Sculpter son récit – 1

Explorons les éléments constitutifs essentiels d'un récit, à savoir l'intrigue principale et les enjeux narratifs. L'intrigue principale représente le cœur de l'histoire, le conflit ou la problématique centrale qui font que l'intrigue progresse. Sans eux, il n'y a donc rien à raconter.
Les enjeux narratifs, quant à eux, sont les articulations majeures du récit ou les orientations qui sont des étapes qui marquent non seulement la progression de l'intrigue mais aussi l'évolution des personnages. L'analyse d'un récit, qu'il s'agisse d'un roman ou d'un scénario, nécessite d'explorer sa structure et de comprendre le rythme qui le fait battre.

L'intrigue principale

L'intrigue principale (pourquoi principale ? parce qu'il existe aussi des intrigues secondaires) est ce qui justifie le récit, la force motrice qui le pousse vers l'avant et se faisant, rive le lecteur/spectateur sur ce qu'il se passe devant lui. C'est une succession d'événements, présentés chronologiquement ou non, et qui jettent le héros ou l'héroïne au-devant d'obstacles et de défis à surmonter.

L'intrigue principale s'articule bien évidemment autour d'un conflit, qui peut être interne, externe ou les deux. C'est ce conflit qui crée la tension dramatique et maintient l'attention du lecteur/spectateur. Au cœur de l'intrigue se trouve le parcours héroïque. Cet itinéraire ne tourne pas à vide. Il pénètre dans les méandres des émotions et de la psyché du personnage et, par procuration, dans celles du lecteur/spectateur. Il devient une aventure intérieure de compréhension du monde et de découverte de soi.

Alors que le protagoniste lutte contre les obstacles qui se dressent sur son chemin puisque c'est un droit imprescriptible pour tout individu de se dresser contre son sort ; un sort qui se manifeste comme autant de situations conflictuelles ; l'héroïne ou le héros sont incités à évoluer et à se transformer en des êtres meilleurs (ou du moins dans le meilleur des mondes possibles).
Ce processus révèle qui ils sont vraiment, c'est-à-dire en se réfléchissant sur leur vécu et en anticipant, peut-être, leur destinée.

Cette transformation peut être un triomphe, une véritable élévation de son âme ou bien une chute tragique, entièrement dépendante du récit et des choix que fait le protagoniste. Par exemple, La Double Vie de Véronique de Krzysztof Kieślowski. L'intrigue principale tourne autour du mystère entre Véronique et Weronika.

Lorsque nous nous immergeons dans les abysses d'un roman ou que nous naviguons sur les flots parfois tumultueux d'un scénario, l'intrigue principale constitue la charpente de l'édifice narratif. Elle est le feu qui éclaire les personnages et les thèmes, le sentier qu'ils parcourent depuis la tourmente des situations conflictuelles jusqu'à l'éclat du dénouement.
Chaque récit marquant a une intrigue principale qui en forme le cœur. Ce n'est pas juste une suite d'événements, mais plutôt une progression bien structurée qui fait passer le récit d'un état d'équilibre initial à travers des conflits et des tensions graduellement éprouvantes, jusqu'à une résolution qui se veut émouvante, passionnante, en un mot, captivante et puis un nouvel équilibre.

Et nous accompagnons les personnages dans leurs épreuves, dans leurs décisions et dans les conséquences de leurs choix. La trame principale d'une histoire est comme sa charpente. Sur cette structure sont construits tous les autres éléments. Les intrigues secondaires, les évolutions des personnages et les thèmes s'entrecroisent dans cette structure. Tous servent l'intrigue principale. Mais ils ne devraient jamais éclipser la trame principale ; au contraire, ils devraient servir à la renforcer et à l'enrichir.

Construire l'intrigue principale

Pour créer une intrigue principale efficace, il faut la planifier et bien comprendre les dynamiques narratives. Il ne suffit pas d'enchaîner une série d'événements ; chacun doit être proprement choisi et stratégiquement placé pour construire la tension dramatique et faciliter l'élan de l'intrigue. Depuis Aristote, ce processus consiste à définir un début, un milieu et une fin.

  1. Le commencement de l'histoire doit non seulement présenter le protagoniste et le contexte, mais aussi établir cet état initial d'équilibre. Cela est ensuite suivi de l'incident déclencheur, l'événement qui perturbe cet équilibre initial et jette le protagoniste dans le conflit du récit (du moins dans le plus important).
  2. Dans le milieu se déroule la majeure partie de la narration. Elle se caractérise par une action qui ne cesse de s'intensifier, des moments de plus en plus éprouvants et les tentatives désespérées du protagoniste pour les dépasser.
    Le milieu de l'histoire représente un équilibre délicat, où la tension et l'attention du lecteur/spectateur sont préservés grâce à des rebondissements et des événements savamment orchestrés et rythmés.
  3. Le climax est le point culminant de la tension dramatique construite tout au long de l'intrigue. C'est le moment où le protagoniste affronte le défi le plus grand. L'issue du climax résout le conflit d'une manière ou d'une autre et révèle dans le même coup l'issue de l'histoire, menant à un nouvel état d'équilibre.

Ce qui est remarquable avec cette progression, c'est qu'on ressent une escalade des actions. Chaque événement quel qu'il soit devrait se sourcer sur le précédent, augmentant les enjeux et la tension dramatique. Cela ne signifie pas nécessairement que l'action doit toujours s'intensifier ; les enjeux émotionnels et psychologiques sont tout aussi intéressants.
L'essentiel est de s'assurer que chaque segment du récit contribue à la dynamique narrative et mène à un climax et a une résolution satisfaisants. Le but ultime de l'intrigue principale est de captiver le lecteur/spectateur, de l'attirer dans le récit et de l'y maintenir jusqu'à la toute fin.

Une intrigue principale bien conçue y parvient en suscitant des réactions émotionnelles : de la curiosité, de l'excitation, de la peur ou de l'espoir et, en fin de compte, de la satisfaction. La progression de la narration doit sembler inévitable mais surprenante. Chaque développement découle logiquement des événements précédents tout en assurant des rebondissements imprévisibles.
De surcroît, une intrigue principale robuste sert de fondement pour l'étude des arcs dramatiques des personnages et l'investigation thématique. En jetant les personnages dans des scénarios exigeants, le récit favorise leur évolution et cette transformation qui est en fin de compte leur légitimité dans le récit. De surcroît encore une fois, cela permet au lecteur/spectateur de se rapprocher des personnages. Le fait que l'intrigue progresse avec une intention crée des voies pour explorer des thèmes et des concepts donc encore plus de significations.

Les nœuds dramatiques

Vous savez, les histoires, c'est comme un voyage dont on ne connaît pas la destination. Elles nous emmènent en aventure avec des personnages, cinglant à travers des épreuves et des transformations. Mais qu'est-ce qui fait avancer tout cela ? C'est là qu'intervient le concept des nœuds dramatiques : des moments ou des étapes qui font que la narration bifurque vers une destinée que nous n'avions pas vu venir. Mais pas seulement car ces mêmes moments participent activement à l'évolution des personnages vers le meilleur ou le pire.

Ces nœuds dramatiques ne sont donc pas seulement des éléments de l'intrigue, ils agissent comme le cœur même du récit en ce sens qu'ils lui insufflent de l'élan et un but. N'est-ce pas cela la vie ? Ces moments couvrent toute une gamme d'événements décisifs. Ils peuvent être des décisions monumentales prises par le héros ou l'héroïne alors qu'ils se tiennent à une croisée des chemins et choisissent celui qui change justement le cours de la narration. Peut-être que le héros décide d'affronter le méchant de l'histoire ou de défier l'autorité et il s'ensuit des conséquences, toute une chaîne de contrecoups.

Les découvertes sont un autre moment très important dans tout récit. Découvrir une vérité cachée, un passage secret ou un artefact perdu depuis longtemps peut dramatiquement faire comprendre au protagoniste que le monde et la place qu'il y occupe ne sont pas ce qu'il croyait. N'y prenant garde, l'illusion et l'imagination nous trompent.

Les rencontres, elles aussi, jouent un rôle vital. Rencontrer un mentor agréablement sage, un adversaire bien plus rusé que nous l'imaginions ou un Love Interest peut tous être des moments transformateurs. C'est souvent dans la prise de conscience de nos vulnérabilités et l'évidence que nous devons les affronter que nous découvrons en nous des vérités insoupçonnées. Idem pour les êtres fictifs.

Une prémisse sous forme d'un résumé

Essayez de rassembler les personnages nécessaires à l'histoire, ce qu'ils cherchent à accomplir et les obstacles qui se dressent sur leur chemin. Cela vous aidera à identifier l'intrigue principale. L'inspiration d'une histoire peut provenir d'un lieu, d'une situation intrigante, d'une conversation délicieusement décalée, ou même d'un titre. Ce point de départ fonctionne comme le grain de sable qui finit par devenir une perle.

Si vous avez déjà une idée de ce dont traite votre histoire, décrivez-la ici. Sinon, listez simplement quelques-uns des concepts qui vous ont donné envie d'écrire cette histoire en premier lieu. Résumez le récit en quelques phrases pour identifier l'intrigue principale. Demandez-vous, Quel est le conflit ou le défi principal auquel le protagoniste est confronté ? et Comment ce conflit est-il résolu ?.
Ensuite, condensez l'histoire en un résumé de quelques lignes afin de capturer les événements principaux et le parcours du protagoniste. Ce résumé vous aidera à identifier l'intrigue principale c'est-à-dire le conflit ou le problème au cœur de votre récit. En gros, faire un résumé d'une histoire en mettant l'accent sur les personnages principaux, leurs objectifs et les obstacles qu'ils rencontrent, c'est un exercice très important pour les autrices et les auteurs, peu importe où ils en sont dans leur carrière.

Non seulement cela permet de résumer de quoi parle votre histoire, mais c'est aussi un outil pour développer, affiner et communiquer l'histoire. Ce résumé aide à identifier l'intrigue principale, car sans elle, il n'y a pas grand-chose à dire.

  • L'Adieu (2019)
    Dans cette comédie dramatique touchante, Billi, une jeune femme sino-américaine, apprend que sa grand-mère bien-aimée en Chine est atteinte d'un cancer en phase terminale. Cependant, sa famille décide de ne pas en avertir la grand-mère et organise un faux mariage comme prétexte pour se réunir une dernière fois.
    Prise entre deux cultures et deux visions différentes de la famille, Billi doit trouver sa propre voie pour faire ses adieux.
  • Minari (2020)
    Minari est un drame émouvant sur une famille d'immigrants coréens qui s'installe dans une ferme en Arkansas dans les années 1980. Alors qu'ils luttent pour s'adapter à leur nouvelle vie, ils doivent faire face à des défis économiques, culturels et familiaux. Cependant, lorsque la grand-mère excentrique de la famille arrive de Corée, elle apporte avec elle une plante de minari, symbole de force et d'endurance, qui aidera la famille à surmonter les obstacles et à trouver leur place dans ce nouveau monde.

The Farewell, le conflit auquel la protagoniste, Billi, est confrontée est d'être prise entre deux cultures et deux visions différentes de la famille.
D'un côté, elle est tiraillée par sa famille sino-américaine qui a décidé de cacher la vérité à la grand-mère mourante et de l'autre, elle est confrontée à ses propres croyances et valeurs en matière de vérité et d'honnêteté. Elle doit trouver sa propre voie pour dire au revoir à sa grand-mère tout en se frayant un chemin dans ces difficiles institutions culturelles et familiales.

Dans Minari, la famille d'immigrants coréens (qui représente le protagoniste) lutte pour s'adapter à leur nouvelle vie dans une ferme en Arkansas dans les années 1980, tout en faisant face à des défis économiques, culturels et familiaux.

La légitimité d'un récit se situe dans son intrigue principale. C'est-à-dire la situation conflictuelle par laquelle le scandale est possible. Connaître les personnages, c'est connaître leurs objectifs ou leurs désirs et les difficultés qu'ils rencontrent pour les réaliser.
Une fois ceci posé, le travail de l'autrice et de l'auteur peut commencer. Chaque élément de l'intrigue est une note dans la symphonie du tout. La dissonance serait facile s'il n'y avait eu auparavant un résumé. Les détails inutiles viendront troubler l'ensemble et atténueront l'émotion de l'histoire. En somme, résumer l'histoire revient à accorder chaque note à la mélodie qui se joue.

Pour illustrer ce concept avec un film de Woody Allen, considérons Midnight in Paris. Dans ce film, l'intrigue principale tourne autour de Gil Pender, un scénariste et romancier en manque de créativité en vacances à Paris avec sa fiancée, Inez.


La situation conflictuelle se produit lorsque Gil entre dans le passé. Il y rencontre les figures littéraires et artistiques qui l'ont marqué et des interactions qu'il a avec elles, il remet en cause sa vie actuelle, ses valeurs et ses relations. Son objectif est de trouver l'inspiration pour son écriture et du même coup, une vie plus épanouissante qu'il ne peut s'empêcher de ramener au passé.

Les obstacles qu'il rencontre incluent bien-sûr ses sentiments conflictuels à propos de ses fiançailles avec Inez qui ne partage pas sa vision romantique du passé, ce qui est une marque de fabrique de Woody Allen.
Mais son combat le plus intense est de concilier sa version idéalisée des années folles avec les réalités de sa vie actuelle. Car cette image n'est peut-être pas aussi idyllique qu'il l'imaginait. Cet aperçu concis saisit l'intrigue principale du film qui se constitue du conflit interne de Gil et de sa quête pour le résoudre.

Midnight in Paris illustre comme il faut comment tous les éléments s'alignent pour servir et explorer ce conflit au cœur de l'intrigue : des interactions de Gil avec ces figures historiques à ses relations dans le présent.
La magie de ce récit est sa manière tout à fait singulière d'utiliser ce conflit pour explorer ses thèmes : la nostalgie, la créativité et grandir en se confrontant à soi-même. Cela démontre la puissance d'une narration lorsque son intrigue principale est bien définie.

La dynamique entre les personnages

Le développement des personnages est un axe essentiel d'un récit efficace. Les arcs dramatiques des personnages apportent de la vie au récit. Ils s'y dévoilent émotionnellement.
Le personnage principal y révèle une profondeur existentielle qui rompt la distance entre lui et le lecteur/spectateur qui s'en trouve ému. La force antagoniste y développe des entrechats sur ses traumatismes d'enfance. On découvre que les personnalités des personnages sont bien plus compliquées qu'il n'y paraît de prime abord. C'est tout l'intérêt de l'intrigue principale de dépouiller les personnages des apparences pour montrer ce qu'ils sont ou ce qu'ils ne sont pas.

L'autrice et l'auteur nous donnent à voir une évolution. Un arc dramatique est une lutte permanente contre la rigidité. Ce principe de création et d'évolution n'est pas seulement une nécessité, mais aussi une compétence car il leur faut comprendre la nature humaine, pourquoi & comment chacun se fixe des objectifs dans sa vie, les motivations qui nous animent et les conflits inévitables qui s'ensuivent.
Le développement des personnages est donc un élément essentiel d'un scénario, car il donne vie à l'intrigue et permet au lecteur/spectateur de s'engager émotionnellement avec les personnages.

La filmographie d'Ida Lupino est réputée pour sa profondeur narrative, en exposant souvent des thèmes de portée sociale, de lutte personnelle et de résistance humaine. Un exemple frappant de cette profondeur se trouve dans son film de 1953, The Hitch-Hiker (Le voyage de la peur), qui est considéré comme le premier film noir grand public réalisé par une femme aux États-Unis.

La mise en scène et la narration de Lupino exploitent les tensions psychologiques et la vulnérabilité humaine, et offrent une exploration saisissante de la peur, de la confiance et de l'instinct de survie dans des circonstances dramatiques.
The Hitch-Hiker se fonde sur l'histoire vraie d'un tueur psychopathe qui prend en otage deux amis pour qu'ils le conduisent au Mexique. Contrairement aux films policiers typiques de l'époque qui se concentraient uniquement sur le crime et ses aspects procéduraux, l'approche de Lupino met l'accent sur la dynamique psychologique entre les personnages. La profondeur narrative du film est évidente dans la façon dont elle explore la relation entre les deux amis, Roy Collins et Gilbert Bowen, et leur ravisseur, Emmett Myers.

Lupino joue avec brio sur l'espace confiné de la voiture qu'elle contraste avec les vastes paysages désolés du désert mexicain pour amplifier la pression psychologique qui s'exerce sur les personnages. La profondeur narrative apparaît à travers le développement des personnages. Emmett Myers n'est pas seulement un méchant de l'histoire unidimensionnel ; ses actions et ses interactions avec Collins et Bowen révèlent un personnage complexe mû par le cynisme, le désespoir et un besoin profond de contrôle.
De même, Collins et Bowen ne sont pas de simples victimes ; leurs personnages évoluent tout au long de cette épreuve, mettant en évidence la résilience, l'ingéniosité et la dynamique fluctuante de leur amitié sous l'effet du stress. Le film convoque les thèmes de la masculinité, de la survie et des choix moraux à faire en cas de contrainte extrême. La profondeur psychologique en est encore renforcée par la photographie austère et très contrastée, qui accentue la tension liée à la claustrophobie et la peur existentielle qui accompagne la situation des personnages.

La mise en scène de Lupino veille à ce que le récit reste étroitement axé sur les états psychologiques et émotionnels de ses personnages, ce qui fait de The Hitch-Hiker une étude passionnante de la nature humaine en situation de crise.

Outrage réalisé par Ida Lupino en 1950. Le film se concentre sur Ann, victime d'une agression sexuelle. Lupino aborde le sujet avec une sensibilité inédite pour l'époque. Au lieu de se concentrer uniquement sur l'événement lui-même, le film étudie la tourmente psychologique de Ann, sa lutte contre la stigmatisation sociale et son lent cheminement vers la guérison et la réappropriation de son identité.

Cette analyse est critique car elle élève l'histoire d'une simple curiosité à un examen sérieux de la résilience face au traumatisme et à sa guérison éventuelle. En somme, le développement des personnages est un élément clé de l'œuvre d'Ida Lupino. Elle a su créer des personnages authentiques en fouillant dans les profondeurs de la nature humaine. Ses films offrent une exploration émotionnellement sincère de thèmes sociétaux et des dilemmes personnels, ce qui les rend intemporels et pertinents encore aujourd'hui.

De surcroît, la représentation tout en finesse des personnages secondaires ajoute de l'épaisseur aux dynamiques de personnages. Les réactions de ceux qui entourent Ann, de son fiancé à son agresseur en passant par les différents étrangers qu'elle croise, reflètent toutes les attitudes sociétales plus larges envers les victimes d'agression.
Ces personnages, avec leurs personnalités et leurs antécédents distincts, interagissent avec Ann de manière à favoriser son retour à une vie normale et à appuyer les thèmes du film tels que le jugement, la compassion et la résistance face à l'adversité.

Intrigue & Structure

Dans le monde de la narration, que ce soit à travers l'œil d'une caméra ou le trait d'un stylo, l'intrigue et la structure en sont les maîtres tisserands : trame et fil, souvent sous-estimés, sur lesquels se déploie dans le temps et en étendue l'ensemble du récit.

Un résumé, ne serait-ce que de quelques lignes, est non seulement un outil narratif, mais aussi un terreau fertile d'où jaillit la créativité. Au cœur de ce grand théâtre de la narration, voici donc le métier à tisser de la création !

  • L'intrigue
    Imaginez-la comme la chaîne, ce sont de solides fils tendus. Chaque événement, une fibre, s'entrecroise, créant ainsi tension et intrigue. Drame, comédie, suspense : tous proviennent de cette chaîne.
  • La structure
    Mais c'est la trame, n'est-ce pas ? C'est le fil joueur qui se tisse au gré du vent, qui s'enroule autour de nos rêves. Laissez votre imagination tisser ce fil en couleurs et en vie. Mais voici le secret : la structure est méthodique. Elle sait où traverser, quand s'arrêter. C'est le rythme, le battement du cœur de votre récit.
  • Un plan
    Ensemble, chaîne et trame forment un plan. Imaginez le crissement du métier à tisser alors que l'autrice et l'auteur, mi sorciers, mi architectes suivent cette carte. Des premiers murmures auclimax turbulent, ils tissent destin et destinée.

Condenser

Condenser l'immensité d'un récit en un résumé de quelques lignes peut être comparé à l'art de créer un croquis préliminaire avant de se lancer dans la peinture d'un chef-d'œuvre. Cette comparaison, riche en images et en implications, exacerbe la tâche déterminante à laquelle sont confrontés les conteurs de tous les médias. La clarté de la vision et bien comprendre le cœur de son sujet sont comme les touches qui définiront bientôt tout le tableau.

Dans l'écriture d'une œuvre de fiction, où chaque ligne dramatique s'entrecroise pour produire les thèmes du récit et la consistance des personnages, la rédaction d'un résumé n'est pas seulement une étape préliminaire, mais un exercice fondamental de projection et de compréhension de l'œuvre en devenir.
Elle exige du conteur qu'il distille l'essence de son récit, tout comme un artiste esquisse les lignes chantournées de sa future œuvre. Cela exige de la clarté et savoir lire entre les lignes. De la même manière qu'un artiste pose les premiers coups de pinceau sur sa toile, l'autrice et l'auteur esquissent les grandes lignes de leur récit.

Ce croquis préliminaire est indispensable ; en enveloppant l'esprit de la vision, cela pose une base solide pour les tâches complexes à venir. Par exemple, dans Douze Hommes en colère de Sydney Lumet, le croquis initial était le concept de douze jurés délibérant sur le sort d'un jeune homme. Cette prémisse simple mais puissante a servi de plan pour visiter les thèmes de la justice, des préjugés et de la responsabilité morale.

Visualisez que vous avez l'œil rivé derrière l'objectif. Vous observez une scène. La vue est floue jusqu'à ce que la bague de mise au point soit ajustée. A ce moment seulement, tout vous paraît clair. C'est tout l'art d'écrire un résumé. Il ne s'agit pas de s'encombrer de tous les détails, mais de se concentrer sur ce qui est évident. Vous vous assurez ainsi que chaque élément à l'intérieur du plan contribue au cœur de la narration.
DansNetwork : Main basse sur la télévision du même Sidney Lumet, avoir une idée claire du sujet était d'une importance capitale. Le résumé condense le récit en mettant en lumière la spirale chaotique de l'industrie télévisuelle en regard des audiences. Cette définition claire a permis de reconnaître avec précision le rôle des médias dans la société. Ainsi la ligne directrice de l'œuvre à consister à ce que chaque personnage et le développement de l'intrigue renforce ce thème majeur du récit. Même l'intrigue secondaire entre Schumacher et Christensen participe de ce thème.

Le cœur de la narration est ce qui sert de fondement au récit. Il faut creuser profond pour que la structure puisse solidement s'élever sur lui. En effet, il faut qu'elle puisse tenir ensemble tous les éléments dramatiques qui participent du récit.
DansSerpico, nous avons un récit qui tourne entièrement autour de la lutte contre les brebis galeuses de la police. C'est le fondement, le cœur. En saisissant cette notion fondamentale, Serpico peut examiner les dilemmes moraux auxquels l'ami Frank Serpico a été confronté. Son récit ne se limite pas à une simple séquence d'événements, mais constitue une étude sérieuse de l'intégrité, même au sein d'un système corrompu.

Construire son récit

La construction d'un récit s'apparente à celle d'un immeuble, une comparaison qui illustre bien la minutie du métier d'autrice et d'auteur. Pour commencer, l'architecture de l'intrigue nécessite des fondations solides, tout comme l'excavation initiale et la pose des fondations d'un nouvel édifice.
Cette fondation est la mise en place du récit, où les conditions initiales (c'est-à-dire le monde ordinaire), les enjeux et les personnages sont présentés, afin de poser la première pierre sur laquelle tout le reste s'érigera.

Dès lors que le récit progresse, chaque nœud dramatique est un niveau supplémentaire ajouté à cet immeuble métaphorique. Ces moments sont les événements et les décisions décisifs qui font avancer le récit, couche par couche, chacun ajoutant de la hauteur, de la profondeur et de la complication au récit.

La construction de ces niveaux n'est pas fortuite ; elle nécessite une arrangement et une anticipation soigneuses, afin que chaque ajout ait une utilité et contribue à la stabilité et à l'orientation générales de l'histoire.

Les personnages et les thèmes sont les poutres et les murs porteurs de cette structure. Les personnages, avec leurs désirs, leurs conflits et leurs arcs dramatiques, sont les éléments porteurs qui soutiennent le poids du récit. Ils apportent force et résistance pour autoriser la narration à atteindre les hauteurs qu'elle s'est donnée comme objectif.
Les thèmes, quant à eux, sont comme les murs qui enferment les espaces à l'intérieur de l'édifice. Ils donnent forme et sens au récit. Ils séparent et définissent le paysage intérieur matériel, symbolique, psychologique, émotionnel, créant des lieux qui couvrent les différentes idées et expériences émotionnelles du récit.

C'est ici que la pleine ampleur du récit se réalise. Ses nombreux étages et structures de soutien aboutissent à ce moment qui est à la fois une satisfaction pour le lecteur/spectateur en regard de son investissement dans le récit et une possible merveille architecturale.
Un après-midi de chien est construit sur la base d'un braquage de banque qui a mal tourné. Sur cette fondation, la structure s'est élevée emportant avec elle les thèmes de l'amour, du désespoir et de la marginalisation sociale. Grâce à l'architecture soignée de l'intrigue, il y avait de la tension tout en développant les personnages, et la construction de l'édifice narratif est captivante tout en étant riche en émotions.

La séquence des événements

Vous savez, l'une des choses à propos des histoires, de toutes les histoires et là, peut-être que nous allons partager un grand secret, c'est qu'elles ressemblent beaucoup à une danse et à une très jolie danse pour certaines. Car je ne parle pas du genre de danse où vous marchez accidentellement sur les pieds de votre partenaire, bien que, je l'avoue, cela a son propre charme.
Non, je parle d'une danse qui a été si soigneusement chorégraphiée que chaque pas semble être un décret venu des cieux, trop beau pour être vrai. Et pourtant, c'est ainsi que nous devons approcher la séquence des événements dans nos récits. Posons-nous un instant juste pour un effet dramatique.

Chaque pas, chaque mouvement dans notre danse narrative, doit être planifié avec autant de soin que de s'échapper en douce d'une réunion barbante. On aimerait d'ailleurs en planifier beaucoup plus. Ces étapes doivent être synchronisées avec le rythme du battement de la narration puisque les récits ont ce battement, et si vous écoutez attentivement, vous pouvez l'entendre. Et voici mon argument : cette danse chorégraphiée guide le lecteur/spectateur à travers le récit. Elle le mène avec des rebondissements et des retournements de situation.

C'est difficile car pour l'autrice et l'auteur, c'est comme d'errer dans l'obscurité d'une salle emplie de porcelaines inestimables. L'intention est de garder le lecteur/spectateur rivé sur ce qu'il se passe, s'accrochant à chaque mot, chaque mouvement, comme si son âme en dépendait. Et juste au moment où il croit avoir compris le rythme, l'autrice et l'auteur jettent un rebondissement, n'importe quoi mais quelque chose d'inattendu.
C'est ainsi que le lecteur/spectateur reste sur ses gardes, et plus important encore, le fait se languir pour en savoir plus. Ainsi,Le Verdict est une danse de la rédemption, où chaque séquence d'événements a été soigneusement chorégraphiée pour guider le lecteur/spectateur à travers le parcours héroïque du protagoniste. Chaque action, chaque mouvement est réglé par un métronome. Frank, en quête de justice, suit le mouvement avec conviction. A chaque pas en avant, c'est un dilemme moral. Puis l'émotion prend le relais : la tristesse, la colère, l'espoir. Le lecteur/spectateur vibre à l'unisson.

Puis la quête de justice atteint son apogée. Les apparences se déchirent et révèlent la vérité. Et là, dans un dernier pas, la justice triomphe. Ce rythme délibéré s'adresse directement au lecteur/spectateur car c'est pour lui qu'on écrit.

Le conflit se résout

Le conflit est au cœur de tout récit. Tel un torrent impétueux, il guide et entraîne le récit à travers les méandres de l'intrigue qu'il maintient en vie. Lorsqu'il y a un problème ou un désaccord, cela rend les choses difficiles pour les personnages. Ils doivent faire face à des obstacles et décider quoi faire. Le conflit capte l'attention du lecteur/spectateur et le rend impatient de savoir comment les personnages survivront à une telle aventure. Sans un conflit, il n'y a pas de mouvement, il n'y a pas de torrent qui dévale et donc, rien à dire.

Le Soupirant, Etaix utilise son corps et les gags visuels dans des situations conflictuelles, ce qui, malgré l'humour omniprésent, génère de la tension dramatique.
Pierre, le héros, tente de courtiser une femme, mais ses tentatives sont constamment contrecarrées par une série de malentendus et de maladresses.

Etaix augmente efficacement l'intensité de ce conflit en incorporant de la comédie pour générer des moments de grande tension et de suspense. Cependant, il sait également quand introduire des moments de calme, comme ces moments romantiques entre Pierre et l'amour qu'il s'est choisi.

Yoyo, ce drôle de clown Etaix montre qu'il a les compétences pour maintenir l'équilibre d'un récit et guider le lecteur/spectateur à travers les montagnes russes des émotions de ses personnages. Il en est le maître de cérémonie. Il jongle avec le drame et la comédie avec la finesse d'un professionnel aguerri. Alors laissez-vous emporter dans cette balade.

Le film suit la vie d'un millionnaire qui perd tout et devient un clown. C'est par l'arc dramatique du personnage que Pierre Etaix convoque les thèmes de l'amour, de la perte et de la rédemption. Il sait faire voile dans les rapides du récit. Drame et comédie se répondent l'un l'autre pour se maintenir dans ce flot d'émotions à fleur de peau.

La conclusion est le calme après la tempête, le moment où les eaux s'apaisent et où le récit trouve sa solution. C'est le moment où les personnages et le lecteur/spectateur sont ramenés en toute sécurité sur le rivage, après avoir relevé les différentes gageures exposées dans l'intrigue.
Conclure permet de régler les derniers détails, c'est-à-dire de résoudre ce qui doit encore l'être et de mettre un terme à l'histoire. C'est un moment de réflexion où l'on pèse ce à quoi l'on vient d'assister et où l'on cristallise les leçons apprises en cours de route. La résolution donne un sens aux rapides traversés, et offre au lecteur/spectateur un sentiment d'accomplissement et de satisfaction.

Le Grand Amour, Étaix et Jean-Claude Carrière se penche sur les thèmes de l'amour, de la fidélité et de la monotonie de la vie au jour le jour. Le film suit Pierre qui est pris dans un enthousiasme onirique pour sa jeune secrétaire tout en menant à bien les routines de son mariage.
La solution arrive lorsque Pierre, après diverses équipées comiques et surréalistes, choisit de réaffirmer son engagement envers sa femme.

Son trouble émotionnel, véritable tempête personnelle, et les mésaventures comiques qui découlent de son infatuation, s'apaisent dans la résolution. Cette conclusion ramène le récit sur le rivage de la réalité, où Pierre reconnaît la valeur de son mariage. Alors, le lecteur éprouve un sentiment de contentement en comprenant que le héros a grandi et qu'il a appris de son expérience.

Le temps dans Yoyo s'étend des années 1920 aux années 1960. Le récit mêle comédie, mélancolie et une critique de l'évolution de la société. Il raconte l'histoire d'un millionnaire qui renoue avec son fils Yoyo. Ensemble, ils rejoignent un cirque et font l'expérience des bonheurs et des malheurs de la vie. La conclusion de Yoyo se produit lorsque les personnages trouvent un contentement et un but dans les joies simples de la vie du cirque, malgré les pertes et les bouleversements auxquels ils se sont confrontés.
Cette conclusion représente le calme après la tempête de leurs aventures mouvementées et produit un sentiment de plénitude et d'accomplissement tant pour les personnages que pour le lecteur/spectateur. Le film se termine par une réflexion sur la nature cyclique de la vie et la valeur pérenne de l'amour et de la simplicité. Gardez à l'esprit que le destinataire de votre discours est le lecteur/spectateur. Tragique ou non, le message ou le symbole qui transparaissent lors de la conclusion lui parlent.

Dans Le Soupirant, Étaix présente l'histoire de Pierre, un jeune homme timide et maladroit, pressé par ses parents de trouver une épouse. Le film dépeint avec humour les maladresses de Pierre dans ses tentatives de romance et son processus de découverte de soi.
La conclusion se produit lorsque Pierre, après plusieurs tentatives romantiques infructueuses, trouve inopinément l'amour dans un moment de sincère complicité plutôt qu'à travers les grands gestes et les efforts qu'il croyait nécessaires. Cette résolution apporte une conclusion positive au récit. Elle règle les questions en suspens sur la quête d'amour de Pierre et transmet au lecteur/spectateur un discours convainquant sur l'imprévisibilité de la quête amoureuse et sur l'importance d'être authentique avec soi et autrui.