D'abord acteur vu dans "L'Ange Bleu" (1930) de Josef Von Sternberg et "À l'Ouest Rien de Nouveau" (1930) de Lewis Milestone, Wolfgang Staudte passe ensuite à la réalisation avec entre autre "Bonjour l'Acrobate" (1943) ou "J'ai rêvé de Toi" (1944) et abordera souvent la période nazie surtout après-guerre comme "J'ai trahi Hitler" (1949) ou "Je ne voulais pas être un nazi" (1960), mais c'est surtout avec ce nouveau projet, le premier film allemand produit après-guerre et le premier Trümmerfilm, dit "films de décombres" qui sera suivi de classiques comme "Allemagne Année Zéro" (1948) de Roberto Rosselini, "Morituri" (1948) de Eugene York ou "La Chair" (1949) de Josef Von Baky sans compter le plus hollywoodien "La Scandaleuse de Berlin" (1948) de Billy Wilder. Le cinéaste a d'abord voulu travailler avec les Alliés mais devant le peu d'entrain des américains et des britanniques il s'est tourné vers les soviétiques qui lui donnent des moyens plutôt importants au vu du contexte social et politique particulièrement complexe. Wolfgang Staudte, réalisateur-scénariste co-signe le scénario avec son frère Fritz Staudte qui écrira aussi avec son frère "Le Sujet de l'Empereur" (1951), puis avec Eberhard Keindorff et Johanna Sibelius qui écriront en duo "Lilas Blancs" (1953) de Hans Deppe et "Toujours Au-Delà" (1964) de Alfred Vohrer... Fin de la Seconde Guerre Mondiale, 1945, Suzane Wallner est une survivante des Camps de la Mort et revient à son domicile à Berlin mais découvre que son logement est habité par le docteur Hans, un médecin devenu dépressif et alcoolique. Bon gré mal gré, la colocation s'organise. Mais au fur et à mesure qu'ils se rapprochent Hans retrouve son officier supérieur lorsqu'ils étaient à la Wehrmacht et à qui il voue une haine farouche depuis un massacre. Désormais cet officier s'avère un homme charmant, apprécié de Suzane mais il reste obnubilé par le châtiment que cet officier mériterait d'après lui...
Suzane est incarnée par Hildegard Knef aperçue dans "Sous les Ponts" (1945) de Helmut Kaütner, qui va devenir la première star allemande d'après-guerre vu ensuite dans "Le Traître" (1951) de Anatole Litvak, "Les Neiges du Kilimandjaro" (1952) de Henry King, "Landru" (1963) de Claude Chabrol ou "Fedora" (1978) de Billy Wilder. Le docteur Hans est joué par Ernst Wilhelm Borchert vu dans "L'Eternelle Mélodie" (1943) de Gunther Rittau et ensuite dans "Héros en Blanc" (1954) de Rolf Hansen ou "La Peau d'un Espion" (1960) de Harald Braun, tandis que l'ex-officier est interprété vu plus tard dans "L'Affaire Blum" (1948) de Erich Engel, "Barbe-Bleue" (1951) de Christian-Jaque ou "La Fille Rosemarie" (1958) de Rolf Thiele, l'épouse de ce dernier est jouée par Erna Sellmer vue dans "Les Mains Libres" (1939) de Hans Schweikart ou "Les Comédiens" (1941) de P.W. Pabst et plus tard retrouvera dans "Ingrid" (1955) de Geza Von Radvanyi sa partenaire Elly Burgmer. Citons ensuite Hilde Adolphi remarquée dans "Vive la Musique" (1942) de Helmut Kaütner, Marlise Ludwig vue dans "Faux Départ" (1936) de Karel Lamac, "La Jeune Fille aux Lilas" (1940) de Arthur Maria Rabenalt puis retrouvera son réalisateur Wolfgang Staudte pour "J'ai rêvé de Toi" (1944) à l'instar de sa partenaire Ursula Krieg qui elle retrouvera son réalisateur dans "les Aventures de Monsieur Fridolin" (1948), "Die Treppe" (1950) et "Madeleine et le Légionnaire" (1958), Robert Forsch vu dans "La Neuvième Symphonique" (1936) de Robert Siodmak ou "La Lutte Héroïque" (1939) de Hans Steinhoff, Albert Johannes apparu dans "La Grande Aventure" (1941) de Herbert Selpin ou "J'ai trahi Hitler" (1949), Wolfgang Dohnberg vu dans "La Citadelle de varsovie" (1937) de Fritz Peter Buch ou "Un Crime Stupéfiant" (1941) de Herbert B. Fredersdorf, et enfin Ernst Stahl-Nachbaur vu dans "Tout our l'Or" (1923) de Reinhold Schünzel, "M le Maudit" (1931) de Fritz Lang ou "Je t'aimerai Toujours" (1941) de Karl Anton... Les premières minutes annoncent en quelques images, quelques plans le contexte terrible allant d'une affiche presque anachronique illustrant "La belle Allemagne" à un plan sur les ruines de Berlin. Si ces quelques minutes sont d'un symbolisme efficace c'est sans doute un peu court, voir simpliste, en effet le tournage a essentiellement eu lieu dans les studios DEFA à Postdam et Berlin ce qui est décevant on aurait aimé plus plans des véritables ruines de la ville à l'instar, paradoxalement, du hollywoodien Billy Wilder pour "La Scandaleuse de Berliné (1948) qui n'a pas tourné directement à berlin mais qui a filmé la ville en amont en 1947 pour les intégrer ensuite dan son film. Par là même, on s'étonne de voir aussi peu de monde dans les rues, les survivants, la pauvreté, la détresse environnante, et on est d'ailleurs surpris de voir une rescapée des Camps revenir aussi en forme, belle, bien faite et sans soucis particulier à première vue.
L'idylle est convenue, peu intéressante en elle-même mais la personnalité dépressive du médecin s'impose comme le fil conducteur du récit avec un petit suspense qui s'installe jusqu'à ce qu'on comprenne le grief du médecin envers son ancien supérieur... ATTENTION SPOILERS !... Mais ce "petit" massacre est sûrement un parmi tant d'autres, comment croire que soudain cet ordre aurait été le premier ?! Et pourquoi celui-ci serait déclencheur ?! On ne sait pas si ce docteur a continué la guerre et combien de temps, de nombreux détails sur ce docteur nos manque pour comprendre réellement l'homme alors que le jeu de l'acteur comme son physique freine encore plus notre éventuelle empathie... FIN SPOILERS !... Le plus intéressant est tout le travail psychologique sur les personnages, en abordant les thématiques de culpabilité et de pardon d'abord, puis de vengeance ou de justice sur la conclusion du film appelant à une réconciliation nationale tout en ouvrant la porte aux procès dont Nuremberg sera la symbole ultime. Précisons que la fin a été modifié par ordre de la censure soviétique afin de "na pas nourrir trop violemment certains ressentiments". On salue donc l'ambition de ce drame précurseur qui reste évidemment bien moral mais qui s'explique par un contexte post-39-45 spécifique. On aime aussi ce magnifique Noir et Blanc, dans un style qui mêle le néaréalisme italien ("Allemagne Année Zéro"...) et expressionisme allemand (cinéma pré-nazisme surtout). Un film parfois simpliste ou maladroit sur son propos, mais à la mise en scène aussi élégante que audacieuse. Un film à conseiller.
Note :
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