Civil War (2024) de Alex Garland

D'abord romancier devenu scénariste, en adaptant ses propres livres "La Plage" (2000) et "Sunshine" (2007), puis entre temps juste le scénario de "28 Jours plus Tard" (2002) tous du réalisateur Danny Boyle, Alex Garland est passé de l'autre côté de la caméra à son tour et s'est déjà fait remarqué avec "Ex Machina" (2014), "Annihilation" (2017) et "Men" (2022). Cette fois il a imaginé une nouvelle guerre civile soudaine et incompréhensible sur le propre sol des Etats-Unis, et si le pays avait déjà été saigné au coeur durant la Guerre de Sécession on se doute que cette fois c'est le scandale de la prise du Capitole par des sympathisants de Donald Trump en janvier 2021 qui a dû titiller le réalisateur-scénariste qui ne fait pourtant pas directement le lien, précisant que l'histoire se déroule "à un moment indéterminé dans le futur - juste assez loin pour que j'ajoute une vanité", ajoutant qu'il s'agit d'une "allégorie de science-fiction à notre situation difficile actuellement polarisée". Le cinéaste a voulu également rendre hommage aux photographes de guerre, donnant d'ailleurs à deux de ses personnages le nom des reporters Lee Miller et Don McCullen. Avant le tournage, le cinéaste a demandé à ses acteurs de regarder quelques films, dont le documentaire "Under the Wire" (2018) de Christopher Martin et "Requiem for a Dream" (1985) de Elem Klimov. Malgré l'ambition le film a été doté de 50 millions de dollars ce qui est étonnamment mince pour un telle production hollywoodienne. Film interdit au moins de 12 ans... Une équipe de journaliste voyage à travers les Etats-Unis englouties dans une Guerre Civile qui semble de plus en plus incontrôlable. Le gouvernement est une dictature qui fait face à des milices, le Texas et la Californie se son alliés contre toute attente...  

En têtes d'affiche citons Kirsten Dunst qui a fait une pause après "Les Proies" (2017) de Sofia Coppola et "Woodshock" (2017) de Kate et Laura Mulleavy, de retour avec le superbe "The Power of Love" (2021) de Jane Campion dans lequel elle jouait aux côtés de son conjoint et partenaire Jesse Plemons qui est au contraire très prolifique avec récemment "Affamés" (2021) de Scott Cooper, "Contrecoups" (2022) de Charlie McDowell et "Killers of the Flower Moon" (2023) de Martin Scorcese, et retrouve après "Vice" (2018) de Adam McKay sa jeune partenaire Cailee Spaeny vue dans "Sale Temps à l'Hôtel El Royale" (2018) de Drew Goddard ou "The Craft : les Nouvelles Sorcières" (2020) de Zoe Lister-Jones, avant d'incarner "Priscilla" (2023) de Sofia Coppola, rôle qu'elle aurait justement obtenue après avoir été suggérée par Kirsten Dunst à son amie Sofia Coppola. Citons ensuite Wagner Moura remarqué dans "Avril Brisé" (2001) de Walter Salles et surtout dans le dyptique "Troupe d'Elite" (2007-2010) et vu ensuite dans "Elysium" (2013) de Neill Blombkamp ou "The Gray Man" (2022) des frères Russo, Stephen McKinley Henderson vu récemment dans le dyptique "Dune" (2021-2024) de Denis Villeneuve ou "Beau is Afraid" (2023) de Ari Aster, Karl Glusman vu dans "The Neon Demon" (2016) de Nicolas Winding Refn, "Nocturnal Animals" (2017) de Tom Ford ou "God is a Bullett" (2023) de Nick Cassavetes, Jonica T. Gibbs vu dans "Past Lives" (2023) de Celine Song ou "DogMan" (2023) de Luc Besson, puis enfin Snoya Mizuno actrice fétiche de Alex Garland depuis le premier film et vue entre temps "La La Land" (2016) de Damien Chazelle, "La Belle et la Bête" (2017) de Bill Condon ou "Crazy Rich Asians" (2018) de Jon M. Chu... Le film débute directement dans le vif du sujet, la Guerre Civile a commencé depuis un moment et est même sur le point de se finir, et les reporters courent dans tous les sens pour obtenir le cliché ultime. Le petit groupe n'est pas très original voir bien éculé, la vétérante aigrie, son collègue plus déluré, l'ancien sage et la jeune aux dents longues mais ça ne sera évidemment pas si facile. Bref, ce n'est pas sur les personnages qu'on va s'accrocher. D'un point de vue géo-politique l'idée est déjà plus judicieuse, à savoir laisser le spectateur dans l'expectative et le laisser fantasmer sur l'inspiration trumpienne. Par contre, l'alliance entre Californie et Texas n'est pas si improbable, les deux états restent culturellement très différents mais sont aussi les plus grands, parmi les plus peuplés et singuliers des Etats-Unis et surtout les plus riches. Rien que par l'économie et leur détachement politique envers les états de l'Est sont des accointances pas si illogiques. 

Le scénario évolue de façon trop neutre, pas obligatoirement sur la question géo-politique mais même sur les rencontres et/ou les combats. Aucun parti pris que ce soit sur le fond ou sur la forme et finalement on suit quatre reporters sur un récit qui accumule juste des mini-séquences ; ainsi on a la rencontre, le premier choc, la première crise, le charnier, le drame personnel, l'assaut final... Le réalisateur choisit un angle quasi naturaliste bien aidé par les intermèdes du cliché en noir et blanc, symbole du photographe de guerre en action. On comprend l'hommage au métier, et puis on se rappelle aussi des photos chocs dégueulasses parfois primées (la dernière en date suite à l'attaque de 7 octobre, no comment !), et qui nous rappelle surtout qu'il y aurait beaucoup à dire sur la réelle morale d'une profession nécessaire mais pas toujours éthique. On apprécie par contre l'absence de bravoure éhonté ou d'héroïsme plus ou moins romanesque, la guerre c'est sale, que ce soit d'un côté ou de l'autre. Notons que l'assaut final a été en grande partie chorégraphier avec l'aide du conseiller tehcnique Ray Mendoza, ancien des Navy Seal qui a fait d'ailleurs appel à une cinquantaine de collègues pour incarner les soldats et donner une véritable cohérence et crédibilité à toute cette dernière partie. En conclusion, le film n'est assurément pas la claque attendue, le séquençage des scènes coupent toute fluidité, et surtout les personnages des quatre reporters sont des clichés inintéressants même si les acteurs sont excellents. Pour la critique américaine et le chaos on préfère la Guerre Civile sous 24h de la saga "American Nightmare" (2013-2021), plus surréaliste sans doute mais plus audacieuse dans le message frontal. 

Note :                 

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12/20