Encore une récompense cannoise pour les frères DardenneLes frères Dardenne ont eu la bonne idée de sortir leur film le même jour que la présentation à Cannes dans la sélection officielle. Et quel plaisir de pouvoir le voir dès le lendemain de la diffusion cannoise, et un plaisir renouvelé de le voir repartir avec un prix, celui du scénario ; qui fait de ce duo le plus primé de Cannes avec un 10ème film qui a reçu les faveurs de la sélection. Remporter ce prix est une gageure tant ce long métrage prend de sérieux accents de documentaire dans sa première moitié mais qui finit par nous emporter dans sa fiction chorale dans sa seconde moitié. Habitué avec les Belges d’être collé aux basques d’un individu devant relever de nombreux défis et obstacles pour vivre, survivre, exister ; là, c’est une première, ils décident de suivre le parcours de quatre jeunes mères ou de jeunes enceintes ,elle-même abandonnées où délaissées par leur propre génitrice. Tout en donnant naissance à un très jeune âge, elles se débattent avec leur propre histoire maternelle compliquée ou inexistante et avec une histoire à construire seule, à deux ou à trois. Plongé dans une maison maternelle hébergeant de jeunes mamans ou futures mamans, on suit une institution qui fonctionne bien, pour une fois chez les Dardenne. Elles y apprennent à devenir mères et travaillent leur projet de vie ; cette première partie, documentaire, pose un cadre qui se veut rassurant pour le spectateur mêmes si les histoires s’avéreront dures et compliquées. Et ces destins entrelacés dans un mode très concentré (90’ de film) nous font littéralement chavirer. Avec beaucoup de tact et d’intelligence, ils embrassent pleinement un sujet jamais traité au cinéma ; et surtout jamais comme ceci. Creusant leur sillon d’un cinéma documentaire et naturaliste, ils nous prennent à contre-pied avec des horizons possiblement heureux, chose rare dans leurs films ; un film lumineux. Le film fonctionne aussi, car comme souvent, ils ont la capacité à dénicher de jeunes talents plus vrais que nature ; la direction d’acteurs fait le reste, on a l’impression que ces jeunes filles pétries de talent jouent leurs propres rôles. Profitons-en pour rendre un hommage à une actrice belge que j’aimais beaucoup et qui nous a quitté il y a quelques mois ; Emilie Dequenne avait été découverte et révélée par les Dardenne avec « Rosetta », leur première Palme et le prix d’interprétation pour la jeune actrice d’alors.
Julien Rousset : « Un sommet de simplicité et de profondeur. C’est un tort de réduire ce film, dont certains plans sont inoubliables, à sa dimension quasi documentaire. C’est bien par sa dramaturgie, son histoire ponctuée de rebondissements, et l’étoffe de ses personnages qu’il émeut. »
Toujours un plaisir de voir un film des Dardenne ; mais là, après des films moins convaincants, ils frappent un grand coup.
Sorti en 2025
Ma note: 19/20