Cinéma | ENZO – 14/20

Cinéma ENZO 14/20

De Laurent Cantet, Robin Campillo
Avec Eloy Pohu, Pierfrancesco Favino, Élodie Bouchez, Maksym Slivinskyi

Chronique : Enzo est un Coming-of-Age (film sur le passage à l’âge adulte) certes classique, mais qui s’avère beau et lumineux comme un couché de soleil sur la French Riviera.
Le récit de cet éveil au désir est construit pas à pas, subtilement, sans fracas ni grands élans dramatiques, à peine deux ou trois coups de sang. A travers la maladresse et les provocations d’Enzo, il capture le mal-être adolescent, ce sentiment de ne pas être à sa place, de chercher l’attention (ou à faire diversion ?) mais aussi le désarroi de parents déboussolés, enfermés dans leur certitude un peu bourgeoise d’avoir tout fait pour leurs enfants et désarmés devant ce fils qui rejette cette vie « parfaite » qui lui est offerte.
Incarnée avec beaucoup de justesse par la candeur du jeune Eloy Pohu et la virilité sensible (et sexy) de Maksym Slivinskyi, loin des clichés de masculinité toxique, l’histoire de Enzo et Vlad a des airs lointains et modernes de Call me by Your Name, la dimension sociale en plus. La douceur d’Elodie Douchez et le regard sombre et inquiet de Pierfrancesco Favino donnent de la crédibilité et de la nuance aux parents, là encore en s’assurant ne jamais tomber dans la caricature.
Il faut aussi parler de la délicatesse de la mise en scène, du soin apporté à la photographie et aux effets de lumière. Enzo nous inonde de superbes images du sud de la France, illustre son récit de magnifiques paysages de la Côte d’Azur. On retrouve la pâte de Campillo (120 BPM, L’île rouge), moins naturaliste, plus pictural et sensuel que Cantet, réalisateur social au style plus documentaire (Entre les murs, L’Atelier). Car le film vaut aussi pour sa genèse, Campillo récupérant Enzo à la mort de Cantet, faisant du film un témoignage poignant du lien amical et artistique entre les deux réalisateurs. En résulte une œuvre hybride et belle. La capacité de Cantet à saisir le réel et atteindre une certaine vérité rencontre le cinéma plus brut, peut-être plus radical de Campillo, mais les deux ont en commun de savoir capter ce qu’expriment des regards ou des corps qui se meuvent. Intime et gracieux.

Synopsis : Enzo, 16 ans, est apprenti maçon à La Ciotat. Pressé par son père qui le voyait faire des études supérieures, le jeune homme cherche à échapper au cadre confortable mais étouffant de la villa familiale. C’est sur les chantiers, au contact de Vlad, un collègue ukrainien, qu’Enzo va entrevoir un nouvel horizon.