec l'oscarisé "Macadam Cowboy" (1969) de John Schlesinger. Le héros séducteur va connaître plusieurs femmes dont Kelly Jean Peters vu ensuite dans "La Kermesse des Aigles" (1975) de George Roy Hill, Carole Androsky qui aura aussi une carrière discrète dont on peut citer "Le Pic de Dante" (1997) de Roger Donaldson, et surtout Faye Dunaway qui retrouve son réalisateur après "Bonnie and Clyde" (1967) et devenue une star avec "L'Affaire Thomas Crown" (1968) de Norman Jewison, "L'Arrangement" (1969) de Elia Kazan et "Portrait d'une Enfant Déchue" (1970) de Jerry Schatzberg. Citons ensuite Peau de la Vielle Hutte incarné par Chief Dan George figure importante de la culture amérindienne devenu acteur par accident qui marquera encore le grand écran avec surtout "Josey Wales, Hors-la-Loi" (1976) de et avec Clint Eastwood, Martin Balsam second rôle de haut vol avec par exemple "Douze Hommes en Colère" (1957), "Psychose" (1960) de Alfred Hitchcock ou "Hombre" (1967) de Martin Ritt, Richard Mulligan apparu dans "Les Liaisons Coupables" (1962) de George Cukor ou "Les Géants de l'Ouest" (1969) de Andrew V. McLaglen, Jeff Corey second couteau de talent vu dans "Les Tueurs" (1946) de Robert Siodmak ou "Les Démons de la Liberté" (1947) de Jules Dassin avant de devenir victime du Maccarthysme, disparaêtre des écrans, devenir un prof de comédie recherché et renommé avant de revenir au cinéma avec entre autre "Le Kid de Cincinnati" (1965) de Norman Jewison, "Cent Dollars pour un Shérif" (1969) de Henry Hathaway ou "Butch Cassidy et Le Kid" (1969) de George Roy Hill, et retrouve après "L'Etrangleur de Boston" (1968) de Richard Fleischer son partenaire William Hickey remarqué ensuite dans "L'Honneur des Prizzi" (1985) de John Huston et "Le Nom de la Rose" (1986) de Jean-Jacques Annaud, Amy Eccles vue ensuite dans "Fureur Apache" (1972) de Robert Aldrich ou "La Taverne de l'Enfer" (1978) de et avec Sylvester Stallone, Thayer David vu auparavant dans "L'Ennemi Public" (1957) de Don Siegel ou "Voyage au Centre de la Terre" (1959) de Henry Levin, M. Emmet Walsh qui retrouve Dustin Hoffman après "Macadam Cowboy" (1969) puis Arthur Penn après "Alice's Restaurant" (1969) qui va devenir un second rôle remarqué dans les années suivantes avec par exemple "Serpico" (1973) de Sidney Lumet ou "Blade Runner" (1982) de Ridley Scott, puis enfin James Anderson grand second rôle qui retrouve son réalisateur après "La Poursuite Impitoyable" (1966) et qui tourne son dernier film juste après "Un Nommé Cable Hogue" (1970) de Sam Peckinpah, ses deux derniers films sortant à titre posthume... Le film débute avec la logique rencontre entre le journaliste et le très vieil homme Jack Crabb pour débuter l'entretien, et déjà on savoure le bonhomme, un vieux bonhomme dont on déguste la malice et un certain narcissisme délicieux et inoffensif au point où, d'emblée, on se dit qu'il a tout de l'affabulateur mais il existe bel et bien des destins hors normes et on pense alors, si on reste dans le contexte du far west, un contemporain qui a vécu 110 ans, Nino Cochise (1874-1984) petit fils du fameux chef apache dont il a repris le nom. On plonge donc très vite dans un long flash-back où un jeune garçon se fait kidnappé par les cheyennes avant d'être élevé comme un des leurs. Le ton est donné avec une atmosphère proche de la fable, on est clairement dans un surréalisme caricatural du far-west au milieu de quoi l'acteur Dustin Hoffman cabotine comme rarement il le fera. Evidemment le choix de la comédie absurde est un risque surtout quand on touche à certains mythes à la gloire de l'Amérique ou qu'on fait en sorte de faire un parallèle entre passé et présent.
D'abord le récit s'applique à déformer, réécrire, pasticher ou parodier les paramètres généralement établis sur la conquête de l'Ouest souvent pour s'en moquer plus ou moins sérieusement mais sans occulter pour autant les drames inhérents à tout ce que peut représenter une conquête. Ainsi Crabb/Hoffman croise de grands noms comme le tireur Wild Bill Hickok et surtout le général Custer qui est montré imbu de sa personne et anti-indien primaire mais sans omettre un courage unique qui sera d'ailleurs saluer par le chef sioux Crazy Horse. Le plus intéressant reste le personnage principal, témoin un peu simplet de la conquête de l'Ouest qui subit bien malgré lui les événements qui viennent à lui à l'insu de son plein gré, jusqu'à son pouvoir de séduction inné (dont avec une épouse nymphomane joyeuse jouée par Faye Dunaway !) qui le surprend lui-même ! Mais surtout son destin lui permet d'accumuler les pans de vie aussi farfelus que décalés avec comme ligne directrice la double identité de Little Big Man qui renvoie aux personnes métissées et/ou à double éducation culturelle comme l'anti-héros le précise : "C'était très démoralisant : quand ce n'était pas un indien qui voulait me tuer parce que j'étais blanc, c'était un blanc qui voulait me tuer parce que j'étais indien." Le film est aussi un film de son époque, où l'intelligence de Arthur Penn permet de percevoir dans l'histoire un parallèle avec la guerre du Vietnam, les peaux-rouges étant le pendant des vietcongs, tandis que les américains restent les mêmes aveugles belliqueux, on peut donc y voir un film visionnaire puisque Little Big Horn est une victoire indienne. La succession rapide et nombreuse des rebondissements dans la vie de Crabb/Hoffman donne parfois l'impression d'un film à sketchs un peu long mais le récit ne manque ni de fantaisie ni de lyrisme ni d'ironie avec une alternance des genres et des émotions qui fotn de ce film une oeuvre assez unique en son genre. A conseiller et à voir.
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